L’Egypte de Mohammed Morsi au bord du gouffre… Les choses se déroulent comme on l’avait prévu. L’Egypte de M. Morsi, un an après les élections présidentielles, est au bord du gouffre et même à feu et à sang, si l’on tient compte de l’incendie du siège des Frères musulmans au Caire. Des millions d’Egyptiens, je dis bien des millions, ont clamé hier leur rejet de l’extrémisme religieux et de l’intolérance. Le peuple d’Egypte est tolérant dans son essence, habitué à la diversité et à l’ouverture sur le vaste monde du bon Dieu. Il sait qu’il compte dans son sein une importante minorité copte, l’une des plus anciennes composantes du christianisme primitif. Et qui sont d’aussi bon patriotes que leurs concitoyens musulmans. Or, du tempe du président Hosni Moubarak, il n’y eut jamais autant de persécution sanglantes anti-chrétiennes. Aujourd’hui rien ne va plus et l’Egypte est ruinée, sans les subsides des monarchies du Golfe et celles des USA, elle ne pourrait plus survivre. L’élection de M. Morsi fut donc un gigantesque malentendu. L’armée a joué le jeu, mais elle demeure l’unique maîtresse du jeu et il n’est pas très éloigné le jour où le ministre de la défense, une jeune et dynamique général, fera irruption dans le bureau présidentiel, flanqué d’autres généraux, pour dire à l’occupant du palais que l’entrecôte est fini et qu’il faut partir : the game is over L’armée qui est le seul corps organisé du pays depuis le coup d’Etat du général Naguib, supplanté par Nasser et ses amis, a toujours dirigé le pays. Et hier, elle a survolé les manifestations montres en déployant des bannières un peu ambiguës : l’armée est avec le peuple. Mais quel peuple ? Celui des Frères musulmans ou celui des opposants ? L’enjeu est à la fois simple et clair : que le peuple, que des millions de personnes disent demain ou après demain, nous voulons la loi et l’ordre et l’armée égyptienne reprendra le pouvoir en douceur. C’est exactement cela qui se passera. Pour ne pas froisser le puissant allié américain qui l’équipe et la nourrit à coup de millions de dollars, l’armée d’Egypte attendra que le régime islamiste tombe comme un fruit mûr et que son retour au pouvoir soit considéré comme un retour providentiel, sans avoir à s’imposer par la force des baïonnettes . L’armée est l’un des plus aguerries du monde arabe. Epuisée par tant de campagnes perdues face à Israël, elle a appris la politique et a compris, plus vite et plus profondément que les autres armées arabes que le jeu diplomatique était plus risqué et plus payant que le reste. Elle a compris qu’elle ne pouvait pas compter sur grand’ chose de la part des Arabes et que seuls les USA étaient pour elle un allié sûr. M. Morsi aura été un parenthèse riche d’enseignements. De ce qu’il ne faut pas faire. Souhaitons à l’Egypte de ressortir raffermie de cette crise. Et après tout, on peut confier à M. Morsi l’inauguration des chrysanthèmes mais plus la réalité du pouvoir.