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L’Identité natioanle et une autochtonie venue d’ailleurs… A propos de la tribune du président SARKOZY dans le Monde

L’Identité natioanle et une autochtonie venue d’ailleurs… A propos de la tribune du président SARKOZY dans le Monde

Hier a paru en première page du journal Le Monde l’article du président Sarkozy sur l’identité nationale. Cette participation publique est exceptionnelle et très bienvenue. Fidèle à sa nature, le président n’a pas jugé inférieur à sa dignité ni contraire à ses très hautes fonctions de descendre dignement dans l’arène et de dire ce qu’il pense d’un débat qui engage l’avenir du pays.

On ne comptait plus, en effet, les Cassandre qui criaient casse-cou et qui jugeaient gravement que ce genre de débat ne comportait que des risques. On se souvient des débats autour de l’insécurité et de l’immigration que la gauche avaient qualifié d’indignes et d’indécents au motif qu’ils pouvaient ranimer au sein des couches sociales les moins favorisées des sentiments de xénophobie. Le résultat a été la présence du leader de l’extrême droite au second tour de l’élection présidentielle et l’élimination du premier ministre socialiste de l’époque qui avait pourtant occupé l’hôtel de Matignon pendant cinq ans… Voilà ce qu’il en coûte d’ignorer les craintes, mêmes diffuses, même confusément exprimées par ce qu’on nomme, d’après une expression générique, le peuple et dont tous, absolument tous, faisons partie.

La structure de cette tribune libre est remarquable : le président a eu le courage de partir d’un fait politique récent, le résultat de la votation suisse au sujet des minarets. Je rappelle qu’il s’agissait d’inscrire dans la constitution du pays (amender la constitution d’un pays n’est pas un fait anodin) que les minarets ne sauraient se multiplier dans le ciel d’un pays chrétien… Nicolas Sarkozy a dressé un parallèle avec les résultats négatifs du référendum sur l’Europe où des pays comme le nôtre, mais aussi d’autres, ont osé dire non. Belle leçon de réalisme politique où les élites de différents pays (et la quasi- totalité de la presse) étaient pour l’adoption de la constitution de l’Europe… Nonobstant ces apôtres de la «bien-pensance» (ou du politiquement correct) les gens (je préfère cette expression au vocable peuple) ont dit non.

Fort de ce parallélisme qui montre que la seule souveraineté qui compte est bien celle du peuple, le président français prend acte du choix des Suisses et passe à la question cruciale qu’on a souvent tenté d’occulter tant en Suisse que chez nous : Pourquoi, en Suisse, pays qui a une longue tradition d’ouverture, d’hospitalité , de tolérance, un tel rejet (sic) peut-il s’exprimer avec tant de force ? Et que répondrait le peuple français à la même question ? La transition est parfaite, elle semble même couler de source. Si un peuple voisin et ami s’exprime comme il l’a fait, comment penser que notre propre peuple, issu de la Révolution et pionnier des droits de l’homme, réagirait autrement ?

Je me souviens d’une déclaration d’un président de la République quand j’étais tout jeune étudiant selon lequel parlait des problèmes, c’était les créer… C’était l’Himalaya du conservatisme politique ! Le président Sarkozy tranche avantageusement par rapport à telles considérations…

Avec une grande souplesse, sans une once de conservatisme ni d’autoritarisme, il rappelle que les Français comme les Suisses sont précédés d’une longue et authentique tradition d’accueil de l’autre, d’une tradition de générosité et de tolérance. La mondialisation, note le président de la république française, impose le changement mais celui-ci ne présuppose pas le viol ni la récusation des identités nationales existantes. Nulle culture, autre que celle de l’Europe, n’a autant pratiqué l’ouverture à ce qui est différent, venu d’ailleurs.

L’Europe se situe aux antipodes du communautarisme et même le résultat de la votation suisse ne remet nullement en cause la liberté religieuse ni n’implique (qu’à D- ne plaise trois fois), la destruction des minarets existants ni l’interdiction de construire de nouveaux lieux de culte, si le besoin s’en faisait sentir… Il faut se garder d’un unilatéralisme qui confine à cette haine de soi, explicitée par le philosophe allemand des années trente, Théodore Lessing, qui avait montré le caractère pernicieux du report sur soi d’un rejet provenant d’ailleurs. En fait, il avait raison. L’Europe, sans vraiment s’en rendre compte, s’est laissé gagner par cette tendance.

Cette notion de «haine de soi» se trouvait déjà dans l’ouvrage du penseur danois Sören Kierkegaard, consacré au patriarche Abraham et intitulé Crainte et tremblement (1842, p 55) : … Abraham, grand par l’amour de Dieu qui est haine de soi.

J’ai été vivement touché par les lignes du président Sarkozy sur le respect mutuel que doivent se témoigner celui qui accueille et celui qui arrive. Sous sa plume, cette profession de foi a un accent particulièrement vibrant et émouvant. Il est l’exemple vivant de ce qu’il proclame urbi et orbi.

Si j’ai cité Kierkegaard, ce n’est pas fortuitement. Abraham est en fait le fondateur du monothéisme. C’est donc l’essence même de la religion abrahamique. Et tout le monde aura compris la hauteur de cet enjeu. Le patriarche est aussi le symbole insurpassable de l’autochtonie. Mais d’une autochtonie venue d’ailleurs. C’est un mythe qui soutient la fraternité essentielle de tous les hommes.

N’est-ce pas ce que dit le président en des termes moins philosophiques mais noblement politiques ? Les gens qui quittent leur pays, leur langue et leurs coutumes n’abdiquent nécessairement leurs croyances.

Ils s’ouvrent aux autres pour bâtir avec eux quelque chose de grand.

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