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L’intelligente et apaisante interviex du président turc Abdullah Gül au journal le Monde, d’hier

L’intelligente et apaisante interviex du président turc Abdullah Gül au journal le Monde, d’hier.

L’interview donnée par l’actuel président turc, Gûl, ancien ministre des affaires étrangères de son pays, tranche avantageusement par rapport à son collègue Erdogan qui occupe le poste de Premier Ministre. En M. Gül on sent le diplomate de grande classe, le digne héritier du subtile art ottoman qui dit les choses avec modération, apaise au lieu d’exciter, établit des passerelles au lieu de couper les ponts, bref un homme qui répare les incommensurables dégâts causés par le Premier Ministre.

Voici quelques exemples spécifiques : à la question posée sur le vote négatif de la Turquie concernant les sanction contre l’Iran, Gül s’est abstenu de dire (comme Erdogan l’a fait) « mon ami Ahmaninedjad» ; il a répondu que les sanctions étaient inefficaces, que les tensions avec l’Iran avaient des conséquences sur les limites frontaliers dont la Turquie et a donné, à cet égard, l’exemple fort instructif, selon lui, de l’Irak. On se souvient que le parlement islamiste turc n’avait pas permis aux forces armées US de traverser son territoire. Il a ajouté que lorsqu’on voit les choses de très près, on porte un autre jugement que celui de gens situés loin du théâtre des opérations.

Le gros de l’interview est consacré à l’action d’Israël la flottille qui entendait forcer le blocus. Là encore, le président turc, bien qu’islamiste, a porté des jugements modérés : certes, il a souhaité (mais non exigé comme Erdogan) qu’Israël «demande pardon», paie des réparations aux familles des victimes, sans jamais formuler la moindre menace. Là aussi, le ton était modéré. A la question du journaliste qui voulait savoir si la rupture des relations diplomatiques était envisageable, le président a répondu laconique, que tout était envisageable. Alors que son bouillonnant collègue avai, lui, menacé, de conséquences irréparables…

Le président turc qui est un homme de culture a rappelé que la Turquie n’a jamais été l’ennemie des juifs, qu’elle avait joué un rôle bienfaisant lors de l’expulsion des Juifs d’Espagne et que même lors de la seconde guerre mondiale (alors que son pays était l’allié des puissances de l’axe et donc, de l’Allemagne nazie) les diplomates turcs avaient enté de sauver des familles juives de l’extermination. J’ai été particulièrement ému par un tel rappel car mon lointain ancêtre Moshé Almosnino de Salonique (1515-1580), grand kabbaliste du XVIe siècle, avait publié, en son temps, un excellent commentaire mystique en Turquie… Sans l’aide et la générosité des autorités turques de l’époque, en l’occurrence le sultan Sélim II il eût été, ainsi que tous les siens, condamné au pain de la tribulation et à l’eau de l’angoisse. En 1565, il prit la tête d’une délégation qui demanda au monarque ottoman la confirmation du droit de cité et d’auto-gouvernement en tant qu’entité spécifique. En 1568, le firman fut pris et dura pendant plusieurs siècles : le président turc a donc dit la vérité.

M. Gül a reconnu s’être rendu en Israël plus d’un dizaine de fois lorsqu’il dirigeait la diplomatie de son pays. Il a même tendu une perche à M. Erdogan dont il ne cite pas le nom en rappelant que Premier Ministre s’est, lui aussi, maintes fois rendu dans l’Etat hébreu. Mais il a aussi rappelé qu’Israël n’a pas réalisé l’importance de l’amitié turque. C’est dit diplomatiquement, mais ce n’est pas très juste : Israël a toujours privilégié le partenariat stratégique avec son allié ottoman, il l’a même aidé dans certains cas mais M. Erdogan a incontestablement commis une erreur en appuyant cette fondation islamiste qui fait plus de politique (rappelez vous son rôle lors de la crise yougoslave…) que d’aide humanitaire.

Enfin, les relations avec l’Europe sont évoquées. Il est question d’une visite officielle du président Sarkozy en Turquie avant la fin de l’année. M. Gül a souligné que l’UE n’a pas encore pris conscience d’elle-même ni du rôle important qu’elle est amenée à jouer. La aussi, le propos est mesuré, le président s’étant rendu compte que la Turquie n’a pas encore atteint le niveau requis par nos état démocratiques où n’existent ni exclusivisme religieux ni soumission de la femme…

En gros, je suis très satisfait par cette interview et partant, je deviens plus optimiste pour la suite. Il faut dire que le président Gül a une vue plus complète, moins restrictive, des forces en présence dans son pays.

Un intellect comme lui n’ignore pas la vive amitié d’un grand turco logue juif, citoyen britannique vivant aux USA, le professeur Bernard Lewis, qui prit la défense de son pays dans l’arène internationale alors que le Turcs devaient faire face à des accusations particulièrement graves … M. Erdogan devrait y penser.

Il n’est pas impossible que l’une de ces forces, parmi les importantes, ait, comme on le dit pudiquement «fait des représentations» en haut lieu et que l’on ait été obligé d’en tenir compte. M. Güll que je félicite pour sa pondération et son intelligence, n’a pas oublié les intenses négociations qui ont abouti ) son élection.

Il connaît aussi, bien qu’ottoman, le vieux proverbe arabe selon lequel, al-kyissa wa-l-fhama yaghlaboun harakat al-harb…

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