Israéliens et Palestiniens dans un même orchestre…
Samedi 30 janvier, France 2 a diffusé vers 13h15 un très beau reportage, remarquablement bien fait et absolument équilibré du point de vue de l’orientation politique. Il s’agissait de présenter l’orchestre philharmonique, dirigé aujourd’hui par Daniel Barenboïm et fondé par lui-même et Edward Saïd, le professeur américain d’origine palestinienne., décédé en 2003 des suites d’une longue maladie.
L’orchestre compte des instrumentistes palestiniens, israéliens, libanais, turcs, syriens, égyptiens, etc… Tout ce petit monde parvient à s’entendre, à travailler ensemble et à constituer une harmonie. Certes, ce n’est pas la recette miracle pour apporter une solution à de graves problèmes, mais au moins, on voit des gens reconnaître la partie d’humanité présente aussi, dans une égale mesure, chez l’autre.
C’était un grand jour puisque l’orchestre présentait la troisième symphonie de Beethoven devant l’Emir du Quatar, un souverain connu pour son adresse politique et son sens du compromis : il a de bonnes relations avec tout le monde, les USA, l’Europe, Israël, l’Iran, la Syrie etc… Son ouverture est donc connue et reconnue. Certes, les Israéliens, membres de l’orchestre, étaient munis de passeports diplomatiques espagnols, ont dit les journalistes, mais chacun savait à quoi s’en tenir sur leur vraie nationalité.
Aux questions concernant les différends politiques, idéologiques et religieux, les membres de l’orchestre ont répondu avec retenue et humour : ce qui les intéresse et les tient ensemble n’est autre que la musique !
Et puis, l’émission s’est focalisée sur la jeune israélienne de Tel Aviv et un violoniste palestinien de Ramallah qui ont, avec plus ou moins de conviction, protesté de leur bonne foi et de leur authentique camaraderie. Pourtant, ce sont les explications embarrassées de Barenboïm qui ont marqué les limites de l’entente : il a dit au Palestinien que l’important n’était pas de s’entendre sur le fond, mais seulement de comprendre la logique de l’Autre… Comprenne qui pouura.
Mais le reportage ne s’est pas achevée avec la magnifique exécution de la IIIe symphonie ; les journalistes ont suivi le Palestinien chez lui à Ramallah. Il les a conduits chez sa grand mère, une vénérable octogénaire qui dit avoir quitté son lieu de naissance en 1948. Son petit fils, le violoniste, lui dit en arabe qu’il joue avec des Israéliens… Elle est interloquée, répète trois fois la, la la (non, en arabe). Le Palestinien pose un regard attendri sur la vieille dame mais demeure ferme vis-à-vis d’Israël dont il dénonce, en termes mesurés, les actions et l’occupation. Pas un mot sur les droits millénaires des juifs sur la terre d’Israël, pas un mot sur les titres de propriété des juifs sur la terre ancestrale dont ils furent chassés sans pitié aucune par différentes cultures et civilisation.
Mais l’émission n’est toujours pas finie car on nous montre la jeune israélienne se rendant chez son collègue palestinien qui l’accueille à l’orientale, avec effusion, tout en restant ferme sur ses positions.
Le reportage, pour une fois très complet et ne se limitant pas à un saupoudrage superficiel, revient en Israël chez les grands parents de la musicienne : originaires de Buenos Aires, ce vieux couple clame sa foi en l’Etat juif et appelle de ses vœux la paix et la coopération. Le grand père souligne qu’une entente entre juifs et arabes transformerait cette région du monde en paradis et en havre de paix qui susciterait l’envie de tous.
Je félicite les journalistes de France 2 pour ce beau reportage. Evidemment, ceci ne réglera pas le problème mais au moins on a vu des enfants palestiniens prenant des cours de piano et de violon, en plein air, on a vu un père, tout sourire, reconnaître que les résultats scolaires de son fils se sont nettement améliorés depuis qu’i apprend le solfège… Pour une fois, pas de haine, pas d’appel à la vengeance…
Après tout il vaut mieux former l’oreille musicale des enfants de cette région plutôt que de les abreuver de haine. Il ne faut pas oublier que la musique, comme la Révélation, est un phénomène acoustique ; elle mobilise le même organe que lors d’une théophanie, l’oreille. Et dans la hiérarchie des sens, c’est la perception la plus pure puisque le son est immatériel.