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Faiblesses et ambiguïtés de la Turquie

Faiblesses et ambiguïtés de la Turquie

Avant toute chose, il convient de présenter des condoléances à la Turquie pour ce terrible attentat et assurer l’Allemagne de notre compassion puisque les victimes sont pratiquement toutes de nationalité allemande. Mais cela posé, un certain nombre de questions demeurent : pourquoi donc la Turquie a t elle mis tant de temps à combattre Daesh ? Pourquoi ne rend elle pas hermétiques ses frontières avec la Syrie et l’Irak ? Enfin, pourquoi est elle obsédée par la question kurde au point de se voir dicter un large pan de sa politique étrangère ?

On se souvient du cas de Kobané, maintes fois évoqué ici même/ Les Turcs se refusaient à intervenir, ils ne laissaient pas passer les Kurdes de Turquie porter secours à leurs frères menacés d’extermination par Daesh. La Turquie avait déployé des chars d’assaut à la frontière mais restait l’arme au pied. Et lorsque Ankara a rejoint en apparence la coalition occidentale, ses chasseurs bombardiers visaient surtout le PKK ou d’autres mouvements de résistance kurde. Pendant un temps assez prolongé, la Turquie a laissé entrer et sortir de son territoire des convois militaires de Daesh, elle a laissé les nouvelles recrues franchir sa frontière, elle a permis que les blessés de Daesh soient soignés dans ses hôpitaux ; et selon la presse et les services russes, la Turquie verrait d’un assez bon œil le trafic du pétrole de Daesh, permettant aux terroristes de bénéficier du nerf de la guerre, l’argent des hydrocarbures.

La Turquie a ensuite habilement manœuvré pour faire pression sur l’Europe, exigeant 3 milliards d’Euros afin de fixer chez elle les deux millions de réfugiés (vrais ou faux), lesquels pourraient submerger l’Europe si Ankara ouvrait les vannes… Et ce n’est pas tout : Ankara a obtenu que soient réactivées les négociations avec l’Europe pour une adhésion… Tout en sachant des deux côtés, que la Turquie ne sera jamais admise en Europe, d’autant que les événements actuels prouvent chaque jour, l’inanité d’une telle démarche ou d’un tel projet.

Mais voilà, malgré tout cela, l’effondrement de cette Turquie menacerait gravement les intérêts européens. L’armée turque, même pléthorique et mal équipée, incapable de faire taire le soulèvement kurde, reste une pièce essentielle dans le dispositif de l’OTAN. Si l’Etat turc entrait en déliquescence, car cet état n’est fort qu’en apparence, ce serait la fin. Le problème est qu’un autre danger plane avec plus d’insistance sur ce pays, c’est la question kurde. Ankara n’a jamais voulu prendre au sérieux les revendications kurdes d’autonomie interne, les considérant comme une menace contre son intégrité territoraile. On peut comprendre cette attitude, mais il y a d’autres points de vies qui se laissent défendre tout aussi bien.

L’identité turque pourrait s’enrichir d’un élément kurde, ce serait un apport et non une perte. Les Kurdes constituent une part non négligeable de la population et certaines villes ou régions turques sont majoritairement habitées par des Kurdes… Or, ces lieux sont pratiquement assiégés par l’armée d’Ankara.

Enfin, il y a la méfiance turque face au rapprochement entre les mouvements kurdes et l’US Army. Ankara, comme je le rappelais plus haut, est très inquiète à ce sujet. Et cette continuité territoriale à sa frontière (contrôlée à 80% par ces mêmes Kurdes) constitue pour elle une préoccupation majeure…

Pourquoi avoir fait tout ce rappel, tout ce tour d’horizon ? Parce qu’ils expliquent, sans jamais justifier ni surtout excuser cet attentat horrible et absolument condamnable.

La Turquie se trouve dans une situation hautement délicate. La guerre est à ses portes. A l’intérieur, elle combat le terrorisme et aussi les mouvements autonomistes kurdes. Et voilà, à l’extérieur, que pour alléger la pression russe sur ses alliés en Syrie, elle a abattu (légalement ou illégalement) un chasseur bombardier russe… Cela commence à faire beaucoup.

Ankara doit choisir son camp et éloigner d’elle toute ambiguïté. Et les fondements de cet état turc doivent être revus dans ce sens. Ce n’est pas M. Erdogan qui a commis trop d’erreurs, notamment vis-à-vis d’Israël qui était jadis un allié fidèle de son pays, qui pourra mener à bien cette vigoureuse réforme.

La sagesse reviendra peut-être un jour dans ce Proche Orient qui défie toutes les lois de la logique.

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