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Jean-François Colosimo, La crucifixion de l’Ukraine. Mille ans de guerres de religions en Europe. Albin Michel, 2022.

Jean-François Colosimo, La crucifixion de l’Ukraine. Mille ans de guerres de religions en Europe. Albin Michel, 2022.

Jean-François Colosimo, La crucifixion de l’Ukraine. Mille ans de guerres de religions en Europe. Albin Michel, 2022.

 

Enfin un discours fiable et qui va au fond des choses dans cette affaire ukrainienne qui attire tant de gens tenant des discours d’analphabètes ! On commençait à être sursaturé par tous ces plateaux de télévisions qui  commentaient à perte de vue les mêmes informations.

 

Avec Jean-François Colosimo qui connait bien l’arrière-plan culturel et religieux de ce terrible conflit entre  la Russie et l’Ukraine, les choses changent et le présent ouvrage est justement là pour le prouver. L’auteur remonte très haut dans l’histoire de ce pays qui, comme la Pologne, a eu une histoire heurtée, partagé entre aux moins deux cultures, deus aspirations, l’une tournée vers l’Atlantique et l’autre vers l’Oural .   Et c’est bien ce qui fait problème et qui a aussi motivé l’agression de la Russie de Vladimir Poutine ; un pays divisé est une proie facile pour qui veut bien aiguiser les antagonismes, notamment linguistiques er culturels. Une spécialité dans laquelle l’actuel président russe est passé maître...

 

IFC contextualise le problème ukrainien et remonte jusqu’à l’an 800 pour retracer la genèse du conflit qui a aussi des origines religieuses. Cette description -là, seuls quelques rares spécialistes -et JFC est du nombre- sont capables de s’en acquitter.

 

Voici un passage où l’on devine la rivalité entre les deux centres du christianisme et les conséquences sui s’ensuivront :

 

Grégoire Ier, fils de sénateur, ancien préfet et ancien diplomate, le pape réformateur juge que  le siège de Pierre doit garantir par lui-même son avenir en Occident. Rome se tourne vers l’Atlantique et le Rhin Byzance vers la mer  Noire et le Danube. Se dessine en filigrane  la future ligne de choc.

 

Tout est dit. Le schisme est en gestation, tant le christianisme déjà bien installé dans les pays peine à réaliser son unité doctrinale ; mais tout convergeait pour opposer l’ouest à l’est, l’Orient à l’Occident. Et je laisse de côté, par souci de clarté, les interprétations divergentes sur des articles cardinaux du catholicisme. Ce fut une lutte âpre à laquelle se sont livré Rome et Constantinople.

 

Les partisans de deux bords ne reculeront devant rien, pas même devant la mise à sac de Constantinople par des chrétiens d’une autre obédience :

 

Pour toutes les nattions qu’elle a évangélisées, la capitale impériale de la romanité chrétienne est à jamais en flammes, plongée dans le brasier que d’autres chrétiens ont allumé  au nom de la chimérique supériorité de leur foi. Tout particulièrement pour les Slaves convertis à l’orthodoxie.

 

Je ne peux pas suivre JFC dans les méandres de cette histoire dont nous héritions aujourd’hui, grosses de conflits inévitables. Chacun sait que pour le Français moyen, l’Asie commence après le pont de Kehl... En d’autres termes, vers les terres de l’orthodoxie nous voyageons avec des idées simples. L’Orient n’est pas cartésien. Mais j’avoue que je comprends un peu mieux -mais sans jamais l’approuver- les réactions épidermiques du président russe. Longtemps, ce pays nommé Ukraine, a été considéré comme un appendice, une marche ou une zone frontalière. (Il parait que c’est le sens du nom de ce pays si disputé...)

 

il faut savoir gré à l’auteur qui a simplifié pour nous les approches à ce conflit situé à l’intersection de tant de choses : la religion, les contestations des rites, le nationalisme, les rivalités entre le pouvoir ecclésial et le pouvoir impérial, etc...

 

Certains ont cru, dans leur criminelle naïveté, pouvoir trancher le nœud gordien sans susciter une vive résistance , voire une réprobation  générale.

 

IL est un autre mérite de ce livre, et non des moindres, c’est de bien montrer le rôle incontournable de l’empire Ottoman à la fois sur le plan diplomatique mais aussi  sur le champ de bataille. Ce qui explique bien l’activisme diplomatique des Turcs et leurs offres de service, notamment dans le transfert des céréales depuis la mer Noire vers les pays qui en ont le plus besoin... La diplomatie turque ambitionne même de négocier un cessez-le-feu entre les belligérants. Ce qui n’est pas rien, dans les circonstances actuelles.

 

Cet ouvrage dont je félicite l’auteur pour son érudition et sa lucidité, nous permet de mieux comprendre le jeu des puissances en Ukraine. On  découvre aussi que la France, comme les autres grandes puissances européennes et aussi turques) ont instrumentalisé la religion pour s’octroyer une certaine influence dans cette région si disputée d’Europe orientale. Il émet aussi des réserves justifiées sur l’attitude de l’Europe après le rattachement forcé de la Crimée à la Russie.

 

Mais heureusement, la république d’Ukraine résiste au boa russe...

 

 

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