Le débat d’hier entre Nicolas Sarkozy et François Hollande,
Ce débat a dû battre des records d’audience, pourtant il fut trop long, confus et entre coupé d’interruptions et de réparties mal équilibrées. Au-delà des deux finalistes, les journalistes responsables de la conduite du débat n’ont peut-être pas été à la hauteur.
J’ai l’impression qu’on a changé d’époque : c’est une habitude bien française, héritée de la république des professeurs et des avocats, de croire qu’une telle confrontation d’idées peut apporter la lumière, décider les électeurs et rendre le champ de manœuvre plus visible. Ce ne fut pas le cas.
On n’en est plus à l’époque des débats entre François Mitterrand et Valéry Giscard d’Estaing, ni à l’opposition François Mitterrand et Jacques Chirac. Certaines formules ou réparties de ce temps là sont entrées dans l’histoire… C’est une ère nouvelle, aujourd’hui, les problèmes ont changé de nature, le champ politique s’est diversifié, le parti communiste a disparu, la droite lepéniste s’est rudement fortifiée et l’écologie a fait son apparition. En une phrase, ce n’est plus le même monde.
Pourtant, on sent bien que c’est l’avenir du pays qui se joue, la forme que prendra ou ne prendra pas son identité, sa place en Europe et dans le monde. En une phrase, le bien-être ou la ruine de ses habitants, c’est-à-dire la pérennité du modèle français auquel, personnellement, je ne crois plus vraiment. Je repense à une expression ancienne de VGE, évoquant in petto une forme de société duale»
Et ceci met en cause les élites. Il ne s’agit de désigner un coupable qui servirait de victime expiatoire. Nous n’en sommes plus au temps du règne d’une sorte de culte sacrificiel. Mais il y a un hiatus entre les classes sociales en France. Hier un important diplomate allemand me confiant son admiration pour les élites de notre pays. Il avait raison, mais ces mêmes élites devraient irradier davantage sur le reste de la population qui représente tout de même 95% … Usons d’un euphémisme : ce n’est pas une quantité négligeable !
Alors que je pensais le contraire, je vais finir par croire qu’au fond le débat d’hier n’a pas fondamentalement changé la donne, même si rien n’est joué et que les électeurs se détermineront seuls dans le secret de l’isoloir. Cependant, je n’exclus pas un resserrement de l’écart.
Le seul facteur déterminant, celui qui pèsera lourdement dans la décision finale des votants, c’est la crise. Ceux qui penchent en faveur du candidat du PS ne voient qu’une chose : la crise, l’incertitude de l’avenir, le saut dans l’inconnue et les bouleversements que cela implique pour la vie de chacun. Cette préoccupation est légitime. Mais ce qui l’est moins, c’est (encore une réponse très française) de confondre la crise avec les gouvernants du moment et de leur en imputer la responsabilité. Ceci est injuste.
Mais qui se préoccupe de justice et de vérité ? Dieu certainement, mais pas les forces politiques.
Maurice-Ruben HAYOUN
In TDG du 3 mai 2012