Favoriser le bien vivre ensemble :
Sources communes, valeurs communes ?
Depuis un certain nombre d’années, les sociétés européennes ont perdu leur homogénéité, en partie ou en totalité. Alors que les religions dérivées du christianisme ou du judéo-christianisme, régnaient en maîtresses absolues sur la spiritualité et la culture de notre continent, il faut désormais compter avec un nouveau venu, l’islam dont une frange grandissante hélas donne de cette religion une interprétation qui s’avère incompatible avec les valeurs républicaines des démocraties européennes.
Une cohabitation est elle possible ? Elle est souhaitable si l’on veut préserver la paix civile et éloigner le spectre de la guerre des cultures, voire même des religions.
Notre propos n’est pas de juger de la valeur de telle ou telle culture religieuse. Nous cherchons simplement à montrer que les fondements de la culture islamique sont, à l’origine, les mêmes que celles des deux autres monothéismes, le christianisme et le judaïsme. Certes, chacune de ces grandes cultures religieuses peut, à juste titre, revendiquer pour soi une originalité certaine et une spécificité propre.. Aucune n’est réductible à quelque chose d’autre qu’elle-même. Aucune n’acceptera d’être considérée comme le sous produit de celle qui l’a précédée.
Quelles sont les relations entre la culture et la religion ? Il est difficile, pour des sensibilités non-européennes, de tracer très distinctement une ligne-frontière entre ces deux notions ; souvent, des catégories religieuses gisent au fondement de la culture proprement dite. Mais dans l’histoire de la culture européenne, ces notions, à l oriigine indivisibles, se sont éloignées les unes des autres au point de ressortir à des catégories opposées. C’est là le point nodal du problème.
Telle est la nature de la grave dissonance séparant une certaine forme d’islam, l’islamisme, des autres religions de ce continent. Or, une cohabitation pacifique, voire même harmonieuse, est indispensable pour un bon vivre ensemble. Vouloir changer les équilibres est chose malaisée, mais elle peut surtout s’avérer risquée, c’est-à-dire dangereuse pour ses éventuels promoteurs, aucun pays n’acceptant de se voir dépouiller de ses traditions culturelles, culinaires et vestimentaires millénaires.
Les lois sociales, les prérogatives du législateur sont sacrées et intangibles dans des sociétés laïques, même si ce terme n’existait pas dans la langue et la mentalité arabo-musulmanes, voire même dans cette culture. Ce sont des chrétiens maronites qui l’y ont introduit en formant un nouveau vocable sur le terme arabe qui signifie monde, de ce monde ou mondanité (alam, alamiya ou almaniya).
Pourtant, le Coran, source de la religion et de la spiritualité musulmanes, fait fond lui aussi sur les mêmes valeurs que la Bible hébraïque et les Evangiles ou le Nouveau Testament.
Ce qui fait problème, ce ne sont pas les sources religieuses en soi, mais bien l’interprétation qu’on veut bien en donner. Au cours du Moyen Âge, des penseurs musulmans de premier plan, Ibn Badja, Ibn Tufayl et Averroès ont montré qu’il existait une certaine compatibilité entre l’identité musulmane et la culture européenne. Au point même d’être devenus aussi des maîtres spirituels du continent.
Dans nos sociétés civiles, ce n’est pas Dieu, ce n’est pas la Révélation qui donnent le ton, c’est la loi civile que l’on distingue très soigneusement des prescriptions religieuses, faute de quoi la société aurait à souffrir de l’exclusivisme religieux. La loi des hommes a, certes, un fondement éthique, elle ne s’oppose pas à la loi de Dieu, bien qu’elle en diffère. Les guerres de religion font partie d’un très lointain passé en Europe, et n’est pas souhaitable de les voir réapparaître.
Prenons le cas du Décalogue, véritable charte éthique de l’humanité civilisée : on y découvre toutes les règles de la vie en société, lesquelles s’imposent à tout être doté de raison.
Ce qui sépare la loi religieuse de la règle éthique, c’est la notion d’universalité. Sous toutes les latitudes, il est interdit de tuer, de voler, de mentir, de tromper, etc… On peut parler de l’universalité de la loi morale mais pas nécessairement de la loi religieuse. Un exemple parmi tant d’autres : on doit préserver la vie de tout être, on doit tenir compte de la dignité de tout être, mais on n’est pas tenu d’être circoncis ni de s’abstenir de consommer de la viande de porc ni même soumis au jeûne du mois de ramadan.
Les tenants éclairés des trois grands monothéismes doivent donc livrer le même combat contre les idées fausses. Ils doivent être convaincus du bien-fondé de leur cause. Et comprendre que l’exclusivisme religieux dessert leur idéal.