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Que faire de Gaza?

Benjamin Netanyahou face à Gaza : quelle stratégie ?

Depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois, les commentateurs s’interrogent sur l’attitude de l’actuel gouvernement israélien face aux événement de la bande de Gaza : a-t-il un cap qu’il entend tenir ou tâtonne t il dans l’obscurité, comme le laisse entendre la conférence de presse donnée à Paris à des journalistes israéliens exclusivement ? En effet, le Premier Ministre a accru la confusion en disant expressément qu’il n’y avait pas d’issue politique à ce conflit avec la bande côtière, tombée sous la coupe du Hamas depuis plus de dix ans…

Que signifiaient ces paroles assez sibyllines ? Tout d’abord qu’il est difficile, voire impossible de traiter avec un mouvement terroriste (reconnu comme tel par l’ONU en personne), mais aussi, parallèlement, que la solution militaire n’est pas vraiment une option viable. Conclusion : on passe par la médiation égyptienne, on accepte l’intercession du Qatar, pourtant mis au ban des nations arabes en raison de son iranophilie… Le gouvernement israélien est très divisé ; on apprend qu’hier soir, si le Premier Ministre avait procédé à un vote, il aurait été mis en minorité, ce qui signifie qu’à la première occasion, ses adversaires au sein du cabinet de sécurité se débarrasseront de lui, sans la moindre hésitation.

Benjamin Netanyahou face à Gaza : quelle stratégie ?

 

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Donc, le problème se concentre sur la personne de Benjamin Netanyahou qui semble avoir des informations ou des projets sur le long terme. Voyons cela de plus près et passons en revue les différentes explications qui justifient ce que les partisans de la manière forte qualifient d’attentisme, voire de faiblesse.

Il y a en tout premier lieu, l’argument électoraliste : l’homme est un redoutable politicien, manœuvrier, fin connaisseur de son pays et de son peuple. Il aurait volontiers ordonné une action militaire d’envergure mais il sait que le peuple israélien en a assez de sacrifier ses fils et ses filles. Il ne consent un tel sacrifice que contraint et forcé… Or, Netanyahou va certainement convoquer des élections anticipées dans les prochaines semaines ou prochains mois et il ne veut pas que des morts dans la bataille viennent compromettre ses succès électoraux à venir. C’est bien vu de son côté, mais pas de celui des habitants du sud du pays qui se sentent de plus en plus oubliés, voire sacrifiées sur l’autel des élections. Ce pari est risqué car ces gens là votent eux aussi et rien ne garantit qu’ils auront oublié leurs souffrances d’ici là…

L’autre principe explicatif est moins injurieux pour le Premier Ministre et fait appel à une stratégie de longue haleine, à des vues proprement stratégiques et impliquent bien des facteurs de la politique régionale. Essayons de démêler cet écheveau.

Le Hamas se trouve dans une impasse : soumis à une fort blocus d’Israël et de l’Egypte, placé sous la pression d’Abbas et de l’AP de Ramallah, il ne sait plus comment faire face à la crise économique et au chômage endémique qui frappent presque 50% de la population. Au point que même le grand état major israélien recommande d’aider ces gens à surmonter une réelle crise humanitaire. Abbas a décidé d’étrangler le leadership du Hamas qui contrarie gravement ses projets de négociations avec Israël qui se retrouve englué dans une lutte fratricide. Que veut Abbas ? Désarmer le Hamas et prendre pied dans l’enclave. Or, le Hamas sait que ses milices armées sont son assurance-vie et que s’il rendait les armes, sa vie ne tiendrait plus qu’à un fil… C’est un mouvement terroriste armé qui ne doit sa survie et son pouvoir qu’à la violence armée.

Face à cette situation, le gouvernement israélien tente de séparer Gaza du reste de la Cisjordanie en permettant à l’enclave de subsister et de se développer économiquement. Ce qui revient à enfoncer un coin puissant entre les frères ennemis. Du coup, si cette stratégie devait réussir, le conflit changera de nature. Gaza deviendrait un ilot de prospérité palestinienne, Ramallah serait réduite à une sorte d’état croupion, renvoyant aux calendes grecques toute idée de réunification palestinienne, et donc de la solution à deux états.

Ceci explique la retenue du Premier Ministre qui est prêt à affronter un mécontentement passager des habitants du sud, dans l’espoir que ses négociations avec les états de la région ramèneront le Hamas à la raison. Sont impliqués dans ces négociations l’Egypte, partie prenante au conflit, mais aussi la Turquie, le Qatar, l’Arabie saoudite, et même les USA. Abbas regarde cela de près mais avec une certaine désinvolture car sa principale préoccupation est de ne pas devenir le dindon de la farce. Sa politique antiaméricaine butte contre ses limites et il s’en rend compte un peu tardivement. Le train ne passera pas deux fois et les autres parties ne sont pas restées inertes. Elles avancent, à preuve ce cessez le feu qui semble s’installer pour de bon. Et au fond, cette déflagration n’a eu lieu qu’à la suite de l’incursion des commandos israéliens dans la bande côtière. Nous savons que ce genre d’opérations ultra secrètes ont lieu régulièrement mais cette fois ci, elle a échoué partiellement même si elle a conduit à l’élimination d’une chef militaire du Hamas…

En conclusion, le Premier Ministre se rallie à la thèse des services : Gaza est ingérable, personne n’en veut, pas même Israël qui pourrait la reconquérir mais qui ne le fera pas. La seule solution est d’alléger le blocus, de faire repartir l’économie et de convaincre le Hamas qu’il a quelque chose à perdre. Les dollars qataris accomplissent leur effet. Le Qatar a accepté de court-circuiter l’AP de Ramallah en assurant le paiement de six mois de salaire des fonctionnaires à Gaza. Une telle injection de cash dans l’économie va redonner des couleurs aux habitants.

Telle est la théorie de Benjamin Netanyahou mais elle est et demeure très risquée. D’abord, on ne peut pas traiter avec des terroristes dont les réactions sont totalement imprévisibles. Ensuite, quoiqu’on fasse, c’est tout de même l’AP qui bénéficie de la reconnaissance des instances internationales. Enfin, le Hamas lui-même n’est qu’une force parmi tant d’autres. A tout moment, des éléments incontrôlés peuvent mettre le feu aux poudres…

Que se serait il passé si l’autobus touché par un missile était encore rempli de soldats ? C’eut été la catastrophe. Comme on dit à la curie romaine : attendons et espérons. Mais n’attendons pas trop…

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