La libération des otages francais en Afghanistan
Disons le d’emblée : en prononçant une brève allocution hier après-midi au Palais Bourbon le Premier Ministre ne pouvait manquer de savourer un plaisir : le lendemain, il partira en voyage officiel en Asie, avec la conscience du devoir accompli. Nos deux compatriotes journalistes retenus en Afghanistan depuis exactement 18 mois sont enfin tirés des griffes de leurs geôliers. Et ce ne fut pas chose facile tant les interlocuteurs, les groupes et les revendications changeaient ou faisaient l’objet de surenchères…
Même si ce n’est pas encore le moment de s’interroger sur les conditions de cette libération, on peut cependant tirer quelques enseignements pour l‘avenir. Et, à mes yeux, le tout premier est le suivant : même si le droit à l’information est sacré, il ne saurait justifier que certains se mettent en danger pour recueillir sur place les nouvelles tant attendues. Cette affaire a mobilisé notre diplomatie, nos services spéciaux et a coûté cher à la nation. Sans oublier, ce qui compte le plus à nos yeux, l’angoisse des familles et la profonde préoccupation du gouvernement. Claude Guéant et le chef d’Etat-Major des armées n’ont pas eu tort de souligner ce que cette affaire a coûté à la France en millions d’Euros… Mais il y a aussi les menaces d’exécution si le gouvernement ne se retirait pas de la coalition qui opère en Afghanistan…
L’autre enseignement touche les autres compatriotes retenus ailleurs et notamment dans le désert subsaharien par AQMI. Il n’est pas déraisonnable de penser que la neutralisation de Ben Laden, le contrecoup des révolutions arabes, les projets de retrait partiel des troupes américaines et françaises et, dernier mais non moindre, les débuts de pourparlers avec les Talibans modérés, ont pesé de manière positive sur la conduite des négociations qui furent menées, si j’élucide bien les paroles énigmatiques d’Alain Juppé, plus par des agents secrets que par des diplomates de la vieille école.
Comme je le rappelais plus haut, le Premier Ministre a lancé un appel aux autres ravisseurs leur conseillant d’emprunter la même voie que le printemps arabe et de tourner le dos une fois pour toutes au terrorisme et aux enlèvements. Il a bien fait. Il me semble, cependant, qu’il aurait dû inclure explicitement dans cet appel le jeune franco-israélien Gilad Schalit. Il y a sûrement pensé, et peut-être que sa discrétion sur ce point précis lui a semblé plus «payante» qu’une mention claire.
Quoi qu’il en soit, la France est en fête et se prépare à accueillir ses otages. C’est arrivé si soudainement que je n’ay ai pas cru hier. Ceux qui récitent leurs prières tous les matins que D- fait, connaissent sûrement cette oraison par laquelle nous remercions l’Eternel de «libérer les entravés» (mattir assourim). Mais surtout, l’autre expression qui dit que le sauvetage divin est aussi soudain qu’un clin d’œil… Oui, mais ils ont tout de même attendu dix-huit mois !