La Tunisie, que va t il se passer ?
Au fond, les extrémistes islamistes portent en eux même leurs propres gênes autodestructeurs, un peu comme le ver est dans le fruit : quand ils prennent le pouvoir, il se trouve toujours quelqu’un parmi eux pour crier casse cou lorsqu’il est effleuré par une toute petite lueur de lucidité… C’est exactement ce qui vient de se passer en Tunisie, cet ancien charmant petit pays où les Européens aux revenus modestes étaient assurés d’en avoir pour leur argent et d’être bien accueillis par ceux qui furent les descendants des Carthaginois..
Que s’est-il passé ? Arrivés au pouvoir grâce au ras le bol d’une population asservie, armés uniquement de leur idéologie islamiste et de leur foi en le Seigneur (ce qui, hélas, ne se mange pas dans une assiette ni ne met de beurre dans les épinards), ils se sont mis à faire des additions joyeuses, des discours interminables, confondant allégrement la parole et l’action, ce qui les a mis dans la situation économique catastrophique actuelle, ce dont personne ne saurait se réjouir puisque la Tunisie classique et éternelle n’a que des amis.
Mais les islamistes n’ont pas compris comment on dirige un pays, sauf le premier ministre démissionnaire qui, étant aux commandes et voyant que le pays ne fonctionnait pas normalement, a proposé de prendre le taureau par les cornes. Cet homme qui avait croupi dans les geôles du président Ben Ali pendant seize ans a fini par comprendre que le pays n’était pas sur la bonne voie. Il a proposé de se priver du pouvoir temporairement et de nommer des technocrates apolitiques.
Même si l’on ne sait pas ce que recouvre une telle expression, on ne peut méconnaître la nature de ce geste de bonne volonté. Et voilà le ver dans le fruit : le président de son propre parti al Nahda, refuse de se laisser déposséder du pouvoir et a presque contraint le Premier Ministre, issu de ses rangs, à la démission. C’est ainsi qu’on arrive à une situation ubuesque : le président du parti qui s’aheurte à son propre numéro 2 !
Que va-t-il se passer ? C’est une crise politique profonde que va traverser le pays si l’actuel parti au pouvoir (al hazb al hakem) ne comprend pas et ne tire pas les leçons qui conviennent. Pourtant, certains faits s’imposent d’eux-mêmes : plus de tourisme, très peu d’exportations, plus d’investissements étrangers et un peuple désabusé. Et ce ne sont pas les rodomontades sur le plan de la politique étrangère (cf le Proche Orient) qui vont maintenir le moral des citoyens au beau fixe. Ni des attaques déplacées contre la France.
Pour bien gouverner un pays, il faut une bonne économie, pas une idéologie, même si les deux vocables riment ensemble.
Maurice-Ruben HAYOUN
In Tribune de Genève de ce 21 février 2013