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Prier pour la paix au Vatican

 

Prier pour la paix au Vatican : une résurgence de la fraternité abrahamique

 

 

 

L’initiative du pape François avait commencé par faire sourire, un peu comme si des gourous proposaient de guérir des maladies graves et contagieuses par la contemplation d’un jet d’eau ou la méditation transcendantale.. et finalement cela a pris. Lorsqu’il était en visite en Israël et chez les Palestiniens, le pape avait invité les deux hommes politiques les plus importants à venir prier avec lui, chez lui, au Vatican pour la paix. Je me souviens avoir été choqué par le ton moqueur et ironique d’un journaliste de radio qui annonçait cette proposition comme si elle venait d’une autre planète. Et pourtant, c’est une excellente initiative. Je ne dis pas que cela va déboucher sur la paix mais cela y contribuera indéniablement.

 

 

 

Commençons par tenter d’appréhender cette vague de scepticisme, si caractéristique de notre temps, chaque fois qu’il s’agit d’une manifestation de spiritualité ou de croyance à l’invisible. Cette époque où nous vivons a totalement exclu et banni l’idée même de transcendance. Elle ne croit plus en rien, pas même en ce qu’elle fait. Tant le désenchantement est profond et la foi en l’être suprême ou simplement en l’être humain, est labile.  Ce journaliste qui se gaussait du pape et de son initiative n’est pas entièrement responsable de son incrédulité gouailleuse ni de son scepticisme affiché. Chaque jour que Dieu fait, il nous annonce des malheurs, des injustices, des guerres, bref des horreurs de par le monde.. Il promène donc sur le monde qui l’entoure, un regard qui ne rencontre jamais la vertu, l’espérance et l’équité. Je n’aurai aucun mal à énoncer je ne sais combien d’horreurs annoncées à la chaîne ce matin même : quatre jeunes gens morts la nuit dernière dans une course poursuite, un jeune homme dans le coma à Marseille après avoir été poignardé, quinze morts dans une église de Bangui, attaquée etc… Sans oublier, sur la scène politique française, la chute infernale de l’actuel président dans les sondages : les journalistes se complaisent à appeler François Hollande, Monsieur 3%… Et je laisse de côté, par charité, les moqueries des commentateurs de son déjeuner avec les Bleus à Clairefontaine…

 

 

 

Et voici que dans cet univers où plus rien ou presque ne fonctionne, un vieillard en invite deux autres à venir prier avec lui pour que les hommes réinstaurent entre eux des relations de paix.

 

 

 

La prière, que vaut elle, que représente t elle aujourd’hui ? Pas grand chose. Pourtant, elle est le lien quasi unique entre l’être humain et la transcendance ou Dieu. Même les païens ont adopté une forme de culte qui se rapproche de la prière en portant des offrandes dans leurs temps dédiés à telle ou telle divinité particulière ou dans un panthéon qui les réunit toutes.

 

 

 

Toutes les religions, toutes les spiritualités ont conçu des prières et formé des liturgies. Je m’en tiendrai ici aux prières monothéistes puisque les trois hommes qui vont unir leurs prières sont le catholique François, le juif Péréts et le musulman Abbas. Trois branches du monothéisme abrahamique, trois héritiers de la fraternité entre les hommes.

 

 

 

Le patriarche Abraham est la personnalité la plus consensuelle, la seule qui ait été acceptée sans réserve par les trois grandes églises du monde : judaïsme, christianisme et islam. Moïse ne jouit pas du même statut car c’est à lui que fut remise la Tora tandis qu’Abraham s’est contenté de découvrir l’idéal du Dieu unique. Ce n’est pas rien. Et c’est encore lui qui, dans le chapitre XXII du livre de la Genèse, n’a pas hésité à offrir son propre fils Isaac en sacrifice, ce que Dieu a refusé juste au dernier moment, après cette épreuve inhumaine à laquelle le patriarche fut soumis : on ne lui a pas demandé de mourir en martyre, mais bien pire, de sacrifier ce qu’il avait de plus cher au monde : un fils, son fils tant attendu et qui devait lui assurer une descendance nombreuse.

 

 

 

Louis Massignon, homme de foi et de science, personnalité controversée, a écrit un ouvrage intitulé les trois prières d’Abraham, montrant que le patriarche a fait de la prière pour les autres sa raison de vivre : la prière pour les villes pécheresses, pour Ismaël et pour Isaac. Mais surtout il n’était pas égoïste mais altruiste. La tradition juive compare l’attitude de Noé, le rescapé du Déluge, à celle d’Abraham : Noé n’a prié que pour lui et ses proches, Abraham a prié pour les autres, tous les autres. Ce qui l’installe dans une spiritualité nettement supérieure à celle de Noé. C’est pour cela que juifs, chrétiens et musulmans parlent d’un être aimé de Dieu…

 

 

 

Juifs et chrétiens ont élargi l’anneau en introduisant Moïse, porteur des tables de la loi, et l’église en introduisant Jésus. Les Arabo-musulmans ont parlé des prières abrahamiques (al salawat al ibrahimiya) et optent clairement pour la religion d’Abraham. La Bible hébraïque n’a jamais perdu de vue ce grand patriarche qui se situe aux origines de l’identité  religieuse d’Israël (Abraham ha-Ivri). La littérature prophétique adjure les enfants d’Israël de se souvenir d’où ils viennent : levez les yeux vers la mine d’où vous été extraits, regardez votre patriarche Abraham (habbitou el Abraham avikhém)…

 

 

 

Ce thème sera très probablement l’ossature de la prière des trois dirigeants pour la paix. Mais il y a une coïncidence qui est des plus heureuses : la journée du 8 juin, c’est le lendemain de la fête de chavou’ot (Pentecôte) qui marque le don de la Tora au peuple d’Israël.

 

 

 

Voilà un pape vraiment sensible aux symboles et qui a la main heureuse. Réussira t il ? Cela dépend de la ferveur des prières.

 

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