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Les lumières de l'espoir…

Hanoukka ou les lumières de l’espoir…

 

Dès ce soir, 16 décembre, à la tombée de la nuit ou au coucher du soleil, les juifs qui respectent la tradition ancestrale (mais aussi tous ceux qui le souhaitent) allument la première bougie de la fête de hanoukka qui dure huit jours. Certes, il y a une histoire officielle qui explique de manière apologétique ce geste religieux mais aussi profondément humaniste. Au cœur de la nuit, des ténèbres de l’hiver, où rien ne pousse où tout hiberne, une huitaine de petites bougies scintillent dans la hanoukkiya, sorte de bougeoir que toute famille juive possède chez soi en plusieurs exemplaires, ce qui permet à tous ses membres de s’acquitter de leur devoir religieux. A quand remonte ce rite purement humaniste qui a permis de sauver le monothéisme sous toutes ses formes (paroles d’André Néher) à un moment où il était gravement menacé par le paganisme de la soldatesque grecque ? Sous Antiochus Epiphane IV, vers 165 avant notre ère, ce roitelet se risqua à une hellénisation forcée de la Judée, provoquant la révolte des Maccabées et des judéens attachés à leur tradition ancestrale. Pour bien marquer son autorité, ce monarque détruisit les murailles de Jérusalem et en profana le temple en y introduisant le culte idolâtre. La riposte fut foudroyante : sous la conduite des Macchabées et de Matthias ben Yohanan (Matthieu fils de Jean), la Judée se déchaîna contre l’agresseur qui s’imaginait pouvoir la séparer de son Dieu et du monothéisme en général

Hanoukka ou les lumières de l’espoir…

 

. Lors de la reconquête, il fallut nettoyer le temple des souillures qui l’avaient rendu impur. Dans ce même temple brûlaient, en temps normal, des lampes à huile. Mais les païens avaient tout compromis et c’est à grand peine que l’on découvrit une unique fiole d’huile qui ne devait durer que 24 heures. Et miracle ! La fiole a tenu huit jours, ces mêmes huit jours que les juifs commémorent durant cette fête de hanoukka. Ce terme hébraïque, qui est attesté dans le corpus biblique, notamment dans les Psaumes, signifie inauguration ; et le verset en question porte la mention hanoukkat ha-bayit, l’inauguration du Temple (de Jérusalem). C’est donc une nouvelle inauguration d’un Temple lavé des souillures païennes qui est commémorée. Il s’agit donc, simplement, d’une façon de pendre la crémaillère, la remise en état du temple de Jérusalem, débarrassé de l’abomination du culte idolâtre. D’où la pertinente remarque du professeur André Neher : le monothéisme éthique réaffirme ses droits face à un paganisme qui se croyait triomphant. Durant les huit jours de cette fête, les juifs religieux insèrent dans les dix huit bénédictions (prière statutaire tri quotidienne) tout un couplet qui commence par ces termes : A l’époque de Mattathias ben Yohanan, le grand pontife, du temps des Maccabées et de ses fils, au moment où le royaume grec impie chercha à leur faire oublier la Tora de Dieu et à les éloigner des commandements et préceptes divins… O Dieu, tu t’es tenu à leurs côtés du temps de leur détresse : tu a épousé leur combat, tu leur as rendu justice, tu les as vengés, tu as livré les forts entre les mains des faibles, les gros bataillons entre les mains des peu nombreux, les impies entre les mains des vertueux. En ce jour là, tu t’es fait un grand Nom… La tradition rabbinique a institué cette fête qui n’est donc pas d’origine biblique (comme d’ailleurs la fête de Pourim), mais qui n’en reste pas moins une joyeuse commémoration familiale. Essayons d’aller au delà du cadre de l’histoire religieuse et voyons, d’un point de vue purement humain, ce que représente cette fête, ce qu’est sa symbolique : cette fête tombe toujours au cours du mois de décembre, il fait froid et sombre. C’est comme quelqu’un qui se sent au bout du tunnel. Il quitte l’oppressante obscurité pour faire jaillir enfin la lumière et la vie. On est généralement un peu triste en raison du ciel bas et du peu de luminosité solaire. Les bougies de hanoukka nous rapprochent de la lumière, de la chaleur et de la joie. C’est aussi une façon de rappeler que l’hiver ne dure qu’un temps et qu’après l’oppression et l’obscurité ( la tyrannie et la honte du paganisme avec son culte orgiaque et ses abominations) arrivent la liberté et la joie des lumières. On fait rarement le rapprochement suivant : à Lyon il y a la fameuse des Lumières, pratiquement au même moment de l’année. Ne pouvons nous pas imaginer une sorte de reprise, d’acclimatation d’un rite dans un autre rite ? Je rappelle que la mise en ordre des Evangiles s’est faite par un certain Saint Irénée de… Lyon. C’est toute la question inextricable des racines juives de l’église. Hermann Cohen, le fondateur de l’école néo-kantienne de Marbourg a parlé de Kippour comme de la fête de l’humanité messianique, tandis que Hanoukka est la fête de l’humanité monothéiste, celle qui a découvert le monothéisme éthique, une divinité unique et qui se use de bienveillance envers ses créatures. C’est là le côté universel de cette fête : la vie prend le pas sur la mort, la lumière sur l’obscurité, la promesse du printemps alors qu’on est au cœur de l’hiver… C’est aussi l’espoir que les forces du bien finiront par l’emporter sur celles du mal. L’église primitive ne s’est pas séparée sans peine de cette belle fête qui incarne les espoirs de tout ce qui porte sur le visage les traits de l’humain. Certains vont jusqu’à y trouver les origines de la proximité temporelle avec Noël. Il y eut des infiltrations réciproques : ce sapin auréolé de lumières scintillantes, tout en étant un héritage des tribus nordiques christianisées, n’est pas sans évoquer les bougies de la hanoukkiya… C’est aussi un arbre, le sapin, qui est toujours verdoyant. D’un autre côté, il y a les cadeaux de Noël qui ont commencé à devenir une pratique même chez les juifs. Il faut toutefois rappeler que l’on avait coutume de donner des gâteaux ou des cadeaux, voire de l’argent aux enfants, durant cette fête.. Voici un excellent exemple de l’interpénétration des deux cultes issus d’un même tronc. Maurice-Ruben HAYOUN

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