Du chékét au chalom, ou la paix introuvable... par Maurice-Ruben HAYOUN
Du chékét au chalom, ou la paix introuvable... par Maurice-Ruben HAYOUN
Les observateurs attentifs des mutations politiques en Israël auront relevé ce mouvement dialectique qui contraint t l’état d’Israël à naviguer entre une paix ardemment souhaitée et un calme passager condamné à être précaire... On le voit en considérant les déclarations des dirigeants israéliens qui s’étaient résignés à cette douloureuse situation, dictée par les circonstances géopolitiques du moment. Ils évoquent constamment le chékét, le calme, la tranquillité, et pratiquement jamais le terme chlalom, car ils savent qu’en l’état actuel des choses, c’est tout ce que l’on peut espérer obtenir. Ce qui renvoie la paix véritable aux calendes grecques.
Jusqu’ici, l’état juif a été forcé d’accepter une double épée de Damoclès : au sud, le Hamas avec ses bombardements erratiques, et au nord, le Hezvollah dont les armements étaient présentés dans des dimensions fantasmagoriques, plusieurs centaines de milliers, d’ogives, ce qui est largement exagéré. On observe aujourd’hui qu’Israël s’est mis en tête de desserrer l’étau qui l’emprisonnait et menaçait de le faire disparaitre. Cette mutation est entièrement nouvelle, il s’agit d’un changement quasi copernicien : au terme de toute une année de guerre d’usure entretenue par la milice chiite libanaise, Israël a manifesté ce changement de politique consistant à jouer à une sorte de ping-pong délétère. On ne se rend pas bien compte de ce que cela signifie : dès le lendemain du 7 octobre, la milice chiite bombarde l’état juif chaque jour que Dieu fait.
La nouvelle attitude d’Israël rappelle des déclarations d’anciens dirigeants selon lesquels la guerre d’indépendance n’et pas allée à son terme (milhémét hashirrour lo nigméra). Le général Ariel Sharon faisait partie des tenants de cette thèse.
On réalise la portée de ce changement stratégique qui provoque un réalignement complet de Tsahal : sans le moindre avertissement formel, les renseignements militaires du pays ont éliminé une nombre impressionnant t de chefs militaires du Hezbollah, privant cette milice chiite de ses cadres et désorganisant la résistance face à Tsahal... Ce développement inhabituel a époustouflé (sic) les observateurs. La suprématie israélienne dans les airs et au niveau des actions clandestines au Liban même, sont incontestables. Tsahal a dû tenir de compte de plusieurs impératifs : l’équilibre régional et l’économie en vies humaines et la limitation drastique des dommages collatéraux : avant chaque opération militaire, un juriste examine la question afin d’éloigner tout danger de crime de guerre...
Cela concerne le Liban qui n’a plus, depuis des lustres, la capacité d’affirmer sa souveraineté face à une milice surarmée et qui fait la loi dans le pays. Derrière ce changement radical de la part d’Israël, on sent la volonté de l’état juif d’en finir avec ses ennemis postés à ses frontières. Ce e-‘est plus un échange de tirs équilibrés, mesurés, la routine (chigra), quoi ; désormais, c’est le refoulement de la milice chiite a qui est recherché au niveau du fleuve Litani afin de permettre le retour des habitants du nord chez eux, avec des garanties de sécurité absolue. Comme l’a dit l’actuel Premier ministre français, la sécurité d’Israël n’est pas négociable. Or, jusqu’à ce moment, la milice chiite ne veut rien entendre.
A ce sujet, qu’il me soit permis d’émettre une critique à l’égard du gouvernement israélien qui a consenti à évacuer son propre territoire au lieu d’exiger cette opération chez son voisin. Certes, il fallait parer au plus pressé en mettant sa propre population civile à l’abri. Aujourd’hui, Tsahal envisage une véritable opération terrestre pour repousser la milice chiite à une distance convenable de la frontière. Israël ne peut plus céder ou remettre à plus tard le retour des habitants évacués. Ils sont plusieurs dizaines de milliers à attendre depuis presque une année...
Toutefois, l’armée israélienne n’est pas restée les bras croisés pendant toute cette année de guerre d’usure : elle a accumulé une grande quantité de renseignements militaires qui lui ont permis de lancer les hostilités à sa manière, ce qui a entièrement surpris le Hezbollah.
Le Moyen Orient va changer, la milice chiite devra s’y faire.. Tant le Hamas que la milice chiite ont fait de faux calculs, en pensant dans les deux cas que l’Iran interviendrait à leurs côtés. Cela n’est pas arrivé et n’arrivera pas car la seule préoccupation des mollahs est de préserver leur arsenal nucléaire. Et puis, il y a les faiblesses inhérentes au régime de Téhéran qui pourraient conduire à sa chute, en cas de confrontation militaire directe avec Israël.
Les états arabes de la région se réjouissent in petto de l’offensive israélienne. L’Arabie saoudite a maintes fois tenté de s’introduire au Liban et de bloquer l’influence iranienne. Les résultats ont été décevants. Il faudrait une meilleure situation dans l’armée libanaise. Or, il se dit que la milice chiite dispose d’un armement plus solide que celui de l’armée nationale, laquelle est composite à l’instar de la société dont elle est issue.. Rappelons aussi que le pays du cèdre n’a a toujours pas de président et que sa situation socio-économique est grave.
Il ne faut plus mettre des rustines, il faut, aujourd’hui imposer une vaste vue d’ensemble qui passe par la restauration de la souveraineté libanaise. Or, il ne semble pas que le pays du Cèdre ait un différend territorial avec l’état hébreu. L’entrée en lice de l’Iran depuis quelques années a tout compliqué en empêchant toute tentative de règlement. Le problème demeure le même : comment faire ? Comment réussir à chasser les fauteurs de guerre du pays ? Il y a lieu d’être pessimiste, hélas. L’Iran a satellisé la Syrie, l’Irak et le Liban... Mais la liste n’est pas exhaustive.
Ce n’est pas demain que le chalom va remplacer le shékét