Le destin du judaïsme dans son ensemble, avant même qu’il ne devienne rabbinique, c’est-à-dire inscrit dans deux cercles concentriques (loi écrite et loi orale), s’est joué à une époque où l’exil et la destruction du second temple de Jérusalem en l’an 70 de notre ère, faisaient encore partie de l’histoire récente, douloureusement vécue par des milliers de survivants de cette double catastrophe : la disparition du temple de Jérusalem et, partant, la cessation forcée du culte sacrificiel, un double événement qui fut très mal ressenti par la population juive et qui entraîna le désarroi même au plan théologique ; l’occupation par la puissance victorieuse romaine de tout le territoire rappelait de sinistres souvenirs.
Les Judéens avaient perdu et leur lieu de culte majeur et leur autonomie ou indépendance politique. Aucune institution ancienne ne fut épargnée : la famille royale avait été décimée et ses rares rescapés contraints de vivre dans la clandestinité, les forces armées étaient vaincues et la caste sacerdotale qui gérait le culte sacrificiel ne servait plus à rien Et comme si cela ne suffisait pas à discipliner ce peuple de Dieu, les Romains accélérèrent la déportation des vaincus, donnant naissance à un exil qui allait durer pas moins de deux millénaires. Seule une classe nouvelle émergente, celle des Docteurs ou érudits des Ecritures, semblait répondre aux exigences du temps présent. Cette classe qui va donner naissance aux commentaires talmudiques et à une abondante littérature exégétique, tenait entre ses mains l’avenir de tout le peuple.