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Hellénisme et germanisme : Athènes et Berlin

Hellénisme et germanisme : Athènes et Berlin

Les derniers événements survenus à Athènes montrent que l’abîme grec est insondable, que la logique européenne ne fonctionne plus vraiment dans ce pays qui fut pourtant, durant l’Antiquité, le berceau de notre civilisation, même si ce dernier terme se voit affublé de sous entendus inquiétants, voire infondés, depuis quelques jours.

J’ai été choqué par l’apparition de quelques images et slogans, représentant la chancelière fédérale en uniforme nazi. C’est une insulte à la moralité de cette fille de pasteur qui a toujours été inspirée dans son action politique par de grands principes éthiques. Dans son pays, elle a toujours combattu avec une grande rigueur toutes les résurgences de l’idéologie national-socialiste. Alors pourquoi recourir à de telles assimilations, aussi injustes qu’infondées ?

Il est difficile d’apporter une réponse unique à cette question mais on peut dire, sans crainte de se tromper, que la Grèce contemporaine n’est pas vraiment celle de Socrate, Platon et Aristote, tous philosophes amis de la vérité et formés à la stricte morale stoïcienne. Ce ne sont plus des principes qui guident les hommes politiques grecs, de droite comme de gauche, depuis longtemps.

Certes, le gouvernement allemand, suivi et parfois même précédé par une presse très remontée contre Athènes, développe à longueur de colonnes, des thèmes qui pourraient être perçus comme l’expression d’une arrogance ou d’une supériorité germanique. Hier encore, on pouvait lire un slogan porté par des manifestants à Athènes, Merkel, raus ! Ce n’est pas convenable et les Grecs intelligents le savent bien : leur pays n’est plus administré depuis longtemps, ses recettes fiscales sont devenues pratiquement inexistantes, la plupart des armateurs s‘ingénient à ne jamais payer le moindre euro d’impôt chez eux…

L’homme de la rue vit des moments difficiles auxquels des êtres compatissants ne peuvent rester insensibles mais il doit comprendre que l’Europe n’est que le thermomètre et non point l’agent infectieux responsable de la fièvre. Les Allemands ont raison de refuser de continuer à payer pour tous les autres. Et l’on peut comprendre que le ministre allemand des finances, M. W. Schäuble, ait distribué à Lisbonne blâmes et satisfécits : les premiers à la Grèce et les seconds au Portugal… Et cela n’a fait que nourrir les oppositions et fortifier les noires arrière-pensées injustement prêtées aux Allemands.

Au risque de ma répéter je le redis : qu’aurions nous fait sans l’Allemagne dans cette bataille pour sauver l’Euro ? Il ne sert à rien de dire aujourd’hui que les pays du club Méditerranée (comme le dit imprudemment Angela Merkel) ont leur place en Europe mais pas dans la zone Euro. C’est d’ailleurs ce qui finira par se produire. Les Allemands, à force de rigueur et d’endurance, ont intégré tout un pays, la RDA, et il faudrait presque autant de milliards pour sauver la Grèce. Et qui va payer ? les Grecs ?

Ce que je redoute, c’est une scission entre l’Europe du nord, composée de très bons élèves et une Europe du sud, vivotant pour ne pas dire végétant à l’ombre des grands, dont la France risque de ne plus faire vraiment partie. On l’a vu récemment lors de réunions de pays disposant encore du triple A, la France n’étant pas conviée.

Un point d’optimisme de la part du philosophe, pour ne pas finir sur un note de découragement car quand on a des convictions, on sait se mobiliser pour les défendre : nos vieux maîtres nous ont enseigné en Sorbonne que la philosophie est aux deux tiers grecque et allemande pour le dernier tiers. Même Heidegger serait impensable sans l’héritage hellénique. Un éminent collègue a même écrit que toute la philosophie occidentale n’est qu’une note infra-paginale à l’œuvre de Platon…

Il est vrai que dans contexte on avait affaire à de grands maîtres guidés par l’amour du vrai et la recherche de la sagesse.

Feuilletez donc un dialogue platonicien de votre choix, n’importe lequel, on est loin des arrangements politiques à courte vue.

Mais si elle le veut, la Grèce contemporaine peut s’inspirer d’un si haut exemple et cesser de s’en prendre aux Allemands qui tentent de sauver ce qui nous reste d’Europe…

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