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  • Edmond Fleg II

     

     

    Edmond Fleg, II

     

    Je dois à mon éminent collègue et ami, le professeur Yves CHEVALIER l’opportunité de revenir sur l’article déjà publié ici même sur ce grand maître du judaïsme français et francophone que fut Edmond Fleg. Il m’a indiqué l’existence d’un précédent numéro de la revue SENS (3-1984) qu’il m’a procuré : sans son aide, je ne serais pas revenu sur cet important maître tombé dans un oublie immérité. Alors que sa contribution dans d’innombrables domaines est absolument indéniable, à une époque, notamment au lendemain de la Shoah, où il fallait rebâtir et les pierres et les âmes (Grand Rabbin Jacob Kaplan).

     

    Ce numéro de 1984 m’a impressionné par sa richesse et sa qualité, ce qui n’est guère étonnant de la part d’une revue si bien dirigée.

     

    Je vais me concentrer ici sur un extrait fondamental, tiré de l’Enfant prophète (pp 89-91) et qui semble résumer à la perfection le judaïsme que Fleg (= l’Enfant prophète) appelait de ses vœux.

     

    Résumons les idées principales et replaçons les dans le contexte idéologique et religieux de l’époque. Comme c’est toujours le cas dans de pareilles circonstances, c’est-à-dire dans les temps de crise de la tradition rabbinique ancestrale, la transmission laisse grandement à désirer et les nouveaux venus, les enfants devenus adultes, ne savent plus du tout pourquoi ils sont juifs. C’est que la génération précédente, terrassée par l’antisémitisme plus ou moins violent, ne croyait déjà plus aux valeurs juives qu’elle était censée transmettre à ses descendants. Partant, les nouveaux adultes se trouvaient en possession de lambeaux, de pièces disparates, de pratiques incompréhensibles et incomprises, car on n’avait plus de maître pour les expliquer et leur redonner vie. C’est le constat que fait le jeune homme (E.F.) : et il n’hésite pas à entrer directement in medias res puisqu’il dit ne pas vouloir célébrer sa bar mitzwa

     

    Et pour quelle raisons ? C’est le texte que je vais étudier succinctement qui l’explique : de manière assez surprenante, il estime ne pas en être digne, il explique qu’il faut redéfinir le judaïsme, le repenser, le réformer (sans le défigurer ni en trahir la vocation première), et, signe révélateur, il propose d’en réorganiser le contenu autour de la figure du Messie.

     

    Ici, on peut parler d’une sorte de polémique souterraine à l’égard d’un christianisme agressif, qui se structure totalement autour de la messianité de Jésus, lequel, de par sa venue même, donne le coup de grâce au contenu juridico-légal de la Bible, c’est-à-dire aux préceptes et commandements bibliques. C’est la source même de l’antinomisme de Saint Paul qui a, selon l’Apôtre, spiritualisé la nouvelle religion, par opposition à l’ancienne qui se serait englué dans des pratiques charnelles au lieu d’opter pour une intériorisation de la foi. On est là au cœur des contestations judéo-chrétiennes depuis les origines : la synagogue tient mordicus aux mitzwot là où les adeptes de la nouvelle religion considéraient que la crucifixion sonnait le glas de l’accomplissement concret des commandements divins.

     

    J’ai surtout réfléchi au Messie, oui au Messie, dit le jeune homme (E.F.), qui répond ainsi au rabbin qui veut le convaincre de faire, malgré tout, son entrée dans la congrégation juive, à savoir sa Bar-Mitwa.. Et je jeune homme, dans une longue et très riche tirade, va développer ses idées novatrices face à un rabbin dont le désarroi intérieur est attesté par la présence d’une larme discrètement essuyée du doigt… Ses répliques ne sont pas très étendues, à peine une ligne, voire parfois, moins, alors que le jeune homme, censé n’avoir que treize ans, parle d’abondance.

     

    Ces fêtes, ces pratiques, lui dit il, devraient être mises au service de l’avènement messianique ! On sent un jeune esprit, apeuré par un amoncellement, un réseau d’interdits les plus mystérieux les uns que les autres, et face auxquels on se sent tout petit. Et ce nouvel esprit du judaïsme est le seul à pouvoir hâter la venue du Messie. On a l’impression que Fleg privilégie l’enseignement et le témoignage de la littérature prophétique par rapport aux lois du Pentateuque de Moïse. 

     

    Nous sommes autour des années vingt, donc dans la période de l’entre-deux-guerres : Rosenzweig a publié l’Etoile de la rédemption en 1921, Buber son Je et Tu en 1923, Léo Baeck son Essence du judaïsme (réimpression en 1922) et Heidegger son Sein und Zeit en 1927… Dans un autre domaine, Scholem se prépare en 1923 à faire le grand saut et à émigrer en Eréts Israël. Dans son autobiographie allemande, De Berlin à Jérusalem, il fait le même diagnostic que Fleg qui a publié son ouvrage en 1926 : la jeunesse juive de son temps était prisonnière d’un processus d’effilochage (Zerfasungsprozess), sans savoir à quel saint se vouer, exposée au millage des âmes par le christianisme (Grand Rabbin Jacob Kaplan)

     

    Un débat interne au judaïsme se déroulait autour des valeurs juives les plus vitales : alors que Rosenzweig, dans son retour à un judaïsme orthodoxe, défendait une orthopraxie, Buber, de son côté, estimait qu’une législation ne pouvait pas avoir été l’objet de la Révélation. La réponse de Rosenzweig ne se fit point attendre dans un magnifique texte intitulé Les bâtisseurs (Die Bauleute), allusion au verset qui fait un jeu de mots entre banayikh (tes fils) et bonayikh (tes bâtisseurs) : sous entendu, tes fils sont ceux qui poursuivent ton œuvre…

     

    Une redéfinition du judaïsme, selon Fleg, doit viser à faire du judaïsme la religion du Messie, c’est-à-dire un nouveau message prophétique : de nouveau, Fleg en vient au symbolisme comme on va le voir, plutôt qu’à la fidélité sans faille à la lettre. Si le Messie de paix et de justice venait enfin, tout serait plus simple et surtout plus clair…

     

    Ainsi, dans la fête de Pâque, la Mer rouge serait la mer de sang que devra traverser le Messie pour marquer son avènement… Ici aussi, la fameuse méthode d’interprétation allégorique accomplit son effet. L’événement salvifique d’un Israël fuyant l’Egypte avec son armée le poursuivant est compris de manière allégorique et spirituelle. Il en va de même de la cérémonie du Grand pardon (Yom Kippour) : ce jeûne doit nous aider à expier nos péchés afin que le Messie puisse venir dans une humanité régénérée. Et auparavant, à Rosh ha shana, le nouvel an juif, la corne de bélier est censé appeler le Messie et célébrer son avènement. La fête des cabanes se distingue par le fameux bouquet festif que l’on agite durant la prière afin de rendre hommage aux prophètes de toutes les religions qui ont annoncé le Messie.

     

    On voit que sans prôner un syncrétisme, en vogue à l’époque, Fleg propose simplement d’élargir le sein d’Abraham (Ernest Renan). Enfin, le sabbat connaît lui aussi une interprétation philosophique : il apporte le repos à toute une humanité en gésine de Messie. Fleg ajoute cette phrase Ô combien révélatrice de son malaise intérieur : On mangerait, on vivrait autrement que les autres, mais on saurait pourquoi : pour conserver la race qui doit enfanter le Messie. En d’autres termes, le Messie naît en Israël et se destine aussi aux enfants d’Israël. Et les juifs depuis deux millénaires d’exil endurent tout pour entretenir cet espoir d’un avenir meilleur pour l’ensemble du monde. Fleg considère donc que l’axe central du judaïsme est et demeure l’avènement messianique…

     

    Fleg parle de la Terre sainte qui doit être développée car c’est là bas que naîtra le Messie. Voilà un sionisme aux racines théologiques. En se préparant à recevoir le Messie, Israël doit évacuer tout le mal sous toutes ses formes. Et c’est seulement à ce prix qu’on sera digne de le recevoir. Voici une pastorale de la Rédemption qui se confond avec un humanisme universel : si personne ne ment, ne dupe ni ne tue, alors l’humanité se trouve dans un état de post-rédemption… Tous les hommes aimeraient alors Dieu de toutes leurs forces : Fleg reprend ici des formules du chapitre 6 du Deutéronome qui se trouvent dans la profession de foi juive (Shema’ Israel).

     

    L’amour, la paix et la justice régneraient alors sans partage puisque le mal aura été banni à tout jamais.

     

    Pour conclure sa péroraison, le jeune homme assène cette phrase conclusive à un pauvre rabbin entièrement sonné : Voilà à quoi j’ai pensé Monsieur le rabbin. Un pauvre rabbin qui s’attendait à tout sauf à cela, à une véritable action de repenser le judaïsme.

     

    Eh bien, si c’était ça le judaïsme, ne croyez vous pas que tout le monde le comprendrait ? Et que tous les juifs redeviendraient juifs ? C’est là une véritable exécution capitale. Et ce n’est pas fini puisque le jeune homme reprend la parole de ce pauvre rabbin qui lui avait dit que chaque Israélite est un prête… La réponse :

     

    dim. 25 août 11:11 (il y a 1 jour)

       

    À moi

    Dans ce cas, si cela était vrai, tous les hommes deviendraient des Juifs.

    Voilà une mémorable charge anti rabbinique. Fleg est un peu sévère avec une classe rabbinique qui s’est contenté de gérer un héritage reçu d’autres. Mais soyons justes : sans l’élite rabbinique, nous ne serions plus juifs. A quel prix le sommes nous restés, ça c’est une autre histoire…

     

     

     

    Edmond Fleg, II

     

    Je dois à mon éminent collègue et ami, le professeur Yves CHEVALIER l’opportunité de revenir sur l’article déjà publié ici même sur ce grand maître du judaïsme français et francophone que fut Edmond Fleg. Il m’a indiqué l’existence d’un précédent numéro de la revue SENS (3-1984) qu’il m’a procuré : sans son aide, je ne serais pas revenu sur cet important maître tombé dans un oublie immérité. Alors que sa contribution dans d’innombrables domaines est absolument indéniable, à une époque, notamment au lendemain de la Shoah, où il fallait rebâtir et les pierres et les âmes (Grand Rabbin Jacob Kaplan).

     

    Ce numéro de 1984 m’a impressionné par sa richesse et sa qualité, ce qui n’est guère étonnant de la part d’une revue si bien dirigée.

     

    Je vais me concentrer ici sur un extrait fondamental, tiré de l’Enfant prophète (pp 89-91) et qui semble résumer à la perfection le judaïsme que Fleg (= l’Enfant prophète) appelait de ses vœux.

     

    Résumons les idées principales et replaçons les dans le contexte idéologique et religieux de l’époque. Comme c’est toujours le cas dans de pareilles circonstances, c’est-à-dire dans les temps de crise de la tradition rabbinique ancestrale, la transmission laisse grandement à désirer et les nouveaux venus, les enfants devenus adultes, ne savent plus du tout pourquoi ils sont juifs. C’est que la génération précédente, terrassée par l’antisémitisme plus ou moins violent, ne croyait déjà plus aux valeurs juives qu’elle était censée transmettre à ses descendants. Partant, les nouveaux adultes se trouvaient en possession de lambeaux, de pièces disparates, de pratiques incompréhensibles et incomprises, car on n’avait plus de maître pour les expliquer et leur redonner vie. C’est le constat que fait le jeune homme (E.F.) : et il n’hésite pas à entrer directement in medias res puisqu’il dit ne pas vouloir célébrer sa bar mitzwa

     

    Et pour quelle raisons ? C’est le texte que je vais étudier succinctement qui l’explique : de manière assez surprenante, il estime ne pas en être digne, il explique qu’il faut redéfinir le judaïsme, le repenser, le réformer (sans le défigurer ni en trahir la vocation première), et, signe révélateur, il propose d’en réorganiser le contenu autour de la figure du Messie.

     

    Ici, on peut parler d’une sorte de polémique souterraine à l’égard d’un christianisme agressif, qui se structure totalement autour de la messianité de Jésus, lequel, de par sa venue même, donne le coup de grâce au contenu juridico-légal de la Bible, c’est-à-dire aux préceptes et commandements bibliques. C’est la source même de l’antinomisme de Saint Paul qui a, selon l’Apôtre, spiritualisé la nouvelle religion, par opposition à l’ancienne qui se serait englué dans des pratiques charnelles au lieu d’opter pour une intériorisation de la foi. On est là au cœur des contestations judéo-chrétiennes depuis les origines : la synagogue tient mordicus aux mitzwot là où les adeptes de la nouvelle religion considéraient que la crucifixion sonnait le glas de l’accomplissement concret des commandements divins.

     

    J’ai surtout réfléchi au Messie, oui au Messie, dit le jeune homme (E.F.), qui répond ainsi au rabbin qui veut le convaincre de faire, malgré tout, son entrée dans la congrégation juive, à savoir sa Bar-Mitwa.. Et je jeune homme, dans une longue et très riche tirade, va développer ses idées novatrices face à un rabbin dont le désarroi intérieur est attesté par la présence d’une larme discrètement essuyée du doigt… Ses répliques ne sont pas très étendues, à peine une ligne, voire parfois, moins, alors que le jeune homme, censé n’avoir que treize ans, parle d’abondance.

     

    Ces fêtes, ces pratiques, lui dit il, devraient être mises au service de l’avènement messianique ! On sent un jeune esprit, apeuré par un amoncellement, un réseau d’interdits les plus mystérieux les uns que les autres, et face auxquels on se sent tout petit. Et ce nouvel esprit du judaïsme est le seul à pouvoir hâter la venue du Messie. On a l’impression que Fleg privilégie l’enseignement et le témoignage de la littérature prophétique par rapport aux lois du Pentateuque de Moïse. 

     

    Nous sommes autour des années vingt, donc dans la période de l’entre-deux-guerres : Rosenzweig a publié l’Etoile de la rédemption en 1921, Buber son Je et Tu en 1923, Léo Baeck son Essence du judaïsme (réimpression en 1922) et Heidegger son Sein und Zeit en 1927… Dans un autre domaine, Scholem se prépare en 1923 à faire le grand saut et à émigrer en Eréts Israël. Dans son autobiographie allemande, De Berlin à Jérusalem, il fait le même diagnostic que Fleg qui a publié son ouvrage en 1926 : la jeunesse juive de son temps était prisonnière d’un processus d’effilochage (Zerfasungsprozess), sans savoir à quel saint se vouer, exposée au millage des âmes par le christianisme (Grand Rabbin Jacob Kaplan)

     

    Un débat interne au judaïsme se déroulait autour des valeurs juives les plus vitales : alors que Rosenzweig, dans son retour à un judaïsme orthodoxe, défendait une orthopraxie, Buber, de son côté, estimait qu’une législation ne pouvait pas avoir été l’objet de la Révélation. La réponse de Rosenzweig ne se fit point attendre dans un magnifique texte intitulé Les bâtisseurs (Die Bauleute), allusion au verset qui fait un jeu de mots entre banayikh (tes fils) et bonayikh (tes bâtisseurs) : sous entendu, tes fils sont ceux qui poursuivent ton œuvre…

     

    Une redéfinition du judaïsme, selon Fleg, doit viser à faire du judaïsme la religion du Messie, c’est-à-dire un nouveau message prophétique : de nouveau, Fleg en vient au symbolisme comme on va le voir, plutôt qu’à la fidélité sans faille à la lettre. Si le Messie de paix et de justice venait enfin, tout serait plus simple et surtout plus clair…

     

    Ainsi, dans la fête de Pâque, la Mer rouge serait la mer de sang que devra traverser le Messie pour marquer son avènement… Ici aussi, la fameuse méthode d’interprétation allégorique accomplit son effet. L’événement salvifique d’un Israël fuyant l’Egypte avec son armée le poursuivant est compris de manière allégorique et spirituelle. Il en va de même de la cérémonie du Grand pardon (Yom Kippour) : ce jeûne doit nous aider à expier nos péchés afin que le Messie puisse venir dans une humanité régénérée. Et auparavant, à Rosh ha shana, le nouvel an juif, la corne de bélier est censé appeler le Messie et célébrer son avènement. La fête des cabanes se distingue par le fameux bouquet festif que l’on agite durant la prière afin de rendre hommage aux prophètes de toutes les religions qui ont annoncé le Messie.

     

    On voit que sans prôner un syncrétisme, en vogue à l’époque, Fleg propose simplement d’élargir le sein d’Abraham (Ernest Renan). Enfin, le sabbat connaît lui aussi une interprétation philosophique : il apporte le repos à toute une humanité en gésine de Messie. Fleg ajoute cette phrase Ô combien révélatrice de son malaise intérieur : On mangerait, on vivrait autrement que les autres, mais on saurait pourquoi : pour conserver la race qui doit enfanter le Messie. En d’autres termes, le Messie naît en Israël et se destine aussi aux enfants d’Israël. Et les juifs depuis deux millénaires d’exil endurent tout pour entretenir cet espoir d’un avenir meilleur pour l’ensemble du monde. Fleg considère donc que l’axe central du judaïsme est et demeure l’avènement messianique…

     

    Fleg parle de la Terre sainte qui doit être développée car c’est là bas que naîtra le Messie. Voilà un sionisme aux racines théologiques. En se préparant à recevoir le Messie, Israël doit évacuer tout le mal sous toutes ses formes. Et c’est seulement à ce prix qu’on sera digne de le recevoir. Voici une pastorale de la Rédemption qui se confond avec un humanisme universel : si personne ne ment, ne dupe ni ne tue, alors l’humanité se trouve dans un état de post-rédemption… Tous les hommes aimeraient alors Dieu de toutes leurs forces : Fleg reprend ici des formules du chapitre 6 du Deutéronome qui se trouvent dans la profession de foi juive (Shema’ Israel).

     

    L’amour, la paix et la justice régneraient alors sans partage puisque le mal aura été banni à tout jamais.

     

    Pour conclure sa péroraison, le jeune homme assène cette phrase conclusive à un pauvre rabbin entièrement sonné : Voilà à quoi j’ai pensé Monsieur le rabbin. Un pauvre rabbin qui s’attendait à tout sauf à cela, à une véritable action de repenser le judaïsme.

     

    Eh bien, si c’était ça le judaïsme, ne croyez vous pas que tout le monde le comprendrait ? Et que tous les juifs redeviendraient juifs ? C’est là une véritable exécution capitale. Et ce n’est pas fini puisque le jeune homme reprend la parole de ce pauvre rabbin qui lui avait dit que chaque Israélite est un prête… La réponse :

     

    dim. 25 août 11:11 (il y a 1 jour)

       

    À moi

    Dans ce cas, si cela était vrai, tous les hommes deviendraient des Juifs.

    Voilà une mémorable charge anti rabbinique. Fleg est un peu sévère avec une classe rabbinique qui s’est contenté de gérer un héritage reçu d’autres. Mais soyons justes : sans l’élite rabbinique, nous ne serions plus juifs. A quel prix le sommes nous restés, ça c’est une autre histoire…

     

     

     

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  • Hegel et les Juifs

    Hegel et les Juifs

     

    C’est un vaste sujet qu’on va tenter de focaliser autour de la philosophie politique de cet auteur qui a marqué la pensée occidentale, puisqu’on parle de la spéculation depuis l’Ionie jusqu’à Iéna. Cet homme disait de lui-même qu’il avait fait le tour des concepts philosophiques et qu’après lui, on ne fera que répéter ce qui avait été dit auparavant.

     

    Hegel, mort en 1832 conservera sa chaire de professeur à l’université de Berlin jusqu’au bout. Ce qui signifie que ses idées en des matières cruciales seront celles de toute l’Allemagne pensante et croyante. Mais pas uniquement puisque, comme le rapporte Ernest Renan, Victor Cousin, l’étoile montante au firmament français de la pensée, ira écouter, de l’autre côté du Rhin quelques conférences de l’illustre penseur sur la philosophie de l’histoire.

     

    Enfin, le célèbre philosophe judéo-allemand Franz Rosenzweig, mort en 1929, consacrera sa thèse de doctorat à la philosophe politique de Hegel. Son directeur de thèse, Friedrich Meinecke sera le chef de file des hégéliens de droite, lui qui publia un ouvrage qui fera date, Cosmopolitisme et et état national. Et là nous arrivons au cœur du sujet, in medias res.

    En effet, pour traiter le sujet, à savoir Hegel et les Juifs, il faut tenir compte d’un élément crucial, sous son double aspect, l’antisémitisme du début des années 1820, environ une décennie avant la disparition de Hegel, et l’Emancipation des juifs. La question de l’état moderne, dont Hegel fut l’un des principaux contributeurs, était posée : dans quelle mesure cet Etat, originellement chrétien, pouvait il accepter en son sein des éléments allogènes, leur accorder des droits civiques et en faire des citoyens comme les autres. En gros, l’Etat devait il rester chrétien ou devait-il, au nom des idéaux de l’Aufklärung, s’ouvrir à tous en traitant autrement des rapports entre l’Etat et la religion.

     

    On l’aura compris, l’intérêt de cette question tiendra à la manière dont Hegel abordera cette question, à une époque où l’antisémitisme européen, en Allemagne notamment, était florissant. C’est aussi l’époque où les juifs, désireux d’échapper à cette éviction sociale, se convertissaient en masse, au point que l’on a parlé d’épidémie de conversions (Taufepidemie). On se souvient, par exemple, des propres cousins de Rosenzweig (les Ehrenberg, Rosenstock, etc…)

     

    Il faut rappeler qu’à cette époque, si proche de la Révolution française, les idées de restauration avaient le vent en poupe alors qu’en France révolutionnaire, l’atmosphère était tout autre : il fallait bannir toute idée de restauration de l’Ancien Régime, alors que la tendance de l’autre côté du Rhin était à l’opposé…

     

    De la nature de l’Etat dépendaient sa conception du droit et des institutions sociales et politiques. Deux tendances se faisaient face : soit on était attaché à la restauration aristocratique avec toutes ses implications (notamment concernant l’éviction des Juifs), soit on plaçait l’attachement à la Raison et aux structures démocratiques, et en conséquence on ne considérait plus les juifs comme des parias. La religion n’emprisonnait plus les débats politiques au sein de la société.

     

    Cependant, il convient de se garder d’un penchant naturel qui consiste à projeter nos critères contemporains sur les réalités socio-politiques de l’époque : diviser les forces en présence en réactionnaires, d’une part, et en progressistes, d’autre part. Les clivages existants jadis recouvraient des réalités bien plus complexes. Par exemple, l’introduction, d’un antisémitisme racial, avant la lettre, serait parfaitement inadéquate, même si les différentes phases de cet antisémitisme (que certains Allemands ou Autrichiens ont sucé à la poitrine de leurs mères) ont, pour ainsi dire, fait la courte échelle à l’horreur de la Shoah, deux petits siècles plus tard…

     

    C’est pourtant à cette époque, vers 1820, alors que les tendances antisémites étaient en passe de se renforcer, que Hegel a réussi à mettre sur pied une doctrine juridique ambitieuse, de grande portée sociale, annonciatrice d’une théorie de l’Etat moderne. En oeuvrant de la sorte, Hegel rejoint les idéaux du siècle des Lumières et se révèle être un partisan du droit naturel qui dépasse, et de très loin, le cadre des conceptions religieuses précédentes. Et le droit rejoint la morale, dans ce cas précis, car plus rien ne saurait le limiter. C’est le triomphe de l’universalité de la loi éthique. En posant de telles exigences, Hegel prouve sa grande supériorité par rapport aux autres théories de son époque. Certes, le système ainsi échafaudé n’est pas à l’abri de certaines contradictions que Hegel tente par la suite de résoudre.

     

    Le concept d’autonomie joue un rôle majeur dans toute cette affaire puisqu’il se fonde sur la Raison objectivée qui se présente à l’individu sous la forme de la loi, du droit et des institutions politiques. Cette objectivité est générée par la Raison dans la mesure où les individus dépassent leur subjectivité en s’en remettant aux lois de la société. Parallèlement à cela, les êtres seront en mesure de vivre selon leur éthique.

     

    Certes, toute cette savante construction n’st pas à l’abri de contradictions puisqu’on parle souvent de la divinisation de l’Etat chez notre philosophe. Et l’individu n’y trouve pas toujours son compte. Hegel pouvait être en avance sur son temps mais il en restait tout de même, le fils Il demeure, cependant, que Hegel fonde son concept de l’Emancipation des Juifs sur des idées démocratiques proches des Etats de droit contemporains. Un point mérite d’être souligné : en dépit des opinions politiques opposée et des fortes résistances à toute intégration, pleine et entières, des Juifs au sein du groupe social, Hegel réussit à ancrer sa doctrine morale dans un ensemble laïque… Portant, on trouve même chez Kant, Fichte et Schelling des appels à conserver certaines idées religieuses chrétiennes, aux côtés d’une éthique moderne.

     

    Mais ceci n’est pas le fin mot d’l’histoire car parfois on a cultivé une sorte de Transcendance impénétrable qui aurait placé en l’homme les principes mêmes de l’éthique alors qu’on aurait plutôt aimé voir en l’éthique un principe tiré de la Raison pratique.

     

    On est bien loin de Fichte qui déniait aux Juifs le droit d’être considéré comme les autres citoyens ; il n’acceptait que ceux des juifs dont la tête ne comportait pas une seule idée juive ! Curieuse conception de la part d’un philosophe. Fichte dont l’antisémitisme est connu, appréciait pourtant grandement Salomon Maïmon, lequel avait une attitude très critique à l’égard de la tradition ancestrale. Il lui reconnaissait aussi le mérite d’avoir développé la philosophie transcendantale. Maimon était le bon juif de Fichte. Il accusait les juifs d’avoir une double morale, l’une pour eux mêmes et l’autre, hostile à l’égard des autres…

     

    Hegel n’était pas le pire ennemi des Juifs puisque les jeunes gens qui créèrent le fameux Culturverein, destiné à revitaliser le judaïsme, s’inspiraient largement de sa philosophie. Mais le philosophe qui avait rédigé une petite biographie de Jésus ne pouvait pas se débarrasser de deux millénaires de pensée chrétienne laquelle ne fut pas précisément favorable aux juifs et au judaïsme

     

    L’image demeure donc contrastée. Hegel a transposé dans de domaine de la philosophie politique certaines idées issues du kantisme, et notamment le principe de l’universalité de la loi morale.

     

    Dans l’histoire de la philosophie politique, il y eut des gens qui interprétaient Hegel dans un sens pluraliste et ouvert, et d’autres qui optèrent pour un aspect opposé.

     

    Friedrich Meinecke, le directeur de thèse de Rosenzweig était le meilleur représentant de l’hégélianisme de droite… Cet homme qui mourut tranquillement dans son lit, bien après la fin de la guerre, avait applaudi à l’entrée des troupes nazies en Pologne …

    Hegel et les Juifs

     

    C’est un vaste sujet qu’on va tenter de focaliser autour de la philosophie politique de cet auteur qui a marqué la pensée occidentale, puisqu’on parle de la spéculation depuis l’Ionie jusqu’à Iéna. Cet homme disait de lui-même qu’il avait fait le tour des concepts philosophiques et qu’après lui, on ne fera que répéter ce qui avait été dit auparavant.

     

    Hegel, mort en 1832 conservera sa chaire de professeur à l’université de Berlin jusqu’au bout. Ce qui signifie que ses idées en des matières cruciales seront celles de toute l’Allemagne pensante et croyante. Mais pas uniquement puisque, comme le rapporte Ernest Renan, Victor Cousin, l’étoile montante au firmament français de la pensée, ira écouter, de l’autre côté du Rhin quelques conférences de l’illustre penseur sur la philosophie de l’histoire.

     

    Enfin, le célèbre philosophe judéo-allemand Franz Rosenzweig, mort en 1929, consacrera sa thèse de doctorat à la philosophe politique de Hegel. Son directeur de thèse, Friedrich Meinecke sera le chef de file des hégéliens de droite, lui qui publia un ouvrage qui fera date, Cosmopolitisme et et état national. Et là nous arrivons au cœur du sujet, in medias res.

    En effet, pour traiter le sujet, à savoir Hegel et les Juifs, il faut tenir compte d’un élément crucial, sous son double aspect, l’antisémitisme du début des années 1820, environ une décennie avant la disparition de Hegel, et l’Emancipation des juifs. La question de l’état moderne, dont Hegel fut l’un des principaux contributeurs, était posée : dans quelle mesure cet Etat, originellement chrétien, pouvait il accepter en son sein des éléments allogènes, leur accorder des droits civiques et en faire des citoyens comme les autres. En gros, l’Etat devait il rester chrétien ou devait-il, au nom des idéaux de l’Aufklärung, s’ouvrir à tous en traitant autrement des rapports entre l’Etat et la religion.

     

    On l’aura compris, l’intérêt de cette question tiendra à la manière dont Hegel abordera cette question, à une époque où l’antisémitisme européen, en Allemagne notamment, était florissant. C’est aussi l’époque où les juifs, désireux d’échapper à cette éviction sociale, se convertissaient en masse, au point que l’on a parlé d’épidémie de conversions (Taufepidemie). On se souvient, par exemple, des propres cousins de Rosenzweig (les Ehrenberg, Rosenstock, etc…)

     

    Il faut rappeler qu’à cette époque, si proche de la Révolution française, les idées de restauration avaient le vent en poupe alors qu’en France révolutionnaire, l’atmosphère était tout autre : il fallait bannir toute idée de restauration de l’Ancien Régime, alors que la tendance de l’autre côté du Rhin était à l’opposé…

     

    De la nature de l’Etat dépendaient sa conception du droit et des institutions sociales et politiques. Deux tendances se faisaient face : soit on était attaché à la restauration aristocratique avec toutes ses implications (notamment concernant l’éviction des Juifs), soit on plaçait l’attachement à la Raison et aux structures démocratiques, et en conséquence on ne considérait plus les juifs comme des parias. La religion n’emprisonnait plus les débats politiques au sein de la société.

     

    Cependant, il convient de se garder d’un penchant naturel qui consiste à projeter nos critères contemporains sur les réalités socio-politiques de l’époque : diviser les forces en présence en réactionnaires, d’une part, et en progressistes, d’autre part. Les clivages existants jadis recouvraient des réalités bien plus complexes. Par exemple, l’introduction, d’un antisémitisme racial, avant la lettre, serait parfaitement inadéquate, même si les différentes phases de cet antisémitisme (que certains Allemands ou Autrichiens ont sucé à la poitrine de leurs mères) ont, pour ainsi dire, fait la courte échelle à l’horreur de la Shoah, deux petits siècles plus tard…

     

    C’est pourtant à cette époque, vers 1820, alors que les tendances antisémites étaient en passe de se renforcer, que Hegel a réussi à mettre sur pied une doctrine juridique ambitieuse, de grande portée sociale, annonciatrice d’une théorie de l’Etat moderne. En oeuvrant de la sorte, Hegel rejoint les idéaux du siècle des Lumières et se révèle être un partisan du droit naturel qui dépasse, et de très loin, le cadre des conceptions religieuses précédentes. Et le droit rejoint la morale, dans ce cas précis, car plus rien ne saurait le limiter. C’est le triomphe de l’universalité de la loi éthique. En posant de telles exigences, Hegel prouve sa grande supériorité par rapport aux autres théories de son époque. Certes, le système ainsi échafaudé n’est pas à l’abri de certaines contradictions que Hegel tente par la suite de résoudre.

     

    Le concept d’autonomie joue un rôle majeur dans toute cette affaire puisqu’il se fonde sur la Raison objectivée qui se présente à l’individu sous la forme de la loi, du droit et des institutions politiques. Cette objectivité est générée par la Raison dans la mesure où les individus dépassent leur subjectivité en s’en remettant aux lois de la société. Parallèlement à cela, les êtres seront en mesure de vivre selon leur éthique.

     

    Certes, toute cette savante construction n’st pas à l’abri de contradictions puisqu’on parle souvent de la divinisation de l’Etat chez notre philosophe. Et l’individu n’y trouve pas toujours son compte. Hegel pouvait être en avance sur son temps mais il en restait tout de même, le fils Il demeure, cependant, que Hegel fonde son concept de l’Emancipation des Juifs sur des idées démocratiques proches des Etats de droit contemporains. Un point mérite d’être souligné : en dépit des opinions politiques opposée et des fortes résistances à toute intégration, pleine et entières, des Juifs au sein du groupe social, Hegel réussit à ancrer sa doctrine morale dans un ensemble laïque… Portant, on trouve même chez Kant, Fichte et Schelling des appels à conserver certaines idées religieuses chrétiennes, aux côtés d’une éthique moderne.

     

    Mais ceci n’est pas le fin mot d’l’histoire car parfois on a cultivé une sorte de Transcendance impénétrable qui aurait placé en l’homme les principes mêmes de l’éthique alors qu’on aurait plutôt aimé voir en l’éthique un principe tiré de la Raison pratique.

     

    On est bien loin de Fichte qui déniait aux Juifs le droit d’être considéré comme les autres citoyens ; il n’acceptait que ceux des juifs dont la tête ne comportait pas une seule idée juive ! Curieuse conception de la part d’un philosophe. Fichte dont l’antisémitisme est connu, appréciait pourtant grandement Salomon Maïmon, lequel avait une attitude très critique à l’égard de la tradition ancestrale. Il lui reconnaissait aussi le mérite d’avoir développé la philosophie transcendantale. Maimon était le bon juif de Fichte. Il accusait les juifs d’avoir une double morale, l’une pour eux mêmes et l’autre, hostile à l’égard des autres…

     

    Hegel n’était pas le pire ennemi des Juifs puisque les jeunes gens qui créèrent le fameux Culturverein, destiné à revitaliser le judaïsme, s’inspiraient largement de sa philosophie. Mais le philosophe qui avait rédigé une petite biographie de Jésus ne pouvait pas se débarrasser de deux millénaires de pensée chrétienne laquelle ne fut pas précisément favorable aux juifs et au judaïsme

     

    L’image demeure donc contrastée. Hegel a transposé dans de domaine de la philosophie politique certaines idées issues du kantisme, et notamment le principe de l’universalité de la loi morale.

     

    Dans l’histoire de la philosophie politique, il y eut des gens qui interprétaient Hegel dans un sens pluraliste et ouvert, et d’autres qui optèrent pour un aspect opposé.

     

    Friedrich Meinecke, le directeur de thèse de Rosenzweig était le meilleur représentant de l’hégélianisme de droite… Cet homme qui mourut tranquillement dans son lit, bien après la fin de la guerre, avait applaudi à l’entrée des troupes nazies en Pologne …

     

     

     

     

     

  • Israël, terre des constratses

     

    Israël, terre de contrastes…

     

    On l’a souvent dit et répété à satiété : Israël se compose d’une infinie diversité de populations, issues de plus de cent vingt nationalités. On a aussi expliqué que si le système éducatif est un peu tribal, chaque clan ayant sa propre organisation scolaire où l’accent sera mis sur telle matière plutôt que sur telle autre, l’armée nationale, Tsahal, joue un rôle centripète, c’est-à-dire va vers le centre et se veut unificateur Tsahal est le véritable creuset du pays, il apprend à tous les citoyens à être des Israéliens.

     

    Mais je voudrais examiner ici de très près ce qu’est cette véritable cohabitation, car c’en est une où des juifs venus des quatre coins du globe sont obligés ou simplement désireux de vivre en semble, de fusionner et de réaliser une sorte d’harmonie sociale qui n’a peut-être jamais existé, pas même aux temps les plus anciens, comme par exemple, cette monarchie unifiée, plaçant sous un même sceptre Juda et Israël…

     

    A Natanya, située à moins de trente kilomètres de Tel Aviv, dans une rue appelée rehov Gad Machnès se trouve avant l’hôtel Blue Weiss un autre établissement qui ne désemplit jamais, tant les touristes des contrées les plus lointaines y envoient leurs touristes. Cet hôtel, l’hôtel résidence, a une spécificité : il abrite au premier étage un véritable oratoire qui fonctionne tout le temps et où les fidèles des rues adjacentes affluent, au point que le chabbat il est difficile pour les retardataires de trouve une place assise. A l’occasion du chabbat hatan de M. Jonathan M., j’ai dû fausser comapgnie à mes amis british de la New Synagogue, située rehov Macdonald, ce qui ne s’invente pas pour une telle maison de prière, fréquentée majoritairement par des Britannique. Et où l’excellent rabbin, venu d’Afrique du sud, prononce ses sermons dans la langue de Shakespeare…

     

    Eh bien, imaginez, si vous le voulez bien, l’abîme séparant cet oratoire tunisien (pur jus) où règne une joyeuse pagaille et où l’improvisation est la règle alors qu’avec mes bons Britishs tout est réglé comme du papier musique.

     

    Dès hier soir, à l’entrée du chabbat, j’avais été quelque peu intrigué : dès 19 heures, les psaumes du chabbat furent prononcés, ce qui m’a étonné. C’est après avoir prononcé le Lékhou ne ranéna (Allons, chantons les louanges..) que l’on revint vers le Cantique des Cantiques dont les différents chapitres furent lus dans une mélodie typiquement orientale, proche parfois de la voix de la chanteuse égyptienne Oum Kaltoum… C’est dire s’il y avait un peu de contraste. Mes Britishs se seraient ailleurs que dans une synagogue…

     

    Mais la suite ne l’était guère moins : un octogénaire tunisien, à la voie tonitruante a pris la parole pour donner connaissance de la siyute des opérations. Je n’avais encore jamais vu cela, pas même à Paris intra muros (mais peut-être que cela se fait en banlieue..) Il annonce d’une voix de stentor qu’il y a trois événements ce chabbat : une circoncision, une bar mitswa et un mariage et conclut ainsi : nous avons avec ces trois choses un véritable complet poisson… Ce qui m’a rappelé les plats que je dévorais chez Azar, rue Richer, quand j’étais jeune étudiant à Paris.

     

    Mais le meilleur était à venir le lendemain. Instruit par l’expérience de la veille, je me suis réveillé assez tôt pour être in situ vers 8h30, ce qui est un record pour votre serviteur.

     

    Et là encore, ce fut un festival de musique orientale : mes Britishs étaient bien loin, non pas géographiquement mais au plan culturel et civilisationnel. Je fermais les yeux pour me transporter par la pensée rue Mac Donald… Mais les trémolos dans la voix des chanteurs me ramenaient à la réalité…

     

    Je notais que les membres du comité se répartissaient les rôles et que rien ne pouvait se faire sans leur bruyant accord. Quelle vie ! L’un d’entre eux qui me connaissait par les émissions avec Josy sur France 2, ancien pharmacien à Paris XVIe, m’indiqua son âge, quatre-vingts ans et sa belle allure. L’autre, le plus vivace devait être de la même génération. Il maîtrise bien l’hébreu moderne et il n’a pas oublié son français.

     

    Dans mes rêveries d’évasion, j’imaginais ce qui devait se passer chez mes bons Britishs au même moment : un ministre officiant récite les Psaumes, pas un bruit dans la vaste salle de prière, sept montées régulières à la Tora, pas une de plus alors qu’ici règne plutôt une certaine inflation. Et durant tout ce temps l’heure avance. Chaque appelé à la Tora se voit gratifié de toutes bénédictions de la Terre. Je n’y ai pas échappé mais cela tombait bien, j’aime les bénédictions et y crois. Mais toutes ces manifestations de vie et de bonheur prennent du temps, ce qui fait que le personnel, chargé de nous servir un petit déjeuner- apéritif, ne nous voyant pas venir, a plié bagage et nous a laissés sans nos joyeuses agapes.

     

    Avant la fin de l’office religieux, j’observe deux adolescents israéliens qui sont pliés de rire en suivant ce qui se passe dans l’oratoire et le vainqueur à l’applaudimètre , si j’ose dire, n’est autre que notre homme à la voix tonitruante, spécimen grandeur nature du Tunisien authentique.

     

    Rien de tout cela chez mes Britishs qui, ququ’il arrive, achèvent leurs oraisons à 10h30. C’est alors que nous croisons les jolis chapeaux des élégantes qui se dirigent dignement vers la salle du Kiddoush où l‘anglais dépasse et de loin l’hébreu ou le français.

     

    Ceux qui me connaissent savent que je suis un nègre blanc, un séfarade passé à la moulinette ashkénaze, et ce depuis mon époque de lycéen à l’école Maimonide, à Boulogne sur Seine.

     

    Même si mon esprit me conduit à suivre mes bons Britishs, j’avoue que cette joyeuse pagaille tunisienne est synonyme de vie, avec un certain désordre mais la vie n’est elle pas désordre, improvisation, imprévus et humour ?

     

    Certes, oui. Mais peut on s’accommoder de tout cela tout le temps ? J’avoue que j’en doute. Mais une chose est sûre et certaine : le premier défi qu’Israël doit relever, est celui de l’harmonisation de toutes ces tribus. En hébreu, mizzug galouyot…

     

     

     

    Israël, terre de contrastes…

     

    On l’a souvent dit et répété à satiété : Israël se compose d’une infinie diversité de populations, issues de plus de cent vingt nationalités. On a aussi expliqué que si le système éducatif est un peu tribal, chaque clan ayant sa propre organisation scolaire où l’accent sera mis sur telle matière plutôt que sur telle autre, l’armée nationale, Tsahal, joue un rôle centripète, c’est-à-dire va vers le centre et se veut unificateur Tsahal est le véritable creuset du pays, il apprend à tous les citoyens à être des Israéliens.

     

    Mais je voudrais examiner ici de très près ce qu’est cette véritable cohabitation, car c’en est une où des juifs venus des quatre coins du globe sont obligés ou simplement désireux de vivre en semble, de fusionner et de réaliser une sorte d’harmonie sociale qui n’a peut-être jamais existé, pas même aux temps les plus anciens, comme par exemple, cette monarchie unifiée, plaçant sous un même sceptre Juda et Israël…

     

    A Natanya, située à moins de trente kilomètres de Tel Aviv, dans une rue appelée rehov Gad Machnès se trouve avant l’hôtel Blue Weiss un autre établissement qui ne désemplit jamais, tant les touristes des contrées les plus lointaines y envoient leurs touristes. Cet hôtel, l’hôtel résidence, a une spécificité : il abrite au premier étage un véritable oratoire qui fonctionne tout le temps et où les fidèles des rues adjacentes affluent, au point que le chabbat il est difficile pour les retardataires de trouve une place assise. A l’occasion du chabbat hatan de M. Jonathan M., j’ai dû fausser comapgnie à mes amis british de la New Synagogue, située rehov Macdonald, ce qui ne s’invente pas pour une telle maison de prière, fréquentée majoritairement par des Britannique. Et où l’excellent rabbin, venu d’Afrique du sud, prononce ses sermons dans la langue de Shakespeare…

     

    Eh bien, imaginez, si vous le voulez bien, l’abîme séparant cet oratoire tunisien (pur jus) où règne une joyeuse pagaille et où l’improvisation est la règle alors qu’avec mes bons Britishs tout est réglé comme du papier musique.

     

    Dès hier soir, à l’entrée du chabbat, j’avais été quelque peu intrigué : dès 19 heures, les psaumes du chabbat furent prononcés, ce qui m’a étonné. C’est après avoir prononcé le Lékhou ne ranéna (Allons, chantons les louanges..) que l’on revint vers le Cantique des Cantiques dont les différents chapitres furent lus dans une mélodie typiquement orientale, proche parfois de la voix de la chanteuse égyptienne Oum Kaltoum… C’est dire s’il y avait un peu de contraste. Mes Britishs se seraient ailleurs que dans une synagogue…

     

    Mais la suite ne l’était guère moins : un octogénaire tunisien, à la voie tonitruante a pris la parole pour donner connaissance de la siyute des opérations. Je n’avais encore jamais vu cela, pas même à Paris intra muros (mais peut-être que cela se fait en banlieue..) Il annonce d’une voix de stentor qu’il y a trois événements ce chabbat : une circoncision, une bar mitswa et un mariage et conclut ainsi : nous avons avec ces trois choses un véritable complet poisson… Ce qui m’a rappelé les plats que je dévorais chez Azar, rue Richer, quand j’étais jeune étudiant à Paris.

     

    Mais le meilleur était à venir le lendemain. Instruit par l’expérience de la veille, je me suis réveillé assez tôt pour être in situ vers 8h30, ce qui est un record pour votre serviteur.

     

    Et là encore, ce fut un festival de musique orientale : mes Britishs étaient bien loin, non pas géographiquement mais au plan culturel et civilisationnel. Je fermais les yeux pour me transporter par la pensée rue Mac Donald… Mais les trémolos dans la voix des chanteurs me ramenaient à la réalité…

     

    Je notais que les membres du comité se répartissaient les rôles et que rien ne pouvait se faire sans leur bruyant accord. Quelle vie ! L’un d’entre eux qui me connaissait par les émissions avec Josy sur France 2, ancien pharmacien à Paris XVIe, m’indiqua son âge, quatre-vingts ans et sa belle allure. L’autre, le plus vivace devait être de la même génération. Il maîtrise bien l’hébreu moderne et il n’a pas oublié son français.

     

    Dans mes rêveries d’évasion, j’imaginais ce qui devait se passer chez mes bons Britishs au même moment : un ministre officiant récite les Psaumes, pas un bruit dans la vaste salle de prière, sept montées régulières à la Tora, pas une de plus alors qu’ici règne plutôt une certaine inflation. Et durant tout ce temps l’heure avance. Chaque appelé à la Tora se voit gratifié de toutes bénédictions de la Terre. Je n’y ai pas échappé mais cela tombait bien, j’aime les bénédictions et y crois. Mais toutes ces manifestations de vie et de bonheur prennent du temps, ce qui fait que le personnel, chargé de nous servir un petit déjeuner- apéritif, ne nous voyant pas venir, a plié bagage et nous a laissés sans nos joyeuses agapes.

     

    Avant la fin de l’office religieux, j’observe deux adolescents israéliens qui sont pliés de rire en suivant ce qui se passe dans l’oratoire et le vainqueur à l’applaudimètre , si j’ose dire, n’est autre que notre homme à la voix tonitruante, spécimen grandeur nature du Tunisien authentique.

     

    Rien de tout cela chez mes Britishs qui, ququ’il arrive, achèvent leurs oraisons à 10h30. C’est alors que nous croisons les jolis chapeaux des élégantes qui se dirigent dignement vers la salle du Kiddoush où l‘anglais dépasse et de loin l’hébreu ou le français.

     

    Ceux qui me connaissent savent que je suis un nègre blanc, un séfarade passé à la moulinette ashkénaze, et ce depuis mon époque de lycéen à l’école Maimonide, à Boulogne sur Seine.

     

    Même si mon esprit me conduit à suivre mes bons Britishs, j’avoue que cette joyeuse pagaille tunisienne est synonyme de vie, avec un certain désordre mais la vie n’est elle pas désordre, improvisation, imprévus et humour ?

     

    Certes, oui. Mais peut on s’accommoder de tout cela tout le temps ? J’avoue que j’en doute. Mais une chose est sûre et certaine : le premier défi qu’Israël doit relever, est celui de l’harmonisation de toutes ces tribus. En hébreu, mizzug galouyot…

     

     

     

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