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Les premières leçons d’un scrutin…

Les premières leçons d’un scrutin…

Ce fut une attente presque insupportable, mais les résultats ont fini par arriver ; les estimations placent François Hollande en tête, suivi de très près par le président Nicolas Sarkozy. Contrairement à ce que disent les commentateurs, cette légère avance, qui révèle, une fois de plus, les attentes et les inquiétudes des Français, n’est pas déterminante. Et ceux qui disent que les jeux sont loin d’être faits, sont certainement plus dans le vrai que ceux aux yeux desquels le vote du 6 mai est d’ores et déjà acquis.

Un fait étrange, apparemment secondaire, s’est immiscé dans la marge de cette campagne et a fini par faire éclater au grand jour toute son importance. Le débat se jouait, certes, entre les deux favoris, le président sortant et le candidat de gauche, mais, en réalité, l’issue du second tour se jouait non pas au premier mais au second rang, entre leurs concurrents plus éloignés, le Front national et le front de gauche. Or, le sort de François Hollande est intimement lié à celui de allié naturel.

Si Jean-Luc Mélenchon avait fait le score qu’il espérait, il aurait rempli la mission qui lui avait été implicitement assignée : prendre en tenaille Nicolas Sarkozy, entre François Hollande, d’un côté, et lui-même, de l’autre. Cette stratégie a échoué de façon sévère puisque c’est le contraire qui s’est produit : Marine Le Pen, suit Nicolas Sarkozy puisqu’elle jouxte les 20%, atteignant dès son coup d’essai, un score jamais égalé par son père, pourtant fondateur du parti…

Sans un score élevé du Front de gauche, M. Hollande n’est plus assuré de remporter une victoire facile pour la simple raison que le total des voix de droite est bien supérieur à celui de la gauche. Qu’elle le veuille ou non, une bonne partie des voix de Marine Le Pen se reporteront sur Nicolas Sarkozy et rares seront ceux qui s’abstiendront ou voteront pour un candidat socialiste qu’ils veulent faire battre. Quel que soit leur ressentiment à l’égard de la politique menée durant ces cinq dernières années, très rares seront ceux qui apporteront leurs suffrages à la gauche. Si je ne trompe pas dans mes calculs, la gauche totaliserait, au vu des résultats actuels, guère plus de 45%. Et les points manquants sont immanquablement ceux qui ont fait défaut à M. Mélenchon lequel est passé de 15-16% à 10%…

Un mot du report des voix qui est un processus toujours aléatoire : M. Bayrou a fait savoir par son adjoint Philippe Douste-Blazy que son mentor attendra de suivre les débats entre les deux finalistes pour dire de quel côté il se rangera. Il ne faut par être un grand prophète pour prévoir que Nicolas Sarkozy finira par donner des gages à son ancien collègue du gouvernement Chirac…

J’ai écoute Jean-Luc Mélenchon parler tout à l’heure, en commentant ses propres résultats décevants. Mettons nous à la place de celui qui se crut un invincible tribun rameutant les foules, ivre de puissance virtuelle et qui se retrouve avec un score inférieur de moitié à celui qu’il escomptait. Pire encore : voir passer devant lui celle qu’il entendait marginaliser…

Certes, après des circonvolutions, il a appelé à faire battre Nicolas Sarkozy, mais à aucun moment de son allocution, il n’a cité le nom du candidat socialiste. Il a même invité la classe des travailleurs à venir manifester énergiquement le 1er mai et est resté dans le vague, concernant un soutien fort et déterminé au candidat socialiste… Or, nul n’a oublié les mauvaises manières que se sont faites les deux ou trois candidats de gauche.

Si l’on fait le total des suffrages de droite, sans tenir compte de l’aléatoire report de voix, la droite est en nettement meilleure position. Les électeurs du Front National, voyant que leur candidat ne franchit pas la barrière du premier tour, seront libres de s’engager en faveur du candidat restant de la droite, surtout si ce dernier promet de répondre à leurs attentes (chômage, immigration, insécurité, ordre, retraites…)

Enfin, la campagne qui s’annonce n’a rien à voir avec la précédente où 9 candidats sur 10 ne s’entendaient que sur un point : clouer le dixième, Nicolas Sarkozy, au pilori… En cinq années de pouvoir, on commet nécessairement des erreurs car on est contraint d’agir. Tout en respectant les idées de chacun, on doit bien reconnaitre que les crises subies par l’Europe et la France étaient sans précédent. Et que Nicolas Sarkozy leur a fait face.

Restent les débats qui opposeront les deux finalistes. Ils serviront de révélateur et surtout ils prouveront que Nicolas Sarkozy ne mérite pas ce surcroît d’indignité ni cet excès d’ostracisme dont on l’accable.

La France a besoin de sérénité dans ses choix pour les cinq prochaines années.

Maurice-Ruben HAYOUN in

Tribune de Genève du 23 avril 2012

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