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Vu de la place Victor-Hugo - Page 1407

  • LA NOSTALGIE DES JUIFS DE TUNISIE…

    LA NOSTALGIE DES JUIFS DE TUNISIE…
        Sous la plume de Madame Florence Beaugé, le journal Le Monde de ce Week end consacre toute une page (la page 3) au pèlerinage qu’effectuent les juifs de Tunisie, chaque année, à la fin de ce mois de mai, dans une synagogue fétiche, réputée la plus ancienne d’Afrique, la synagogue dite la Ghriba de Djerba… La traduction de ce terme arabe veut dire l’Etrangère ou l’Esseulée…
        On lit dans cette page la nostalgie de ces juifs originaires de Tunisie qui n’oublient pas le pays qu’ils durent quitter lorsqu’ils se sentirent «indésirables», notamment à la veille de la guerre des six jours.  On pensera ce que l’on voudra de ce retour aux sources, il n’en est pas moins irrépressible et impérieux. Alors pourquoi ces hommes, ces femmes et ces enfants se rendent-ils sur lieu qui fut d’ailleurs le théâtre d’un attentat sanglant qui coûta la vie à plus d’une dizaine de touristes allemands ?
        Comme toujours, c’est la légende, qu’il ne faut jamais bannir, qui explique cette renommée : dans cette synagogue miraculeuse que certains affabulateurs font remonter à l’époque prétalmudique les prières des orants et des orantes sont toujours exaucées. Je sais que c’est la foi qui sauve. Mais il faut écouter ces femmes (surtout elles !) dire que les prières de la Ghriba leur ont fait rencontrer l’âme sœur, les ont rendues enceintes, ont guéri leurs parents atteints d’un cancer ou d’une autre maladie grave.
        Mais ce qui plaît par dessus tout à ces nostalgiques juifs, c’est de fouler le sol de leurs ancêtres, nés et morts sur cette terre tunisienne… Un esprit rassis dirait que, d’un point de vue géo-politique, la Tunisie a tout intérêt à donner d’elle cette image de terre d’accueil, de terre de tolérance, d’hospitalité et de fraternité. Derrière ce supposé calcul politique, il y aussi une grande chaleur humaine.
    Et par les temps qui courent, ceci est crucial entre Juifs et Arabes musulmans.

  • MAI 68 ET l’Eglise CATHOLIQUE

     

     

      MAI 68 ET l’Eglise CATHOLIQUE
        Dans un très bon article du journal Le Monde, brillamment écrit et bien documenté, notre ami Henri Tincq, évoquait l’impact de mai 68 sur l’église catholique. Et il citait René Raymond, le grand historien catholique et membre de l’Académie Française, qui disait que les événements de l’époque avaient fait trois victimes (au moins) : l’autorité en général, la parti communiste et … l’église catholique ! Cette trinité ou cette trilogie peut étonner et pourtant elle reflète la profonde sagacité du grand historien.
        Pilier de nos institutions, même si l’influence qu’elle exerce est incolore ou inodore, l’église catholique a été la cible de bien des attaques, y compris de la part de certains clercs et de prêtres qui avaient fait leurs vœux mais qui ne purent rester au sein d’un système qui restait sourd à des revendications apparemment irrésistibles : l’importance pour l’âme humaine d’avoir une sorte de religion privée, individualisée, non codifiée, sans formulation liturgique fixée  une fois pour toutes ; la volonté de certains prêtres de pouvoir opter pour le célibat ou d’avoir une vie affective et enfin la sexualité qui, on se le rappelle, fut l’axe central des revendications libertaires des étudiants.
        Et où en sommes nous, quarante ans plus tard ? L’église (Dieu merci, est toujours là) même si elle est affaiblie et que la crise des vocations est perceptible, après avoir été enrayée. Les religions sectaires, c’est-à-dire ces  petites religions concoctées à la va vite ont toutes disparu et enfin toutes les réformes ardemment souhaitées par les uns et les autres se sont comme évanouies…
        C’est un peu triste mais c’est ainsi. Des institutions vieilles de plus de deux mille ans ne disparaissent pas comme cela, et des nouvelles formations avides de les remplacer ne tiennent pas la route longtemps. Cela fait penser à ces jeunes qui faisaient de la E-économie et entendaient racheter les grosses boîtes… Un an ou presque après l’embellie, les télévisions nous montraient leurs bureaux déserts avec des téléphones débranchés et des comptes bancaires au rouge dans tous les établissements qui y avaient pourtant cru … C’est souvent breau la révolution, mais cela ne tient pas…

     

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  • L'affaire d'Outreau: la justice en question

     

    L’affaire d’Outreau

    Trois ans avant sa mort et au terme d'une vie bien remplie, Ernest Renan écrivait, en guise d'introduction à son Examen de conscience philosophique (1889), les lignes suivantes :
    «   La production de la vérité est un phénomène objectif, étranger au moi, qui se passe en nous sans nous, une sorte de précipité chimique que nous devons nous contenter de regarder avec curiosité. »

    La quête de vérité gît au fondement même de toute volonté d'équité. Le séisme d'Outreau, aux conséquences si lourdes, montre combien on s'est écarté, volontairement ou pas, de l'impératif catégorique de la justice : identifier et punir les coupables, en épargnant les innocents.
     

     

                        L’affaire d’Outreau

    Trois ans avant sa mort et au terme d'une vie bien remplie, Ernest Renan écrivait, en guise d'introduction à son Examen de conscience philosophique (1889), les lignes suivantes :
    «   La production de la vérité est un phénomène objectif, étranger au moi, qui se passe en nous sans nous, une sorte de précipité chimique que nous devons nous contenter de regarder avec curiosité. »

    La quête de vérité gît au fondement même de toute volonté d'équité. Le séisme d'Outreau, aux conséquences si lourdes, montre combien on s'est écarté, volontairement ou pas, de l'impératif catégorique de la justice : identifier et punir les coupables, en épargnant les innocents.

    Or, existe-t-il un domaine où la découverte de la vérité est plus cruciale, plus vitale que le domaine judiciaire ? Certes, non. Mais qui est en charge de cette redoutable recherche sinon un être humain qui nous ressemble en tout point mais que ses fonctions investissent d'un pouvoir redoutable ?  Le juge d'instruction.

    En dépit de mises en cause à la fois massives graves et récurrentes de quelques magistrat, il convient, pour élever le débat, de s'interroger sur toutes les circonstances qui ont rendu possible cette énorme erreur judiciaire (onze personnes injustement détenues pendant des années) et de replacer le fonctionnement de la justice dans son véritable contexte, celui de la société contemporaine.

    Par-delà les erreurs manifestes (et j'en veux pour preuve le cas de ce jeune détenu qui induit délibérément en erreur le juge en le lançant sur les traces d'un cadavre imaginaire…), on ne saurait concentrer toutes les critiques sur un seul individu, même si son rôle dans ce naufrage judiciaire est incontournable.

    On ne rend pas la justice dans un espace éthérique ni en vase clos. Il existe des facteurs extérieurs qui déterminent, qu'on le veuille ou non, le prononcé de tel verdict ou de tel autre. Quand une société, accablée de mille maux et vacillant sur ses fondements, est ébranlée par des scandales de pédophilie, de meurtres en série, de séquestrations d'enfants et de crimes de toutes sortes, la pression des media et de l'opinion est si forte que nul ne peut, en définitive, se soustraire à l'esprit de son temps.

    Pourquoi formuler une telle exigence à l'endroit exclusif des juges ?  Faudrait-il leur interdire la lecture des journaux, l'audition des radios et  des programmes télévisuels ? L’évidence s’impose à tous : Dans le verdict d'un juge se reflète nécessairement un certain état de nos sociétés.

    Or, que voyons-nous ? Une démission générale de toutes les sources traditionnelles d'autorité qui sont soit systématiquement attaquées soit littéralement niées : familles, écoles, églises, sociétés philosophiques, aucune institution ne résiste à cette déferlante qui atteint nos sociétés dans leurs fondements mêmes. Plus rien, ou presque, n’a de sens.

    Comment s'étonner, dès lors, de l'embrasement de nos banlieues puisque la cellule familiale, berceau indispensable de la pensée et première éducatrice des enfants, si tous les modèles, tous les paradigmes sont réduits à néant. Aux côtés de ce nihilisme qui ne veut pas dire son nom, on perçoit l'émergence d'un véritable anitinomisme, une attitude qui consiste à nier frontalement toute idée de loi.  Or cette même loi  se veut à la sage et pérenne : c’est la sagesse du législateur qui lui confère cette pérennité puisqu’elle ambitionne de fonder en droit l’équité. Depuis quelques années déjà,  les majorités parlementaires varient dans leur choix fondamentaux en fonction d’une opinion publique, d’une vox populi, nécessairement versatile mais propre à déterminer, lors des prochaines consultations, la réélection ou la défaite des parlementaires… Ceci explique bien des choses : les mêmes qui se plaignent de l’insécurité croissante et réclament une répression accrue (en l’occurrence la généralisation, par exemple, de la détention provisoire) s’émeuvent des conditions de celle-ci  et étalent leur indignation lorsque la justice commet des faux pas comme celui d’Outreau…

     Est-ce la bonne méthode ? Si les parents ont perdu tout prestige aux yeux de leurs enfants et que ces derniers se cherchent désespérément d'autres modèles qu’ils ne trouvent plus, comme jadis, à la maison ou dans leur environnement immédiat, comment leur transmettre ces quelques valeurs qui ne se transmettent –originellement- que de père à fils et de mère à fille ?
    A la base de la profonde crise actuelle que nous traversons se trouve une incertitude qui affecte gravement tous les secteurs de la vie sociale, ce qui nous conduit immanquablement à la préparation des magistrats. Or, les juges eux-mêmes reçoivent une formation juridique qui ne les arme pas suffisamment bien pour affronter les situations auxquelles ils seront confrontés. On a souvent pointé du doigt la jeunesse (c'est-à-dire l'inexpérience) du juge, ce qui n’est  pas la  plus invraisemblable des hypothèses… 


    On a pu lire dans les colonnes du journal Le Monde les belles et émouvantes déclarations du magistrat le plus gradé de France, Guy Canivet, aujourd’hui membre du Conseil Constitutionnel, évoquant une justice rendue, «les mains tremblantes» et recommandant de voir en le justiciable «son prochain». Ce sont des paroles frappées au coin du bon sens et empreintes d'une humanité profonde. Est-ce si difficile à concevoir, à mettre en pratique ?

    De toutes parts des voix s'élèvent pour réclamer une refonte totale des procédures pénales  Cette exigence est parfaitement fondée et l'on ne peut que s'étonner de l'étonnement des parlementaires découvrant l'application concrète des lois qu'ils ont mêmes votées : la brutalité des perquisitions matinales, le transfèrement des gardés à vue et leurs interrogatoires pratiqués parfois  sans ménagement.

    On ne fermera probablement pas le dossier d’Outreau en se servant d’un bouc émissaire, voué aux gémonies car chargé de tous nos péchés. C’est à un examen de conscience (comme l’écrivait Renan il y a plus d’un siècle) que nous sommes tous conviés. Et d’abord en se disant que cela peut arriver à n’importe qui, qu’il faut être prudent lorsqu’il y va de la vie et de la liberté d’un être humain. Et au-delà de l’institution judiciaire qui a visiblement connu des dysfonctionnements, il y a les grands moyens d’information qui  ont involontairement prêté la main à ce déni de justice en gavant leurs lecteurs en quête d’émotions rares…

    Ici-bas,  nul n’est infaillible. Nous devons donc aider les magistrats à mieux faire leur travail : notre démocratie en dépend. 






     




     

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