L’Iran et le nucléaire : retour sur un accord
Des pourparlers de Genève au sujet du nucléaire iranien, on peut tirer deux enseignements majeurs : comment les USA défendent avant tout leurs intérêts propres et comment ils traitent leurs alliés. Au fond, cet accord vaut ce qu’il vaut, il est comme tous les accords conclu avec des partenaires qui n’ont aucune fiabilité ni aune éthique, il durera ce qu’il durera mais ce n’est pas l’essentiel.
L’essentiel, c’est ce qu’il révèle des deux côtés, des deux contractants. Si les USA avaient accepté de prolonger les discussions, s’ils avaient mis la barre plus haut, le monde libre aurait obtenu beaucoup plus. Or, là, en dépit des dénégations de Barack Obama qui ne laissera sûrement pas le souvenir d’un grand dirigeant dans l’Histoire, l’Iran a sauvé l’essentiel ; il n’est pas contraint de démanteler ses usines, spécialement conçues pour le nucléaire militaire. Or si ce pays se défende d’avoir de telles intentions militaires, à quoi bon conserver ces usines en l’état ? Que faire de ces centrifugeuses puisqu’elles sont à l’arrêt et ne devront plus être utilisées à leur pleine capacité ? Il subsiste encore trop de zones d’ombre.
Mais revenons aux USA. Tous ceux qui nous lisent savent que je ne suis guère suspect du moindre américanisme, que je partage les valeurs de cette grande nation, mais je garde tout de même la capacité d’analyse et mon sens critique. Même John Kerry a compris à la fin, après coup, qu’il avait conclu un marché de dupes puisqu’il a jugé bon d’ajouter à la télévision que l’accord ne concédait pas aux Mollahs le droit d’enrichir de l’uranium. Or, c’est exactement ce que le Pr Rouhani a mis en avant, c’est-à-dire qu’il y a déjà des interprétations opposées alors que l’encre de l’accord n’est pas encore sèche.
Les Iraniens étaient au bout du rouleau, la population n’en peut plus de toutes ces sanctions et l’inflation est galopante (plus de 40%) alors que la monnaie nationale a perdu près de 75% de sa valeur. Pourquoi cette précipitation américaine ? Probablement en raison d’autres négociations secrètes menées au sultanat d’Oman ou ailleurs, sans se soucier des intérêts des autres.
Je ne nie pas que la direction iranienne actuelle veut sortir de l’impasse dans laquelle le précédent dirigeant l’avait enfermée. Mais ce qui est en jeu, c’est l’affermissement du régime mollah qui a tiré sur ses citoyens, a bourré les urnes lors de la réélection d’Ahmaninedjad et menace ses voisins dans une région qui est déjà un véritable de poudre. Il y a quelque temps Obama demandait le départ de Bachar et voici qu’aujourd’hui il pactise avec son soutien le plus solide. Israël, l’Egypte, la Jordanie, l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis espéraient que la région connaîtrait enfin la paix, débarrassée de l’Iran et de ses suppôts, La Syrie de Bachar et le Hezbollah libanais. Et voici que l’inverse se produit. Que doit penser à ce jour l’opposition syrienne qui a courageusement affronté les avions et les chars d’un tyran ? En une phrase comment faire confiance à l’Amérique ?
Cela Netanyahou l’a compris avant tous les autres, comme tous ses prédécesseurs : il faut assurer soi même sa propre sécurité. Je n’ai pas une sympathie particulière pour ces régimes arabes rétrogrades et souvent fanatiques, mais tout de même sans eux nous n’aurions jamais eu de stabilité dans cette partie du monde. Enfin, cela ne servirait à rien de se lamenter.
Mais voyons un peu ce qui va se passer, ne prophétisons pas mais faisons un peu de prospective : que va t il se passer en Iran ? De fortes dissensions internes sont à prévoir, l’aile dure du régime se sentant écartée, dépossédée de son pouvoir, va réagir… Je rappelle qu’il y a quelques semaines on annonçait la mort violente, en plein Téhéran, du vice ministre de l’industrie. Lorsque les Iraniens voudront retrouver une place normale dans le concert des nations, ils devront donner encore plus de gages s’ils veulent vraiment la levée des sanctions qui sont, je le rappelle, des lois promulguées par les parlements nationaux. Et même Obama aura quelques difficultés dans un avenir proche ; il peut, certes, restituer par décret quelques milliards de dollars à l’Iran, sans passer par le Congrès mais le Sénat prépare déjà d’autres sanctions.
Soyons aussi réalistes, il faudra d’intenses négociations pour aboutir à la levée de toutes les sanctions. L’Iran n’est qu’au début d’un long chemin semé d’embûches et il n’est pas certain que des puissances étrangères laissent subsister cet accord qui n’en est pas un..