Il est hélas des vérités simples que l’on ne découvre qu’à la suite de grands drames nationaux alors qu’il suffisait, pour les découvrir, de se départir quelque peu de la haine et de la méchanceté qui faussent le jugement et rendent aveugles. C’est hélas ce qui vient de se produire au Liban auquel nous exprimons nos sincères condoléances et notre soutien matériel et moral. Ce que viennent de faire la plupart des états du monde, en tête la France, suivie de près par l’Etat d’Israël. L’Etat juif, en guerre avec son voisin du nord, propose son aide ; notamment dans le traitement des blessés qui se compteraient par milliers…
Ce qui s’est passé au cœur même de la capitale libanaise fera l’objet d’une enquête serrée dans les semaines qui viennent mais l’on sait déjà en gros, les causes de ce cataclysme qui n’est pas naturel ni terroriste. Bien sûr, certains ne manqueront pas d’en revenir à leur thème favori impliquant l’Etat juif dans tout ce qui ne va pas chez eux ou dans d’autres pays voisins.
Le problème majeur du Liban, c’est la négation permanente de sa souveraineté (al siyyada al labnanaiya) sur le sol national, et cela ne date pas d’hier. Pourtant, ce petit Etat illustrait durant peu de temps hélas, la possibilité pour des êtres de confessions différentes, de vivre dans le même espace, en harmonie les uns avec les autres. C’est ce qu’exprimait un défunt cardinal de la Curie romaine, son éminence le cardinal Tauran : Plus q’un pays, le Liban est un message…
Un message que tous les etats arabo-musulmans de la région n’ont pas voulu entendre. A quand remonte ce mépris de la souveraineté libanaise ? Au moins aux accords de Taéf lorsque ce pauvre petit pays, rongé par la corruption et le népotisme, sans même parler du clientélisme confessionnel, fut contraint d’accepter des conventions qui limitaient fortement sa marge de manœuvre. Les Palestiniens, véritable état dans l’Etat, se voyaient accorder le droit de porter les armes dans le pays, de s’en prendre à Israël à partir du sol libanais et d échapper à tout contrôle… Depuis ce temps là il y eut aussi les séquelles de la guerre civile dont ce pays, tel un phénix renaissant de ses cendres, avait enfin réussi à s’extirper.
Mais depuis un certain nombre d’années, un danger autrement plus important que ne l’étaient jadis les Palestiniens, s’est durablement installé et renforcé dans le pays, profitant du désordre constitutionnel ambiant et de la faiblesse endémique des forces de sécurité et de l’armée. Il s’agit de cette armée illégale, autoproclamée la résistance à l’ennemi sioniste (sic), le Hezbollah. Porté à bout de bras par un Iran chiite qui a fait du Liban un champ de manœuvre, ce parti dit de Dieu justifie son existence par une indispensable confrontation avec l’Etat sioniste.
Or, nous apprenons par des mises en garde répétées d’Israël que cette milice irano-chiite met en péril la sécurité des civils libanais en disséminant ses dépôts d’armes dans des zones habitées de la capitale, comptant par cette manœuvre, dissuader l’Etat hébreu de réagir à ses attaques… Ce qui s’est passé hier au cœur même de la ville de Beyrouth est une conséquence indirecte de cette faiblesse de l’Etat. Il s’agit incontestablement d’un accident, mais d’un accident qui dérive d’une incurie due à l’absence d’une autorité étatique forte et déterminée. Ces tonnes de nitrate n’avaient rien à faire dans un port réputé civil. Or, récemment encore, le Premier Ministre israélien dénonçait les sites civils occupés par le Hezbollah pour dissimuler ses armes afin les mettre à l’abri. Or, si les autorités libanaises avaient un droit de regard, elles n’auraient sûrement pas laissé une telle poudrière au cœur de la capitale…
Partant, le vrai problème du Liban, ce n’est pas Israël mais bien cette milice armée et illégale irano-chiite qui entend s’imposer comme une force incontournable sur la scène politique. Il faudrait que ce peuple libanais qui a été martyrisé une nouvelle fois décide enfin de faire entendre raison à cette milice qui a fait du pays un protectorat iranien qui ne dit pas son nom.
Imaginez ceci, qui est, du reste, inconcevable par un entendement sain : une milice, inscrite sur la liste des mouvements terroristes par l’ONU, qui entraîne le pays où elle se trouve dans des affrontements frontaliers réguliers avec un pays voisin, Israël, qui se bat depuis des années, dans la Syrie voisine, montent des opérations d’infiltration en Israël, se livrent à toutes sortes de trafics, etc…
Et comme un malheur ne vient jamais tout seul, ce dysfonctionnement s’accompagne d’une crise économique et financière sans précédent, condamnant des millions de Libanais à vivre sous le seuil de pauvreté. SI vous ajoutez à tout cela la crise sanitaire, vous découvrez une situation des plus explosives. Même le FMI, organisme international indépendant, refuse de verser au Liban des sommes pourtant votées, au motif très fondé que le Hezbollah pourrait s’en emparer. On avait dit jadis la même chose concernant certains équipements destinés à l’armée libanaise mais avaient fini dans les camps du Hezbollah.
Qui pourrait encore nier que c’est le parti dit de Dieu qui est le cœur du mal frappant le pays du cèdre ? Qui pourrait affirmer que c’est l’Etat juif qui menace le Liban ? Il faut espérer que cette dernière catastrophe soit le signal d’un redressement, d’un renouveau, au cours duquel le Liban reprendra en main son destin et conduira une politique profitable aux forces vives de la nation. Ce sera difficile, mais ce n’est pas impossible, ce n’est pas la quadrature du cercle.
Le Hezbollah doit cesser d’imposer au Liban un état de belligérance avec son puissant voisin du sud. Ce pays risque d’être gêné dans son action pendant au moins toute la décennie à benir. Il doit profiter de ce grand élan international pour remettre de l ‘ordre dans la maison : ahl al-bayt ont plus de droits que ceux qui servent une puissance étrangère. Le Liban doit pouvoir choisir son camp, qui n’est pas celui de la confrontation stérile avec son voisin israélien. On doit laisser le Liban accepter l’aide d’Israël qui propose des soins dans ses hôpitaux. Il l’a déjà fat pour les réfugiés syriens avec un grand succès.
Formons le vœu sincère que le pays du cèdre sorte renforcé de cette terrible crise. Le Hezbollah doit rentrer dans le rang, faute de quoi le Liban sera de nouveau tenu pour responsable de ce qui vient de chez lui. Après tout, l’ONU a réussi à éjecter du Liban la puissante armée syrienne d’El Assad. On doit pouvoir en faire autant avec le Hezbollah.
L’Etat d’Israël est loin d’être le problème majeur du Liban.