Jérusalem et les relations israelo-americaines…
Les journaux ont parlé d’un coup de froid dans les relations entre l’Etat juif et son indéfectible ami et allié, les USA. Il faut dire que la présidence du nouveau chef d’Etat américain avait suscité des inquiétudes dans les deux camps. Et par la suite, nous avons vu que M. Obama, acculé et bousculé au sein même de son pays, a dû en rabattre et accepter que la Cisjordanie et même la partie orientale de la ville sainte continuent d’être peuplées par des citoyens israéliens de confession juive. Mais aujourd’hui, le refroidissement semble plus sérieux : je dis bien semble…
De quoi s’agit-il a juste ? Depuis plus de trois mille ans, je dis bien trois millénaires, c’est-à-dire le début de la monarchie davidique, les Hébreux, les Judéens et les juifs (trois étapes de l’évolution historique du peuple d’Israël) se sont établis dans cette petite cité de bergers et de pasteurs, éloignée de tout, insignifiante mais que depuis cette date, si reculée, les juifs du monde entier ont placé au cœur même de leurs préoccupations, de leurs attentes, de leurs espoirs, bref de leur messianisme. Quoi de plus normal que les voir s’y réinstaller normalement, sans en chasser les autres ni les soumettre à une sorte de développement limité ?
Je crains que dans cette affaire, les haines recuites et les ressentiments vivaces n’obscurcissent la lucidité des gens : depuis l’exil de 68/70 de l’ère chrétienne, mais même déjà bien avant (on le voit au retour des exilés de Babylone en 539 avant notre ère), les juifs ont lié leur sort, voire leur existence à cette ville de Jérusalem, cette cité du roi de David, ce monarque qui en fit «une ville où les maisons se touchent.»
Même dans les Evangiles, on voit Jésus se rendre à Jérusalem pour y célébrer comme il convient, Pessah, la Pâque, et obtenir d’être invité par ses frères résidant dans cette ville. En effet, la fête de Pâque faisait obligation à chaque habitant de Jérusalem de recevoir à sa table tous ses frères en visite pour cette fête de pèlerinage. C’est dire que cette ville et ses symboles sont inséparables de l’histoire du peuple juifs.
Mais ne perdons pas de vue le casus belli, ou plutôt la pomme de discorde entre Israël et les USA : les 1600 logements qui vont être construits dans la vieille ville où il flotte, il est vrai, une atmosphère, un esprit, à nul s autres pareils… Vous aurez beau aller dans ce ville, y retourner des centaines de fois, vous n’aurez jamais l’impression d’un déjà vu…
Pourquoi tant d’émotion ? Il semble que les Israéliens aient commis une indélicatesse en n’attendant pas le départ du vice-président américain pour proclamer leurs intentions. C’est un peu vrai mais ce fut aussi le pari de la franchise. Et il m’étonnerait fort que les israéliens s’arrêtent en chemin. Ils continueront de s’installer dans un territoire, un pays, qu’ils considèrent comme les leurs. Mais pourquoi une telle méthode ? Depuis Ben Gourion, les Israéliens ont le sentiment d’être des incompris et des mal aimés : quoi qu’ils fassent ; on les critique ou on les attaque. On se souvient de la fameuse phrase de David Ben Gourion : le monde crie, gesticule, mais nous, nous faisons ce que nous avons à faire.
Replaçons l’événement dans un contexte dépassionné : si les Arabes, et en particulier les Palestiniens, étaient animés d’authentique sentiments de paix et de coexistence pacifique (ce que je souhaite, pour ma part du fond du cœur et que le président Shimon Pérés a redit dans le journal Le monde tout récemment), tout un chacun pourrait s’installer où bon lui semble… Mais il y a de noires arrière-pensées, le moindre établissement, le moindre changement de main d’une lotissement ou d’un arpent de terre donnent lieu à des cris d’orfraie. C’est que l’esprit de paix ne s’est pas encore installé dans les âmes. Et les USA, comme tant d’autres, n’ont pas compris que les racines de ce conflit étaient nettement religieuses et que la solution du problème est–paradoxalement- de nature théologique.
Existe-t-il un seul autre pays dont l’existence est contestée, que dis je menacée, depuis sa renaissance et dont la capitale est scrutée en permanence ?
Certes, d’autres y ont aussi quelques droits, notamment depuis la conquête de Saladin et des Ottomans. Mais historiquement, c’est la cité du roi David : l’histoire et les documents (documents assyriens, littérature biblique, prophétique et évangélique) le prouvent.
Je ne me souviens de l’auteur de la phrase suivante qui dit bien ce qu’elle veut dire : s’il fallait restituer Jérusalem à ses plus anciens propriétaire, ce serait alors les Jébuséens qui en seraient les heureux bénéficiaires… Mais la plus belle possession est et reste la paix.