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Le cas Mahmoud Abbas

Il y a de cela quelques semaines, mais guère plus, j’attirais l’attention sur le danger qu’il y avait à isoler toujours un peu plus l’actuel président palestinien. Apparemment, tant les Israéliens que les Américains, ainsi que plusieurs pays du Golfe arabo-persique ont persisté dans cette voie. Et nous récoltons les résultats que chacun connaît : un durcissement de la situation économique dans la bande de Gaza, une détérioration de la situation humanitaire, etc…

Comme toujours en Orient, les choses les plus simples pour nous sont sur place bien plus complexes. Résumons donc la situation :

Depuis plus de dix ans, le Hamas a pris le pouvoir dans la bande de Gaza les armes à la main. Au début, la situation n’était pas encore alarmante puisque les tunnels de contrebande fonctionnaient à plein, que Téhéran distribuait généreusement des prébendes et que le Qatar renflouait les caisses du Hamas sans compter. Mais la situation a changé et Mahmoud Abbas a compris que s’il voulait parler au nom de tout le peuple palestiniens, il fallait reprendre toute la bande de Gaza et de ses deux millions d’habitants… Alors, sous la pression de l’Egypte voisine, les négociations ont repris entre Ramallah et Gaza avec les résultats que l’on sait : un pas en avant et trois pas en arriière, un peu comme le drapier des lanciers du Moyen Âge.

Comme la confiance ne règne pas entre les frères ennemis, aucun des deux ne voulait céder sur un point crucial, voire vital : le désarmement du Hamas et la remise des clés du camion à Mahmoud Abbas. Il faut bien comprendre l’enjeu : comme la démocratie ne règne pas vraiment dans cette région du monde, si vous vous faites désarmer, nul ne sait ce qui pourrait vous arriver par la suite : n’oublions pas que nombre de militants et de partisans du Fatah ont été maltraités, voire simplement neutralisés par le Hamas et que les familles des victimes et des disparus vont demander des comptes aux bourreaux d’hier… D’où la volonté du Hamas de ne pas céder sur ce point car il y va de sa survie, non plus en tant que parti mais simplement de rester en vie !

Ayant compris qu’il n’avait aucune chance de parler d’une voix forte avec Israël tant que sa souveraineté sur Gaza ne serait pas acquise, Abbas a décidé d’étrangler financièrement et économiquement la bande côtière : il ne verse plus les salaires des fonctionnaires, bloque l’entrée de denrées de base et de médicaments dans le but proclamé de faire tomber le régime du Hamas lequel doit gérer la crise humanitaire qui se profile à l’horizon. Impuissant et ne disposant plus des leviers de commande, il choisit la fuite en avant et mobilise la vague de mécontentement en incitant depuis le mois de mars les gens à tenter de forcer la barrière de sécurité entre les deux territoires. Et c’est ainsi que des champs entiers sont brûlés en Israël par des cerfs volants incandescents ou chargés d’explosifs.

Israël qui cherche l’apaisement, se trouve malgré lui empêtré dans des luttes intestines palestiniennes. Mahmoud Abbas a tout fait pour faire capoter la médiation enclenchée par l’gyptec car il a bien compris que l’on tentait de le marginaliser et pour finir, de le mettre entièrement hors jeu. Car si Israël rétablissait le calme avec le Hamas, sur une période de cinq, dix ou quinze ans, Abbas aurait largement le temps de passer à l’éternité sans que la cause de son parti ne triomphe. Partant, il freine des quatre fers, ce qui compromet toujours plus la situation des Gazaouis qui n’ont plus d’électricité ni de carburant pour se chauffer ou pour circuler en voiture.

Pour faire court : depuis quelques jours, le Qatar a directement viré d’importantes sommes d’argent à Israël qui va livrer du carburant pour faire fonctionner la centrale électrique de Gaza, soulager la peine des habitants et contourner entièrement Mahmoud Abbas. Et ce, avec l’accord de l’ONU et des USA. Pour le leader palestinien, c’est un échec cuisant et retentissant.

Certes, on objectera qu’Israël aide objectivement son ennemi juré, le Hamas, qui appelle à sa destruction. Mais voilà, au Proche Orient, les alliances se font et se défont, la logique n’est pas la même que celle d’Aristote qui nous a enseigné deux principe différents : celui de l’identité et celui de la contradiction. Le dernier exemple en date : le Turc Erdogan brocarde Israël en public, l’accuse de tous les péchés, et parallèlement renoue les relations diplomatiques avec l’Etat juif car il est brouillé avec la moitié de la terre : Trump, Merkel, Paris, Moscou, Téhéran, et le tout sous des dehors respectables.

Alors que va t il se passer avec Abbas ? Aucune volte face n’est à exclure de la part du leader palestinien ou de son entourage immédiat : chacun sait que le leader, âgé de 83 ans, est souffrant et qu’l ne pourra pas imposer sa ligne éternellement. Surtout qu’il s’est mis à dos les USA et a injurié publiquement tant l’ambassadeur US à Jérusalem que le président Trump… L’homme est donc dans une impasse. Et il n’a pas l’air de s’en rendre compte.

Lors de sa dernière visite à Paris, il n’a récolté que des sourires et de bonnes paroles. Le président français a simplement promis qu’une initiative européenne serait lancée… Mais quand et comment ?

Il est encourageant que le Qatar ait pris cette initiative de contourner Mahmoud Abbas qui pratique la politique de la terre brûlée. Mais on peut comprendre la logique qui guide son action. Tout simplement, il faut toujours se conformer au principe de réalité, si cher aux Allemands (das Realitätsprinzip). Si on lui tourne délibérément le dos, on est perdu.
Il est vrai aussi qu’Israël a intérêt à un apaisement mais ne recherche pas l’unité de ses adversaires

Qui ne se souvient du mot terrible de Jean Genêt : j’aime tellement l’Allemagne que je me réjouit qu’il y en ait deux…

Mais un jour ou l’autre, la paix finira par s’imposer. La question qui susiste est : Quand ?

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