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L’Union Européenne, la Turquie et les réfugiés : les contours d’un chantage

L’Union Européenne, la Turquie et les réfugiés : les contours d’un chantage

Les concepteurs, les fondateurs et les dirigeants (actuels ou passés) de l’Union Européenne ont été et sont en dessous de tout. Ils ont mis au monde un enfant sans jamais penser à le protéger des aléas de l’existence ni des appétits insatiables de puissances étrangères désireuses de s’inviter, à tout prix, à la table de la nouvelle entité politique. Beaucoup de choses ont été faites à la va vite et, pour ne parler que des problèmes actuels, cette invasion migratoire qui ne dit pas son nom n’a jamais été envisagée, pas même par les experts les plus affutés…

La Turquie avec ses 85 millions d’habitants a su exploiter à son avantage la crise en accueillant sur son sol des millions de réfugiés, réels ou supposés, pour en faire ensuite une monnaie d’échange et adopter sans la moindre gêne, une position de force à la table des négociations. Ce pays dicte ses conditions : nous reprenons tous les réfugiés quels qu’ils soient, mais vous nous donnez au total 6 milliards, vous supprimez les visas d’entrée en Europe pour les Turcs et vous accélérez notre entrée dans l’Union.

Or, si la clause financière peut paraître acceptable, les deux dernières ne le sont pas du tout. Ce serait une invasion qui ne dit pas son nom. Si vous laissez entrer les gens sans visa, il est sûr et certain qu’ils ne repartiront pas, plus jamais ils ne rentreront chez eux. Les pompes aspirantes sont trop tentantes en Europe… Et l’on peut comprendre que des gens qui ne veulent plus vivre dans un régime qui ne respecte pas la liberté de la presse, souhaitent migrer vers des horizons plus cléments. Mais voilà, même les pays nordiques, jadis réputés pour leur tradition d’hospitalité, adoptent une attitude qui se rapproche de celle du FN ! Du jamais vu…

Le gouvernement turc actuel fait preuve de beaucoup de cynisme ; il sait que les opinions publiques occidentales sont traversées par un profond sentiment de culpabilité et surtout de compassion : comment rester insensibles, en effet, devant tant de tragédies humaines, tant de noyades, tant d’enfants livrés à eux mêmes sur un sol étranger, ne disposant d’aucune ressource, ne parlant pas la langue du pays ? Les Etats sont des monstres froids mais dans ce cas d’espèce c’est bien pire…

La Turquie veut installer un dispositif dont elle serait la maitresse exclusive et qui s’avérera un véritable nœud coulant pour l’Europe civilisée : elle propose d’organiser, de réguler le flux des réfugiés vers l’Europe, mais elle pourra, selon son désir, en accroître ou en réduire le débit. C’est un doigt puissant pressé contre la veine jugulaire de l’Europe. Et quand donc ce processus prendra-t-il fin ? Jamais, ou selon la volonté de l’Etat régulateur qui pourra ainsi dicter sa loi à l’Europe qui risque d’être submergée.

Mais dans ce contexte, la responsabilité de Madame Merkel est immense : c’est elle qui a dicté ce compromis car il sert ses intérêts, mais ce n’est pas une bonne affaire sur le long terme. Elle croit que les gens qu’elle accueille ont la même culture, les mêmes mœurs ; or, rien n’est moins vrai. Et une certaine soirée à la gare centrale de la ville de Cologne aurait dû lui mettre la puce à l’oreille… Il lui faudra éviter les fautes commises par des pays voisins qui n’ont pas su ou pas voulu assimiler correctement ces populations au lieu de se contenter d’une intégration sommaire…

Mais il ne faut pas oublier l’éthique, même si certains s’en servent pour faire pression et faire sauter des digues. Il y a l’universalité de la loi morale : quand quelqu’un a faim ou froid, quand il est souffrant, quand il risque de se noyer, de mourir, on doit se porter à son secours, l’aider à se rétablir. Quelles que soient sa religion, la couleur de sa peaux, ses origines ethniques ou autres… Mais une fois qu’il est rétabli, il doit pouvoir rentrer chez soi. Et c’est là tout le problème : ils n’ont plus de chez soi !

Maurice-Ruben HAYOUN in TDG du 8 mars 2016

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