On ne s'en rend peut-être pas bien compte, mais c'est un rude coup que l'auteur de Survivre avec les loups a porté, bien involontairement, au renom de la Shoah, à l'authenticité de la souffrance des victimes et des survivants et à la crédibilité de l'holocauste, en général?
Que s'est-il passé? Une dame, ayant aujourd'hui un certain âge, prétendait être juive et la fille d'un couple de réfugiés en Belgique qui furent déportés par les Nazis et tués dans des camps d'extermination situés à l'est de l'Europe. Leur fille, que l'auteur prétendait être, décide, à l'âge d'à peine huit ans, de se lancer -à pied- à leur recherche et de traverser toute l'Europe.
Malgré toutes les invraisemblances, j'ai aimé ce film que je suis allé voir avec mes deux filles âgées de 14 et 16 ans… Une certaine émotion régnait dans cette salle de cinéma et même si la survie avec les loups dans une Europe hivernale enneigée était peu crédible, nul n'a osé contester la version d'une «survivante…»
Et aujourd'hui, alors que l'auteur finit par reconnaître que tout était pure invention de sa part, nous nous trouvons face à un dilemme grave: devons nous dire aux enfants qu'ils ont été abusés, et nous avec eux? N'avons nous pas manqué à notre devoir de vigilance parentale, en exposant notre progéniture à la mystification d'un faussaire, certes, bien intentionné, mais tout de même à la conduite inqualifiable?
Par charité judéo-chrétienne, nous n'accablerons pas l'auteur de cette chose, bien qu'elle soit grave; nous soulignerons seulement que les gardiens du souvenir et de la mémoire devraient faire preuve de plus de vigilance car , où allons nous, si le premier mystificateur venu pouvait s'immiscer dans la voie de l'Histoire, se fabriquer une petite histoire bien à lui, la mettre en circulation à grands renforts de publicité et compromettre ainsi un événement des plus graves de l'histoire européenne récente.