Infographie des guerres franco-allemandes. Marie-France Derouge, Stéphane André, et Julien Peltier. Passés / Composés.
Infographie des guerres franco-allemandes. Marie-France Derouge, Stéphane André, et Julien Peltier. Passés / Composés.
En moins d’un siècle, en soixante-quinze ans très exactement, la France et l’Allemagne, devenue depuis lors des alliés ficèles et puissants, se sont combattues trois fois, sans pitié. Et pendant toutes ces années de guerre, la France n’a pas réussi, à elle seule, à ramener à la raison les armées prussiennes. Tant en 1914 qu’en 1939, l’entrée en guerre des USA a changé le cours de la guerre. Cette infographie permet de revoir tous les moments de ces guerres à l’aide d’instruments, de cartes et d’analyses, sans fournir de très gros efforts.
En plus des analyses, le lecteur trouvera des images et de belles illustrations. Ceux qui s’intéressent à l’armement et aux opérations de guerre seront eux aussi servis. On nous présente l’armement du soldat dans les deux camps. Toutes les armes sont présentées, que ce soit l’arme blindée ou l’équipement de base du fantassin. Je n’oublie pas les belles présentations historiques ; comment les choses se sont-elles goupillées pour aboutir à la guerre ? Du côté français, il semble évident que les hommes politiques n’ont pas fait preuve d’un grand discernement ni d’esprit d’anticipation. Le livre parle à raison de la montée en puissance de la Prusse comme de l’émergence d’un grand danger, d’un monstre, face à la France.
Quand on regarde toutes les forces en présence , on sent que la France était moins belliciste que la Prusse... Déjà en 1870, Napoléon III n’avait pas bien évalué les moyens à la disposition de la France en cas de confrontation armée, ce qui explique le déroulement de la guerre. La chose la plus grave fut la cécité politique des dirigeants qui n’ont pas vu que chaque guerre contenait en germe la suivante. A Versailles, une paix terrible fut imposée au vaincu, l’Allemagne, sans se demander si la méthode choisie n’allait pas conduire à un réveil nationaliste, rendant inéluctable une nouvelle confrontation armée.
C’est précisément ce que fit Hitler lorsqu’il engagea le IIIe Reich dans une guerre de conquête, d’extermination et de domination. La France n’avait pas la même ressource militarire que son puissant voisin. Ni les mêmes revendications territoriales et financières si les allemands avaient dû s’acquitter de toutes les réparations imposées par les traités, cela aurait duré des décennies. Les réparations devenaient le point central de l’après-guerre, au point qu’on parlait de politiciens en accord avec la paix, le respect des clauses du traité, et les autres qui n’en voulaient pas (Erfüllungspolitiker und Nichterfüllunsgpolitiker).
En effet, les populations civiles devaient supporter ce terrible effort de guerre, et ce des deux côtés. La vie à l’arrière sans hommes, tous requis dans les tranchées ou sur le front, avait tout révolutionné. Et la Seconde Guerre n mondiale’en finissait pas : pratiquement six ans ! On nous présente ici les grandes offensives alliées ainsi que les attaques allemandes sur tous les fronts. Il a fallu une coalition des plus grandes puissances de l’époque pour venir à bout d’une telle puissance. J’ai feuilleté un jour la version allemande des souvenirs de Churchill qui combattit sans relâche ce nazisme, je me souviens de la formule employée dans le livre : ... Bevor dieser furchtbaren Hand das Schwert entwunden wurde (il a fallu une collation du monde avant que le glaive ne fût arraché à cette effroyable main... Et Churchill savait de quoi il parlait.
Cette infographie des guerres franco-allemandes nous rappelle à raison que la paix est un bin précieux et qui ne va pas de soi. L’état de paix n’est pas une chose naturelle. Un écrivain dont le nom m’échappe présentement disait que des torrents de haine coulent dans nos veines et que la violence est, hélas, l’état le plus naturel que l’on puisse vivre ou connaitre. Ce qui se passe depuis presque deux ans à quelques heures d’avion de la France nous rappelle douloureusement ce qui peut survenir à tout moment.
Ce bel ouvrage parle aussi d’un musée de la paix. Heureuse initiative dont on peut espérer qu’elle sera suivie d’effet. Je ne puis m’empêcher de penser aux versets du prophète Isaïe (VIIIe siècle avant Jésus) qui évoquait l’ère messianique au cours de laquelle aucun peuple ne brandira le glaive contre ses voisins, aucune académie militaire ne sera en activité puisque nul n’aura plus besoin d’apprendre l’art de la guerre... Il évoque même une situation angélique puisque non seulement on ne fera plus la guerre, mais on transformera les armes en socles de charrue : peupler la terre et nourrir ses habitants au lieu de s’entretuer.
On en est encore très loin...