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Le périlleux numéro d’équilibriste d’Emmanuel Macron au Liban

A-t-on jamais vu pareille inconscience ? A-t-on jamais vu pareille initiative surréaliste de la part d’un homme d’Etat, et qui plus est, d’une puissance comme la République française ? Le numéro que Emmanuel Macron est allé jouer au Liban, pays dirigé par des mafieux et des chefs de guerre (et ce, de l’avis même de la majeure partie de ses citoyens ), devant les caméras du monde entier, illustre bien l’immaturité du personnage qui n’a toujours incarné la fonction présidentielle mais se comporte comme un acteur jouant un rôle sur une scène théâtrale, donc internationale ?

De nombreux commentateurs dotés d’une expérience reconnue l’avaient déjà diagnostiqué chez ce personnage qui n’a pas idée du tragique de l’Histoire ; rendez vous compte, il se rend dans un pays étranger, qui exerce souverainement son autorité dans son territoire national, même si le bien-être de ses nationaux est vraiment le cadet de ses soucis, et dit publiquement qu’il leur lance une sorte d’ultimatum, qui ne dit pas son nom : vous réalisez les réformes dont le pays a besoin, quant à moi, je reviens inspecter la situation dans moins de trois semaines, à savoir le début du mois de septembre de cette même année…

Disons le crûment, on croit rêver : un système mafieux et clanique qui perdure depuis tant de décennies, une autorité de l’Etat (qui n’en est pas un) bafouée par un groupe terroriste qui superpose son action à celle des autorités dites légales, à défaut d’être légitimes ,  ce même groupe terroriste qui décide à lui seul de jeter tout le pays dans une guerre sanglante et destructrice avec le pays voisin, tout cela bien considéré, comment imaginer qu’un chefd d‘Etat étranger puisse, ne serait-ce, que décider du début de l’ombre d’une réforme, puisque les bénéficiaires du système ne renonceront jamais à leurs juteux dividendes ? Et là-bas, l’exemple vient de très haut.

Mais il y a plus grave, et dans ce contexte on doit bien créditer Macron de courage ou, à défaut, d’inconscience : il y a plus de quarante ans, c’était la Syrie et son bras armé au Liban, le Hezbollah, qui firent sauter des baraquements de plusieurs de marines américains et de parachutistes français.

Pense t il que cette fois ci, le Hezbollah va soudainement être touché par la Grâce et renoncer à son pouvoir sur tout le Liban ? Ces gens en ont vu d’autres, et cela ne les gêne guère de lancer des menaces, voire des attaques, contre leur puissant voisin du sud ?

Macron se berce d’illusions. Mais il doit se méfier en n’exposant pas le territoire national français et notre contingent de la Finul à des représailles sanglantes de la part du Hezbollah, lequel est au centre du problème.

Prenons exemple sur le procès des assassins du Premier Ministre Rafic Hariri , l’ami de Jacques Chirac. Le tribunal pénal international pour le Liban a identifié plusieurs agents du Hezbollah qu’il a convoqués mais cet ordre est resté lettre morte. Macron croit-il que cette fois ci, il obtiendra gain de cause en réclamant une enquête internationale ? Tout le monde sait, au Liban et ailleurs, que ce ne sera pas le cas. Non pas que cette exigence n’aille pas de soi, mais pour la bonne raison que le président français n’est pas en mesure de dicter ses exigences au Hezbollah…

Il est presque sûr que le Hezbollah  a stocké des armes et des explosifs dans ce site portuaire qui est au contre de la capitale, afin de les soustraire à une riposte israélienne en cas d’attaque lancée contre l’Etat hébreu… Par contre, il faudrait exiger du mouvement irano-chiite qu’il indique au plus vite les autres sites civils où il a stocké ses armes, notamment dans lieux densément habitués, tout en sachant que les Israéliens n’oseraient jamais bombarder des civils…

Cette exigence, menée de concert avec l’ONU, a des chances d’aboutir, sauf en cas de veto de la Chine ou de la Russie. L’objectif est, certes, moins ambitieux mais réaliste, encire que difficilement réalisable.

Dans un précédent éditorial, je signalais que le Hezbollah est au centre du problème, il est l’alpha et l’oméga du problème libanais. Aujourd’hui, le pays n’est plus au bord du gouffre, il y est et ce sera très difficile de le tirer de cette mauvaise passe : un pays au bord de l’implosion, en défaut de paiement, bloqué par le FMI en raison de sa nature mafieuse, avec une souveraineté qui n’est que l’ombre d’elle-même, puisque, de l’aveu même des forces armées du Liban, c’et le Hezbollah qui possède le  meilleur  équipement.

Si, comme je l’espère, l’enquête de la catastrophe se fera sous l’égide de l’ONU, que va faire le Hezbollah pour se disculper alors qu’il est compromis  jusqu’au cou dans ce drame ? En fait, il faudrait que le peuple libanais se soulève et mette dehors les incapables corrompus qui le gouvernent, si ce mot a encore un sens sous cette latitude ?

J’en viens à présent à ce qui est possible et réalisable : il faudrait créer une alliance internationale qui protégerait ce peuple qui verra se dresser contre lui les hommes et les armes du groupe terroriste.

La France qui porta  en 1943 le petit Liban sur les fonds baptismaux  se dit obligée de le défendre et de le maintenir envie. Mais pour cela, il eût fallu réagir il y a bien longtemps. Mais quand on prend connaissance du communiqué du ministre français des affaires étrangères, on a envie de rire. Il faut dire que depuis fort longtemps, le Quai d’Orsay se nourrit de paradoxes de plus en plus savoureux. On dirait qu’il aime cela ; cacher son impuissance criante derrière un voile diplomatique des plus ridicules. Et la récente visite du ministre français n’y a rien changé. La France a le droit de défendre le Liban mais n’a pas de droits sur le Liban : c’est tout le problème.

Le problème c’est qu’aujourd’hui Macron ne peut plus reculer ni rester inerte. Déjà, la presse nationale découvre que ce tintamarre médiatique au cœur de l’été,  est une tentative maladroite d’occulter la crise économique et financière majeure qui va secouer la France. Et le drame de Beyrouth, avec qui nous présentons notre solidarité totale, et avec le peuple libanais, ne pourra pas longtemps occulter ce qui va se passer en France en automne lorsque les entreprises se mettront à licencier en masse.

L’actuel chef de l’Etat serait mieux inspiré de prendre à bras le corps les problèmes intérieurs  et cesser de se réfugier dans l’international. Même si la solidarité avec le Liban s’impose et doit devenir une cause non seulement nationale mais universelle.

Nul ne fera confiance aux dirigeants libanais actuels pour mener les réformes dont le pays a bien besoin. A-t-on jamais vu un pouvoir scier la branche sur laquelle il est assis ? Me revient en mémoire le titre d’un beau livre de Jacques Soustelle, Aimée et souffrante Algérie ; J’ai envie de dire Aimé et souffrant Liban.

 

 

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