Libye, Yemen, Syrie : l’implosion du monde arabe
J’attends avec impatience que les choses se calment pour pouvoir rester fidèle à la vocation première de mon blog, l’histoire des idées, la recherche philosophique et la critique des traditions religieuses. En gros, la diffusion des ingrédients devant servir à l’établissement d’un dialogue des cultures. Apparemment, nous en sommes encore loin.
J’ai presque envie de changer l’intitulé d’une phrase célèbre en l’appliquant à cette crise terrible qui secoue le monde arabe dans ses profondeurs : Quand le monde arabe s’éveillera, tout le reste de l’univers tremblera…
Comme vous, j’ai écouté attentivement et en direct, le discours du Pr Obama. Deux lignes force s’en détachent : grande détermination et excessive prudence. Pourquoi ? Le président US appartient au parti démocrate et se sent enlisé, d’une manière ou d’une autre, dans deux autres pays musulmans, l’Irak et l’Afghanistan. Il ne convient pas d’y ajouter la Libye dirigée par un déséquilibré qui serait prêt à tout entraîner, y compris son propre peuple, dans sa chute. C’est la raison pour laquelle les USA ont massé des moyens considérables aux portes de la Libye mais ont laissé les franco-britanniques monter en première ligne. C’est du reste ce qui va se passer.
Au moment où j’écris, Kaddafi n’a pas respecté sa parole et a permis à ses troupes de pénétrer dans les faubourgs de Benghazi. Cette erreur lui sera fatale, c’est exactement ce qu’a dit B. Obama hier soir, c’est ce qu’ a répété son ambassadrice à l’ONU et c’est que disent S. Sarkozy et David Cameron.
Le joueur de Poker de Tripoli a joué mais il va perdre car dès cet après midi, toutes ses infrastructures offensives vont être détruites, le vide se fera autour de lui et il devra chercher son salut dans la fuite.
Les Occidentaux ont trop attendu : même hier, les cris de joie des insurgés de Benghazi dénotaient une grande naïveté, ce régime a toujours menti sur tout. Souvenez vous des infirmières bulgares et du médecin palestinien, des attentats de Lockerbie et du Boeing d’UTA…
Mais souvenez vous aussi du Tchad et de la bande d’Aouzou que Kaddafi avait annexé de fait… Ayant construit une longue piste de décollage dans la région afin de ravitailler ses troupes, la France l’avait menacé de la bombarder s’il ne se retirait pas. Le colonel-pokerman avait dit à Roland Dumas : jamais vous n’oserez. La France a osé et Kaddafi est parti, s’est retiré.
Je ne me souviens plus du nom de ce philosophe grec qui avait dit qu’aucun homme ne pouvait lutter victorieusement contre sa nature profonde, son caractère intime : le guide libyen est dans ce cas de figure…
A cette différence près que cette fois ci, il a abattu le seul joker qui lui reste. Les escadrilles de la VIe flotte qui observent le pays depuis si longtemps en rongeant leur frein ne vont pas tarder à entrer en action. Et ce sera la fin.
Mais dans l’intervalle, des civils vont mourir à Benghazi : est ce juste ? Est ce éthique ? Non.
J’apprends aussi ce matin qu’au Yémen plus de cinquante personnes qui manifestaient pacifiquement ont été tuées… Des nouvelles tout aussi inquiétantes nous parviennent aussi de Syrie…
Etrange, tous ces pays qui prétendaient être à la pointe d’un combat pour une cause arabe, mais, qui, au passage, opprimaient, voire martyrisaient leurs peuples respectifs.
Il arrive que même les esprits les plus rassis, les plus structurés se demandent si ce n’est pas une intelligence cosmique qui est à la manœuvre dans ces bouleversements et sur laquelle nous n’avons aucune prise…
Je le redis encore une fois : qui aurait pensé que 2011 marquerait la fin des régimes dictatoriaux du Proche Orient… Et cela ne fait que commencer.