De la sortie d’Egypte à la Résurrection…
Comment sommes nous passés d’une célébration consacrée à la sortie d’Egypte à un événement de tout autre nature, la Résurrection de Jésus? Juifs et chrétiens célèbrent, qui la semaine sainte, qui Pessah ; cette fête a débuté lundi soir et durera sept jours, au cours desquels on ne mange que du pain azyme, la matsa. Comme toutes les fêtes religieuses, cette célébration trouve son origine dans la ronde des saisons, en l’occurrence, le printemps. A l’origine, il y avait deux célébrations, très proches l’une de l’autre, et qui finirent par fusionner : celle du pain azyme et celle de l’agneau pascal. Bergers et cultivateurs se réunissait pour un grand repas au cours duquel on immolaiait un agneau ; cette réunion fusionna ensuite avec la fête du pain azyme qui marque l’Exode d’Egypte lequel constitue le premier événement national des hébreux en tant que peuple.
L’Exode relété par la Bible hébraïque, et la Résurrection de Jésus, lue dans les Evangiles, sont des événements majeurs de l’Histoire sainte. de «mythes fondateurs» qui gisent au fondement même de la foi.
Alors que la fête de Pâque renvoie à un épisode biblique unique, sa commémoration diverge profondément selon qu’il s’agit de la tradition juive ou de la tradition chrétienne. Chacune voit dans cette célébration pascale un épisode crucial de son vécu religieux..
Le nom de la fête de Pessah, la Pâque juive, provient, selon l’étymologie biblique d’une verbe signifiant passer, enjamber. Ce serait donc un rituel de passage d’un état à un autre, de l’esclavage à la liberté, en l’occurrence.
Après la Passion, l’Eglise primitive revisita son histoire dans laquelle elle projeta son vécu religieux immédiat. L’Eglise, encore juive, pouvait puiser dans son nouveau terreau un autre événement, tout aussi important aux yeux du judaïsme ancien, la Résurrection. Vu la proximité de Pessah et la terrible déception qui s’était abattue sur les Apôtres, la fête prenait une autre dimension et devenait celle de la Résurrection et Jésus, l’agneau pascal, l’objet même du sacrifice.
Un passage très expressif du prophète Osée (6 ;2) contient tous les ingrédients de la Résurrection, telle qu’elle se lit dans les Evangiles: «Il nous fera revivre après deux jours ; au troisième jour il nous ressuscitera et nous revivrons devant lui…» Comme la communauté de Jérusalem baignait dans un environnement exclusivement juif et que des hommes tels que Jacques étaient de fins lettrés, est-il concevable que ces juifs aient ignoré un tel verset prophétique ? Or ce verset commence par évoquer les blessures subies et que Dieu vient justement guérir…
Dans le sillage de Philon d’Alexandrie, l’exégèse patristique est allée dans la même direction en allégorisant la prescription majeure de la fête pascale : la consommation de pain azyme qu’elle interprète comme une exhortation à la modestie et à l’humilité alors que le pain levé, couramment consommé, évoque un cœur humain gonflé d’orgueil. Quant à l’Egypte ancienne prétendument esclavagiste, Philon d’Alexandrie n’y voit que l’allégorie d’un espace dénué de spiritualité et d’amour du prochain. Ne devrait-on pas s’inspirer d’un si haut exemple ?