IL NE FAUT PAS DEPENALISER LE CANNABIS…
Passant en revue la presse de la semaine que je lis ou relis durant le week end, mon regard s’arrête sur l’excellente tribune publiée par M. Claude GUEANT dans Le Monde en date du jeudi 16 juin (p. 22). Rompant avec le discours assez ambiguë des uns et des autres, tournant le dos aux non-dits savamment distillés pour entretenir le flou sur leurs intentions profondes, comme le font certains hommes politiques soucieux de ne jamais prendre l’opinion (et donc leurs électeurs potentiels) à rebrousse-poil, le ministre français de l’Intérieur dit ce qu’il pense et affiche clairement ses convictions : il ne faut pas céder à la facilité, il ne faut pas, écrit-il, cesser le combat, au motif qu’il est difficile à mener. C’est une évidence, et pourtant quand on lit certaines tribunes ou quand on écoute certains discours, on croit rêver : le trafic de drogues est si difficile à arrêter ou simplement à endiguer qu’il vaut mieux baisser la garde, rentrer sagement chez soi et livrer la rue, la route, les quartiers, les villes entières, au trafiquants qui n’hésitent plus, comme à Sevran en Seine Saint-Denis, à défendre leur territoire une kalachnikov à la main…
J’ai récemment entendu un policier dire qu’un trafiquant qui circulait en voiture à vive allure a brandi, par la portière ouverte, une arme de guerre pour en menacer un automobiliste qui avait osé le klaxonner… Mais où sommes nous ? La Seine Saint-Denis n’est qu’à 12 ou 15 km de Notre-Dame et Claude GUEANT comprend bien que l’Etat n’a pas le droit de laisser sans protection des centaines de milliers de nos concitoyens qui ne peuvent pas se longer dans les beaux arrondissements de la capitale ou de nos provinces… Lors de la campagne électorale, le chef de l’Etat a bien dit qu’il ne tolérerait pas la moindre zone de non-droit.
Il y aurait beaucoup à dire sur la faiblesse intellectuelle des arguments mis en avant par les partisans de la dépénalisation du cannabis. Ils font le départ entre drogue douce et drogue dangereuse, ignorant que tout processus, une fois lancé, finit toujours par s’accélérer. Du cannabis, qui est loin d’être inoffensif, on passerait (et surtout les jeunes qui sont perdus dans un monde en quête de valeurs, de sens ou de simples repères) à de l’héroïne, etc… Faisons confiance aux dealers et aux trafiquants en tous genres qui sauront franchir le pas et mettre sur le marché des drogues beaucoup plus dangereuses, créant une dépendance toujours plus grande, une véritable addiction contre laquelle il sera bien plus difficile de lutter.
Claude GUEANT a raison de souligner que la lutte contre un tel fléau sera longue et plus en complexe dans une société de plus en plus sophistiquée où l’information circule en quelques secondes d’un bout à l’autre de la planète. Enfin, il souligne aussi que cette lutte a de multiples facettes et requiert un traitement à la fois médical et social.
Mais pourquoi donc certains de nos concitoyens, en France, en Europe ou dans le reste du monde, éprouvent-ils le besoin irrépressible de se droguer ? J’ai fait de très longues études, j’ai fourni de très gros efforts pour devenir ce que je suis, j’ai, comme tout un chacun, eu à affronter mon lot d’épreuves, plus ou moins difficiles, je n’ai jamais éprouvé le besoin de consommer la moindre drogue que ce fût… Alors, pourquoi ? Je trouve que le volet psychologique et social de ce fléau moderne doit être analysé de plus près.
Dans la campagne contre ce laxisme dangereux qui se dissimule derrière les plaidoyers en faveur de la dépénalisation du cannabis, on tombe parfois sur des comparaisons qui nous laissent sans voix : l’alcool et le tabac, nous dit-on, seraient plus dévastateurs, plus meurtriers, que des drogues aussi peu nocives que le cannabis ! Cet argument est loin d’être irréfragable, il est même parfaitement spécieux : comme tant de Français, je bois un verre de vin deux fois par semaine et fume un bon cigare une fois par mois ou par deux mois… Il n’y a ici aucun phénomène de dépendance ni d’addiction, comparable à ce qui se produit avec les drogues. Les médecins qui font de telles comparaisons devraient faire preuve de plus de circonspection. Dans la plupart des pays, jadis tolérants à l’égard de ces drogues dites douces et ayant progressé vers la dépénalisation, on constate un changement de politique, provoqué par les dégâts causés à la santé des gens, et notamment les jeunes.
Ceux qui me lisent régulièrement dans même Tribune de Genève savent que je ne me range pas à l’avis du plus grand nombre ni ne choisis jamais la voie de la facilité. Cependant, une chose m’inquiète : dans une société de plus en plus dure où les jeunes rencontrent de sérieuses difficultés à se faire une place, même avec de bons diplômes, les «paradis artificiels» ont hélas encore de beaux jours devant eux.
Mais le succès a toujours été le salaire de la persévérance et du courage. Et je puis vous dire que Claude GUEANT, en grand serviteur de l’Etat qu’il est depuis toujours, sait en faire preuve.