VU HIER MINUIT À PARIS XVIE…
Hier soir, vers minuit, nous rentrons mon épouse et moi, d’un dîner avec des amis dans le quatrième arrondissement de Paris. Nous garons notre véhicule dans le parking souterrain sous la place Victor Hugo. Ayant quitté le véhicule, nous nous dirigeons vers l’ascenseur et là nous nous trouvons, nez à nez, pour ainsi dire, avec un homme emmitouflé dans un sac de couchage, posé sur des cartons à même le sol. Gêné pour cet homme qui n’avait pas d’endroit où passer la nuit hormis ce sous-sol de parking parisien, je lui dis : bonsoir, Monsieur ! L’homme ne souffle mot, regardant fixement devant lui Ma femme est encore plus gênée que moi et regarde le bout de ses chaussures. L’homme, quant à lui, reste prostré, absent, comme n’étant pas dans ni de ce monde…
Arrivé à l’air libre, nous n’échangeons pas un mot entre nous. C’est mon épouse qui finit par briser le silence en disant qu’il y a de plus en plus de gens dans cette situation…
Je ne réponds pas et me remémore les traits du visage de l’homme sans toit : les cheveux noirs, âgé d’environ quarante ans, le visage non hirsute, bref un regard normal : un homme qui , hier encore, probablement, avait une adresse, un statut social et une vie normale comme des millions de parisiens.
Cette rencontre est un spectacle saisissant pour un philosophe. On peut alors réfléchir à la précarité de la vie, à la déchéance, bref au malheur. Un homme, comme vous et moi, soudain déclassé, rejeté et exclus. Quand on lit ou écoute des développements sur l’exclusion sociale, on ne réagit pas vraiment. Mais on en voit les conséquences concrètes à portée de main, on réalise enfin ce que cela représente.
Et que faire pour endiguer ce processus, alors que les rigueurs de l’hiver sont à nos portes ?