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Christophe Pébarthe, Athènes, l’autre démocratie. Ve siècle av. J.C. Passés / Composés.

  

Christophe Pébarthe, Athènes, l’autre démocratie. Ve siècle av. J.C. Passés / Composés.

 

Depuis quelque temps, le modèle démocratique de la Grèce antique fait débat : aurions nous vraiment aimé vivre à Athènes au siècle de Périclès ? Ne nous a-t-on pas occulté certains défauts quasi-rédhibitoires du berceau de la démocratie ? Que penser de la place faite aux métèques, pouvant cohabiter avec les citoyens à part entière de la cité grecque sans avoir les mêmes droits qu’eux ? Alors, Athènes, le modèle même de la société inégalitaire ? Autant de questions âprement débattues par les partisans et les adversaires du modèle grec dans sa recherche du bonheur humain...

  

Christpphe Pébarthe, Athènes, l’autre démocratie. Ve siècle av. J.C. Passés / Composés.

 

 

Au moins deux critiques ont retenu l’attention des historiens pour ce qui est des restrictions apportées à l’exercice plein et entier de la démocratie sur place : le statut de la femme qui peut participer à l’expression démocratique sans jamais peser sur le pouvoir, et enfin, le statut de l’esclave.

 

On a même procédé à l’étude d’un contraste en rapprochant l’idéal prophétique de l’humanité, ouvert sur l’universel, à la fermeture prônée par le régime athénien parlant de barbares s’agissant des hommes n’appartenant pas à la cité grecque. Alors que les vieux prophètes hébreux s’intéressaient, à la même époque aux hommes vivant sur les îles les plus éloignées, aux confins des océans, Aristote qualifiait les esclaves d’outil doté de la parole... Impossible de combler un tel fossé. Les prophètes ont porté au pinacle l’idéal de l’universalité humaine. La doctrine athégienne n’a pas suivi  la même évolution puisque le souci éthique de l’Autre n’y est pas né. Mais cela n’exclut pas totalement la recherche d’un ordre humain d’équité.

 

Ce binôme formé par  le demos et  l’esclavage pose problème. Et on peut constater l’existence de deux écoles, l’une, la moins répandue, affirme que la nature même de la cité grecque rendait nécessaire l’existence d’une main d’œuvre réduite en esclavage ou au travail servile ; la première des qualités de l’homme grec était la liberté, la volonté d’être un homme libre. L’économie devait fonctionner dans un tel cadre, même au prix d’une insoutenable contradiction formée par ce couple inattendu. L’autre école opte pour une autre approche qui ne met pas l’accent sur l’esclavage considéré comme une réalité économique incontournable.

 

J’avoue ne pas être convaincu de la justesse d’une telle vue. La citoyenneté pouvait, selon eux, se passer d’une telle déchéance de l’homme. Pour la Bible, autre région spirituelle, l’humanité est diverse et variée mais son origine est partout la même. C’est même un débat au sein de la littérature talmudique. Les Docteurs des Écritures se demandent pour quelle raison Dieu n’a créé qu’un seul Adam dans le livre de la Genèse. Sa toute-puissance lui aurait permis d’en créer une multitude innombrable. La réponse est la suivante : afin que nul ne puisse dire à son congénère que son sang est plus rouge que celui des autres qui dériveraient d’un Adam numéro 10 ou 20 etc... Ce qui revient à couper l’herbe sous les pieds de toute théorie raciste...

 

 

 

Pour revenir au sujet spécifique de cet ouvrage, je relève une remarque très fine de Marc Bloch qui mettait en garde contre les confusions induites par la traduction de Demokratia par démocratie : l’homonymie n’est pas synonymie... Ce qui est très bien vu. Peut-être parlons de tout autre chose et on aurait affaire à de faux amis.

 

Mais alors, la démocratie athénienne se caractérise t elle par le pouvoir du peuple ou est elle une AUTRE démocratie ? Tant d’idées se nouent autour de ce même mot : directe ou représentative ? Cela ne veut pas dire grand-chose, le pouvoir du peuple pudique dans toute société structurée la masse des gens délèguent leur pouvoir, en quelque sorte, à une poigné d’hommes chargés d’administrer la société et de rendre la justice.

 

Voici une citation de l’introduction qui montre un aspect crucial de la question : Dès lors, le principe premier de la démocratie athénienne n’est pas la séparation des pouvoirs, mais le contrôle direct par le demos de la sphère politique dans laquelle les décisions valant pour le collectif sont prises, ainsi que celles qui engagent une décision dudit collectif.

 

Quelle est l’origine de la démocratie athénienne, sans même tenir compte des différentes acceptions de ce terme ? A-t-elle été instaurée à la suite de l’effondrement d’une période marquée par la tyrannie, ou fut-elle importée de l’étranger, par exemple selon Clisthène, homme politique né vers 570 avant J ?C. ? Le témoignage de Hérodote est ici examiné de près, même si certains historiens ont reproché au grand historiographe grec une certaine proximité aux Achéménides, ce qui aurait nui à la fiabilité de son discours.

 

L’expression «le gouvernement (kratos) du peuple par le peuple (demos)» pose une grande quantité de questions : à partir de quel nombre, à partir de quel quorum, acquiert on la certitude que le demos est vraiment représenté et peut émettre des réglementes ayant valeur de loi ? Et dans ce cas, obtenons nous la certitude de parler au nom du peuple ?

 

Le recours à la tragédie d’Eschyle Les suppliantes est très éclairant. Il faut rechercher la provenance (si elle existe vraiment) de l’articulation de ces deux notions demos et kratos. Selon toujours Hérodote,  la démocratie est un régime politique institué par  le demos et non concédé par un tyran abandonnant son pouvoir ou obtenu par une intervention étrangère...

 

Je pourrais reproduire ici de nombreuses citations d’un livre si riche et si bien documenté. Mais cela augmenterait déraisonnablement les dimensions d’un modeste compte-rendu. En revanche, je ne dissimulerai pas que le non-helléniste que je suis a beaucoup appris de ce beau livre . En dépit des interrogations, des incertitudes et même des ambiguïtés, la Grèce reste le berceau de notre culture européenne.

 

 

 

 

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