UNE PLANÈTE MIChAELJACKSONISÉE : le visible et l’invisible
J’aimerais, dans ce papier, traiter de deux points afférents à la disparition brutale de la star de la pop music : tout d’abord, le tumulte médiatique et ensuite, d’un point de vue philosophique, notre relation à la mort, à être là sans être présent, c’est-à-dire à continuer à occuper une place dans le conscient et l’inconscient des gens, sans être là… C’est continuer à exercer une action post mortem sur nos vies ; en fait, la relation au sein de l’humanité entre les morts et les vivants.
Le tumulte médiatique
Nos sociétés post modernes ne pourront plus jamais réguler l’activité journalistique qui devrait d’ailleurs changer de nom car nous tous devenons, grâce à internet (face book, twitter etc…) des chroniqueurs et des journalistes. Je rappelle que la première information sur le décès de M. Jackson a été relayée par l’internet. De même pour cette poignante photographie (prise par un téléphone portable) du mort, étendu sur une civière, en route vers l’institut médico-légal. Il me revient en mémoire que même l’exécution de Saddam Hussein a été relayée de la même manière dans le monde entier ; plus proches de nous, les événements d’Iran où les téléphones portables ont accompli le même effet.
La vague informationnelle étant indomptable, nous devons nous résigner à vivre avec l’instantanéité des nouvelles et leur propagation dans le monde entier (voyez la Chine, le monde arabe, etc) avant même le moindre essai interprétatif, le moindre tissu conjonctionnel pour situer les choses dans un contexte qui aide à les comprendre. Faute de quoi, elles sont condamnées à demeurer des faits bruts et isolés.
UNE PLANÈTE MIChAELJACKSONISÉE : le visible et l’invisible
J’aimerais, dans ce papier, traiter de deux points afférents à la disparition brutale de la star de la pop music : tout d’abord, le tumulte médiatique et ensuite, d’un point de vue philosophique, notre relation à la mort, à être là sans être présent, c’est-à-dire à continuer à occuper une place dans le conscient et l’inconscient des gens, sans être là… C’est continuer à exercer une action post mortem sur nos vies ; en fait, la relation au sein de l’humanité entre les morts et les vivants.
Le tumulte médiatique
Nos sociétés post modernes ne pourront plus jamais réguler l’activité journalistique qui devrait d’ailleurs changer de nom car nous tous devenons, grâce à internet (face book, twitter etc…) des chroniqueurs et des journalistes. Je rappelle que la première information sur le décès de M. Jackson a été relayée par l’internet. De même pour cette poignante photographie (prise par un téléphone portable) du mort, étendu sur une civière, en route vers l’institut médico-légal. Il me revient en mémoire que même l’exécution de Saddam Hussein a été relayée de la même manière dans le monde entier ; plus proches de nous, les événements d’Iran où les téléphones portables ont accompli le même effet.
La vague informationnelle étant indomptable, nous devons nous résigner à vivre avec l’instantanéité des nouvelles et leur propagation dans le monde entier (voyez la Chine, le monde arabe, etc) avant même le moindre essai interprétatif, le moindre tissu conjonctionnel pour situer les choses dans un contexte qui aide à les comprendre. Faute de quoi, elles sont condamnées à demeurer des faits bruts et isolés.
Mais revenons à ce véritable matraquage médiatique du premier jour et même d’hier soir. Ce fut particulièrement pénible de voir répéter les mêmes commentaires des mêmes correspondants à l’étranger, les mêmes pleurs, les mêmes cris ! Vendredi après-midi, à Paris, dans ma voiture, j’entends les plaintes larmoyantes d’une jeune étudiante livrant son désarroi en anglais… Eh bien, la traductrice française s’est cru elle aussi tenue de traduire en français tout en faisant semblant de pleurer… Mais ce n’est rien par rapport à la litanie du matin où aucune autre nouvelle n’a pu passer, ni sur le chômage, ni sur la crise économique, ni sur le bac, ni sur le voyage de Nicolas Sarkozy aux Antilles etc… Rien, rien, rien. Et jamais quoi que ce soit de nouveau : toujours les mêmes commentaires et les tentatives laborieuses de faire dire autre chose à ces pauvres correspondants à L.A. condamnés à répéter bêtement les mêmes choses.
Et même hier soir, aux journaux de 20 heures, ce fut la même antienne. Les journalistes ne savent pas prendre du recul, ils ne savent pas se taire et ne parler qu’après avoir préparé une copie, un reportage, un commentaire, dignes de ces noms…
Mais on note, cependant, une très légère évolution : tous ceux qui se précipitaient jadis (il n’y a pas si longtemps) avec gourmandise sur les écarts, réels ou supposés de la star, de son vivant, y vont enfin de leur petite larme, rappelant que plus tout autre, il a contribué à faire des dons très généreux pour les enfants , pour les déshérités, pour l’Afrique et pour des causes humanitaires… C’est aussi dans ce sens qu’il entendre l’expression de planète michaeljacksonisée.
Tous ceux qui insistaient lourdement sur l’endettement de la star, utilisant même le terme de déconfiture financière alors que rien que ses royalties issues des droits des disques des Beatles rapportent énormément d’argent. Reste, il est vrai, la démesure, l’hybris, le déséquilibre d’un homme, demeuré enfant, mais qui n’eut aucune enfance, aucune adolescence ni jeunesse, aspiré, happé par le succès. Qui est, comme chacun ne le sait pas, une arme à double tranchant.
Pour finir sur ce premier point, la presse devrait être plus humaine en comprenant que ceux qui vivent sous les projecteurs et qui poussent certains à se venger sur eux de leur propre obscurité, ne sont pas nécessairement heureux. Quand leurs larmes coulent -et elles coulent souvent- cela se fait en silence et généralement sans témoin…
Mais au fond, cela paraît normal, cet acharnement médiatique. Quand il s’agit d’un écrivain, d’un savant ou d’un philosophe, à sa mort, on dit qu’il passe par un purgatoire. Il tombe dans le creuset de la critique (je rappelle que le creuset contient du feu et aide à débarrasser le métal précieux de ses scories… vous voyez d’ici ce que cela signifie.)
Le visible et l’invisible : la mort d’une star, ersatz des divinités de notre temps
On se souvient du cri poussé par le Zarathoustra de Nietzsche : D- est mort… Comme nos sociétés ne croient plus en rien, elles suscitent à intervalles réguliers des Ersätze (succédanés, des substituts) auxquels elles transfèrent les mêmes qualités et rendent le même culte, ou presque.
Vous vous réveillez le matin et vous apprenez la nouvelle : un arrêt cardiaque a mené vers l’au-delà celui ou celle que vous adoriez, que vous écoutiez chez vous, dans votre voiture, dans le métro grâce à des oreillettes etc… Sur ces airs devenus familiers (thriller, we are the world, etc…) vous dansiez, vous étiez bien, vous pensiez que ce serait éternel. Et soudain, la mort vous arrache la personne mais vous laisse l’œuvre. Cela a quelque chose d’irréel. D’où la vague d’incompréhension, de tristesse, voire d’incompréhension.
Pour un chanteur, les choses ne se présentent pas de la même manière que pour un écrivain. Les livres nous parlent, certes, mais ils ne vivent pas en nous de la même façon. Michael Jackson est mort et pourtant il chante dans ma radio ou sur mon portable. Il est immobile, d’une rigidité cadavérique et pourtant il se déhanche dans nos clips sur les écrans des télévisions ou de cinémas. Ses lèvres sont figées pour l’éternité et pourtant on le voit et l’entend.
Mais alors qu’est ce que la mort puisque, d’une certaine manière, il continue de vivre sans vivre, il st vivant tout en étant mort. Il fait partie de nos vies alors qu’il a quitté la sienne pour toujours car la mort ne connaît pas de rémission : c’est un jugement sans appel.
Je ne m’explique pas autrement ce désarroi visible et authentique des jeunes du monde entier qui s’apprêtaient à se rendre au concert de Londres… Ma propre nièce est dans ce cas. Ces admirateurs (rices) ont tout prévu sauf une mort brutale. Et je les comprends. Et celle-ci est venue tout réduire à néant. La star immortelle (on ne se représente guère ce que cela signifie : 750. 000. 000 de disques vendus), partie de rien ou presque.
En Occident, contrairement à ce qui se passe en Orient, on ne sait pas gérer la mort, ou plutôt on ne saisit pas très bien ce qui se passe après, dans l’au-delà s’il existe, et la plupart des gens en doute. Ce qui est leur droit le plus absolu.
Michael Jackson était le proche de beaucoup de gens qui ont ressenti sa disparition comme celle d’un membre de leur famille. Immense paradoxe : cet homme enfant, resté seul toute sa vie, avait pourtant des millions et des millions de fans.
Parlant de l’espérance de l’humanité en un Sauveur et en un avenir meilleur, Ernest Renan écrivait à la fin de sa Vie de Jésus (Paris, 1863) : ressusciter, c’est continuer de vivre dans le cœur de ceux qui vous ont aimé…
Là-haut, auprès du Seigneur, Michael Jackson aura sûrement le bonheur éternel d’entendre le Créateur qui l’a dot d’un si grand talent, fredonner ses propres chansons.