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Juif, autrement ? Comment être juif en Israël …

 

Juif, autrement ? Comment être juif en Israël …

Au fond, rien n’est simple quand il s’agit du peuple d’Israël et des juifs en général. Est ce un peuple, une religion, les deux à la fois ? Nul ne le sait vraiment car tout change et tout bouge. Chaque fois qu’on revient d’un séjour plus ou moins long dans ce pays, les observateurs les plus attentifs sont contraints de réviser leurs précédentes analyses, et partant, de modifier leurs précédentes conclusions. C’est ainsi. Cela revient à chercher la quadrature du cercle. Pourquoi en suis-je venu à reposer cette question aujourd’hui même ? C’est tout simplement en raison de cette insupportable campagne électorale, provoquée par quelques politiciens avides de pouvoir et peu concernés par le bien-être du peuple qu’ils prétendent représenter au parlement.

 

Juif, autrement ? Comment être juif en Israël …

Or, depuis une semaine au moins, un nouvel enjeu est apparu, un enjeu qu’on n’aurait jamais deviné tant il occupe une place centrale, fondamentale dans l’échiquier de l’existence de ce peuple : le judaïsme !! On pensait que cela allait de soi. Oui, deux hommes politiques ou plutôt deux politiciens (cette appellation leur convient mieux) ont décidé chacun de son côté d’imposer leur propre conception du judaïsme, un judaïsme de préférence non religieux, ennemi de la règle normative juive (la halakha) et pas uniquement indifférent, ce qui eût été plus convenable.

Aucun observateur impartial de la scène politique israélienne n’a omis de relever le post de Yaïr Lapide caricaturant de manière ignoble l’establishment religieux, dénonçant son insatiable appétit de reconnaissance et d’argent. Or, si ce monsieur qui envisage de diriger un jour le gouvernement de ce pays, avait eu un peu plus de culture historique, il aurait compris que le thème du rapport des juifs à l’argent et au métal jaune a été traité, et de quelle manière ! par les antisémites de tout bord. Et que cette classe rabbinique ou simplement ultra orthodoxe a certes souvent mis les intérêts de la Tora au service des leurs, allant jusqu’à demander il y a quelques années une rémunération pour l’étude des textes sacrés, et prétendant que c’était là un travail comme n’importe quel autre… Du jamais vu ! Pourtant ces mêmes personnes qui se réclament à tout bout de champ de la Tora et de ses enseignements moraux ignorent superbement l’éthique qui commande à la fois l’éthique de l’étude et de la pratique de cette même Tora… On nous enseigne dans les Pirké Avot (Chapitres des Pères) que le sommet de la spiritualité juive est de se tuer ( à force d’efforts soutenus) pour la Tora (mi shé mémit et atsmo aléha)… Donc, en gros, il ne faut pas se faire d’illusions sur les motivations profondes de ceux et de celles qui se font appeler les harédim. Certes, aucune assertion ne saurait englober la totalité des gens qui s’en réclament. Il y a des gens honnêtes parmi eux ; ils ne sont pas si nombreux mais ils existent.

Cela posé, Monsieur Lapide n’avait pas le droit moral de publier un tel schéma. Mais il a fait pire : quand il fut morigéné, voire rabroué par ses colistiers, il a rétorqué que c’était de l’humour ; et constatant que ses propres colistiers n’appréciaient vraiment pas ce type d’humour (certains qui se sont sentis visés ont même brandi l’accusation d’antisémitisme, ce que je ne fais pas pour ma part), il a décidé de republier le même texte, s’attirant alors la totale réprobation de ses amis. Eyt surtout desservant ses propres intérêts, ce qui signifie qu’il a moins de chance de devenir ce qu’il rêve de devenir…

Ce qui me frappe, c’est qu’on ait pu parler ainsi du judaïsme dans une campagne électorale au sein d’un Etat qui se dit juif… Mais ce n’est pas tout. Il y a bien pire. Ce sont les arrière-pensées de ce personnage : selon certains observateurs, notre homme commençait à se demander s’il n’allait pas être victime d’un lâchage de la part de ses propres compagnons qui trouvent son comportement bien embarrassant, voire néfaste et nuisible à leur cause. Il aurait donc chercher à leur forcer la main.

En effet, ce ne serait pas la première fois que les élections israéliennes connaîtraient un retentissant coup de théâtre : oublier l’alliance avec M. Lapide troquée contre un maroquin ministériel… Partant, la saillie de M Lapide serait une sorte de coup de frein donné à une tentative de le marginaliser , lui qui rêve de se venger de son rival, l’actuel Premier Ministre.

Il est un second élément qui explique cette soudaine effervescence de M. Lapide, c’est la campagne menée par un autre rival, M. Avigdor Liberman qui a les mêmes têtes de turc : les religieux, les rabbins et leur halakha. Ce dirigeant politique, chef du parti russophone, veut protéger l’état d’Israël des empiétements (réels ou supposés) des religieux qui essaient d’exercer une sorte de coercition religieuse (kefiya datit) sur la vie publique. M. Liberman a dit, sans se rendre compte qu’il émettait une énormité, qu’il voulait le judaïsme sans la halakha. Chacun a le droit de dire ce qu’il veut, même de tenir des discours d’analphabètes, car, comment aurions nous pu préserver la cohérence de ce peuple, disséminé sur toute la surface du globe, sans un minimum de discipline et de ciment unitaire. Et c’est justement la halakha qui a joué ce rôle car, autrement, comment un Juif moldave aurait pu savoir, comprendre ou admettre qu’il est le frère d’un Juif du Maroc, de France ou du Brésil ? C’est la halakha qui a réussi ce miracle, même si, personnellement, je pense que la doctrine religieuse ne doit pas trop peser sur la vie quotidienne des gens. Il faut qu’il y ait des transports en commun le samedi, en moindre nombre mais il en faut ; on ne peut pas imposer l’arrêt des chantiers le jour du sabbat, car si on le faisait, nul n’aurait le droit de faire un barbecue sur sa pelouse ou dejouer au ballon sur les plages… ce jour là.

Il semble donc que Lapide et Liberman dont les deux noms commencent par la même lettre se fassent concurrence et chassent dans le même vivier. C’est à qui en dira le plus pour capter les électeurs séduits par la laïcité, laquelle doit aussi avoir sa place dans ce pays. La seule chose que je leur reproche est d’avoir fait du joyau du peuple juif, la Tora de Dieu, un banal enjeu électoral, une sorte de punching ball. Ce n’est pas à la mesure de ce que la Tora a fait pour le peuple d’Israël ni à la hauteur de sa dignité inégalée.

Que ces deux Messieurs sachent qu’il ne faut pas juger de l’importance de la Tora en se fondant ce qu’en ont fait certains qui l’ont largement instrumentalisée et s’en font les représentants auto-proclamés et les défenseurs zélés. Certes, la vie est dure en Israël, il faut sans cesse se battre pour tout mais le drame est que l’on se bat contre d’autres juifs, comme soi-même. C’est là un dilemme moral .

Alors que faire ? Cesser ces attaques infâmes contre la Tora qui s’en trouve dévalorisée et avilie. Je veux bien croire que tant Lapide que Liberman se sont laissés aller à cet étrange comportement dans le feu d’une campagne électorale d’une rare violence. Mais la Tora est le trésor intouchable du peuple juif. Que l ’on rejette peu ou prou les interprétations ou la pratique qu’en donnent certains religieux, je le conçois aisément mais sans tous ces débordements coupables.

Je ne suis pas très optimiste sur la manière d’être juif dans ce Etat qui se dit pourtant l’Etat des juifs. Me revient en mémoire un verset des Proverbes qui peut faire office de synthèse :

‘al kol ha-pecha’im tekhassé ahava ( l’amour couvre toutes les fautes).

Ces Messieurs devraient s’inspirer d’un si haut exemple qui nous vient du plus haut de la spiritualité juive laquelle a déjà survécu à tant de choses. Ets survivra aussi à cette campagne.

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