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Le procès de Benjamin Netanyahou ou le triste triomphe de la haine juive de soi-même

 

 

 

Le procès de Benjamin Netanyahou ou le triste triomphe de la haine juive de soi-même

Comme on le fait généralement dans la discipline philosophique il convient d’observer une certaine distance avec l’objet traité ou analysé ; sans cette distanciation ( c’est d’actualité !) on s’expose à de graves erreurs car l’émotion prend alors le pas sur l’objectivité qui demeure nécessaire. Si je prends la plume ce matin c’est parce que j’ai regardé avec consternation un bien triste spectacle : le Premier Ministre israélien en exercice, M. Benjamin Netanyahou était là debout, assistant, entouré de ses avocats et de quelques partisans, à l’entrée de ses juges dans la salle d’audience du tribunal de Jérusalem… Et ce triste spectacle a déclenché en moi plus de tristesse que de colère. Les magistrats auraient très bien pu l’en dispenser…

A quoi assistons nous ? Depuis des années, toute une partie de la population d’Israël était maladivement opposée au Premier Ministre actuel (qui est en poste depuis plus de dix ans, dépassant même en longévité son illustre prédécesseur, David Ben Gourion ) au point d’en faire le point nodal de son programme : tout sauf Netanyahou (raq lo Netanyahou)… On croit rêver, surtout quand on prend en considération les raisons de ce rejet, voire de cette haine.

 

 

 

 

Le procès de Benjamin Netanyahou ou le triste triomphe de la haine juive de soi-même

 

N’étant pas juriste, je ne pourrais pas m’engager dans un plaidoyer fondé sur des points de droit, mais on peut se fier à son bon sens : est-ce que les points décrits dans l’acte d’accusation justifiaient vraiment une telle crise institutionnelle, un tel acharnement qui a relégué à l’arrière-plan tout le reste, en l’occurrence la gestion sociale et économique du pays, sans même parler des dangers planant sur la sécurité d’un Etat entouré d’ennemis ?

Deux points me semblent essentiels pour prouver la démesure des faits reprochés et leur traduction en arguments juridiques prétendant justifier la mise en accusation d’un tel dirigeant politique ? Que je sache, M. Netanyahou n’a jamais favorisé un enrichissement personnel ni détourné un seul shékel d’argent public. Les dirigeants de tant d’autres pays, même les plus civilisés et les plus démocratiques ont accepté des présents de leurs amis ou de leurs bienfaiteurs. On peut faire des cadeaux à des hommes politiques sans en faire nos obligés.

Certes, on a pu parler de services rendus en réciprocité, mais cela ne suffit nullement pour bloquer la vie politique de tout un pays de neuf millions d’habitants, lui imposer dans la même année trois consultations électorales, ce qui est absolument inouï ! Et le tout sur un fond de haine personnelle à peine déguisée.

Quand un tel rejet dure aussi longtemps, ne recule devant aucune remise en question tant les blessures sont profondes, comment ne pas penser au néologisme de ce juif allemands, Théodore Lessing, qui publia en 1930 au Jüdischer Verlag de Berlin, cette Haine juive de soi-même (Der jüdische Selbsthass), paru en français il y a une bonne vingtaine d’années ?

Mais comment des juifs peuvent ils, à ce point, haïr un autre juif ?

Je respecte parfaitement celles et ceux qui ont une sensibilité politique différente, voire opposée à la politique actuelle de l’Etat hébreu ; je comprends aussi que certains aspects de la politique, tant intérieure qu’extérieure, déplaisent à certains, mais de là à cimenter en un rocher granitique cette opposition, il y a un pas que je me refuse à franchir. On se défend mal de l’impression (si triste) que M. Netanyahou était devenu le juif d’Israël comme Israël est parfois ( à l’ONU notamment) le juif des nations). Et cette attitude nous fait honte. Il n’est pas faux de dire que ne pouvant pas renvoyer l’actuel Premier Ministre chez lui, ses adversaires ont emprunté la voie judiciaire pour en venir à bout. Je suis choqué quand j’entends certains leaders politiques parmi les opposants pousser des cris jubilatoires en évoquant la possible incarcération de l’accusé !! On en est bien loin, et c’est aller vite en besogne, quand ce ne serait qu’en vertu de la présomption d’innocence…

Me permettra-t-on quelques réflexions sur la philosophie politique dans ses relations avec l’éthique et le droit naturel selon Hegel ? Sans me réclamer de ce que Sören Kierkegaard nomme, pour le cas du patriarche Abraham, une suspension de l’éthique pour des représentants éminents de l’humanité (il les nomme les chevaliers de la foi), je dois bien avouer que c’est une mauvaise haine qui a inspiré toute cette année de vicissitudes politiques en Israël ; une haine politique qui atteint des bassesses incroyables mais qui n’est pas parvenue à ses fins puisque, malgré ce climat hostile de la presse, malgré une détestation plus ou moins affirmée de l’appareil judicaire, et surtout en dépit d’une terrible inculpation en pleine campagne électorale, l’homme, blessé mais toujours debout, a tenu bon ; d’autres leaders politiques se seraient effondrés et auraient perdu les élections. Il en fut tout autrement pour M. Netanyahou : non seulement il n’a pas reculé mais a maintenu ses positions au point même de devancer ses adversaires dans les sondages : la presse même hostile reconnaît que son parti, le Likoud, a vraiment le vent en poupe et gagnerait bien d’autres sièges au parlement s’il y avait une nouvelle consultation électorale. Et si M. Netanyahou était une personne perverse qui ne pense qu’à son bienêtre, il pouvait faire capoter les négociations avec son rival pour sortir renforcé de ces nouvelles élections et accaparer le pouvoir. Le général Benny Gantz l’a bien compris lui qui a accepté de faire un bout de chemin avec son rival, réduisant à néant les espoirs de M. Yaïr Lapide qui s’y croyait déjà…

Aujourd’hui, tout le monde vole au secours de la victoire ; c’est bien connu, seule la défaite est orpheline, personne ne la revendique. Le problème, au-delà de la brillante prestation de M. Netanyahou qui a réussi son affaire, est que certains diront qu’il a pulvérisé ses adversaires alors que sa majorité est restée soudée, c’est que la société israélienne est profondément divisée. J’ai été frappé de constater, au début de la crise, que la place de la religion était encore et toujours remise en question. Certaines questions touchant à la nature de cet état, qui se veut à la fois juif et démocratique, n’ont pas encore reçu de réponse… Et cette fracture idéologique se recoupe avec une autre fracture, sociologique, celle-ci, puisqu’il s’agirait selon certains d’opposer une majorité de la population aux rares élites des grandes villes qui entendent donner le ton et imposer leurs idées. Et cet establishment méditico-judiciaire accuse M. Netanyahou et son parti de surfer sur cette opposition qui pourrait entraîner des conséquences délétères pour le pays tout entier.

Sans vouloir commettre quelque ingérence que ce soit, il faut bien parler d’acharnement à défaut de haine. Mais c’est la première fois dans l’histoire si mouvementée de ce petit pays qu’une telle confrontation entre la majorité et l’opposition se produit : en un peu plus d’un an, une cascade d’élections, des haines inexpiables, un mode politique divisé, assoiffé de pouvoir et de gratifications, bref le chaos. Et un seul homme a été en mesure de discipliner tous ces individus pour en faire un gouvernement. Et ce ne fut pas une mince affaire car tous les députés voulaient un maroquin : rendez vous compte 61 ministres pour un si petit pays !!

Il faut mettre un terme à cette haine juive de soi-même. Le peuple juif a la chance d’avoir enfin un Etat beau et fort ; l’attente a duré deux millénaires. il a à sa tête des généraux et des diplomates de premier ordre, il doit apprendre à vivre avec ceux de ses citoyens dont les opinions politiques divergent. Par rapport à celles de la majorité. Et surtout ne pas se priver des services de ses leaders qui figurent parmi les meilleurs au monde.

Ce ne sont pas des comparutions judicaires médiatisées de M. Netanyahou qui y changeront quelque chose. Que les Israéliens ne se privent donc pas des services et du discernement d’un si grand homme d’Etat. L’art de la politique s’apprend plus chez Machiavel que dans les Evangiles.

Ils pourraient le regretter mais alors ce serait trop tard…

Maurice-Ruben HAYOUN

 

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