Andréi SKAHROV et Helena Bonner
la taupe de l’Histoire sreuse en silence…
Hier soir, j’ai regardé avec un vif intérêt une belle émission sur ARTE, consacrée à l’illustre physicien soviétique dissident Andréi Sakharov. C’était remarquable et d’une très grande richesse. Souvenez vous de ce grand homme, si frêle, si vulnérable mais qui a résisté victorieusement à la tyrannie et à des idéologies inhumaines. Deux phrases m’ont particulièrement frappé, dites par cet éminent physicien, authentique père de la bombe à hydrogène (dont il souhaitait qu’elle ne fût jamais utilisée contre des villes) : il y a un métal plus fort que le métal, un feu plus fort que le feu… Et aussi le travail de la taupe de l’histoire se fait silencieusement, elle creuse, personne le voit, ce qui ne veut pas dire qu’elle n’accomplit pas son effet continuellement !
Et il avait raison puisque le régime soviétique ne lui a pas survécu longtemps.
Particulièrement impressionnante fut sa confrontation avec Gorbatchev qui s’est révélé être un politicien habile, certes méritant, mais tout de même soucieux de maintenir les oripeaux d’un empire rongé de l’intérieur. L’éthique ne pourra, hélas, jamais triompher de la politique, en tout cas pas du vivant de ses représentants.
Cette émission a retenu toute mon attention car elle mettait l’accent sur le caractère visionnaire du physicien, qui fut, je le rappelle, relégué à Gorki durant sept ans, avec, devant sa porte, des gardes du KGB, des gans qui épiaient ses faits et gestes, sans téléphone, sans amis, juste sa femme qui passait avec lui quelques jours chaque semaine. Sakharov a, avant tout le monde, mis la question des droits de l’homme, au centre même de toute activité humaine. Il a souligné le caractère absolu de l’éthique, car, sans cela, on retombe dans la barbarie, comme le fit le régime soviétique avec le Goulag. Il a aussi insisté sur l’universalité de la loi morale ; si un être humain, je dis bien un seul, est martyrisé dans un coin du globe, c’est toute l’humanité qui est menacée dans sa dignité. Quelle programme ! Et surtout dans l’ancienne Union Soviétique où tout le monde mentait à tout le monde.
Il y avait aussi des points faibles : les premiers pas de Sakharov en politique furent, certes, dignes d’éloges mais pas très productifs. Car la politique est un métier pour lequel les natures idéalistes ne sont point faites. Et pourtant, il faut des hommes à la tête de la cité, de l’Etat. Donc, des hommes comme Sakharov ne peuvent que talonner le pouvoir, le critique, mais jamais l’exercer.
Sakharaov a critiqué la présence soviétique en Afghanistan. Il l’a fait courageusement, mais le fut pas suivi. Un vrai politique, un vrai tacticien, eût appris à mieux présenter ses idées à la tribune du parlement. Ce ne fut pas le cas de Sakharov