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Frédéric Salat-Baorux, Blum le Magnifique.  Du Juif  «Belle époque» au leader socialiste. Alpha, 2025  

Frédéric Salat-Baorux, Blum le Magnifique.  Du Juif  «Belle époque» au leader socialiste. Alpha, 2025

 

Frédéric Salat-Baorux, Blum le Magnifique.  Du Juif  «Belle époque» au leader socialiste. Alpha, 2025

 

J’ai bien aimé cet ouvrage,  et ce dès le début. Il me parlait, d’une certaine façon, et m’a montré que même un haut fonctionnaire comme l’auteur (c(conseiller d’Erat, secrétaire général à la présidence de la république) pouvait vivre les mêmes problèmes  que n’importe quel autre français de confession juive et se trouver  confronté aux mêmes interrogations, aux mêmes injustices et aux mêmes difficultés d’adaptation  à une société européenne. C’est, en gros, ce que l’auteur décrit en jetant son dévolu sur une figure charismatique de la taille d’un Léon Blum. J’irai même plus loin, en disant que FSB s’identifie entièrement à son personnage. Et la confirmation   de cette impression n’a pas tardé à venir en pages 86-87, lorsqu’il évoque la même fonction de commentaire du gouvernement, jadis occupée au Conseil d’état par ce même Léon Blum. L’émotion est palpable quand on lit la narration de cette journée mémorable pour un jeune haut fonctionnaire appelé à défendre un dossier qu’il a dû examiner avec une extrême précision...

 

FSB parle de la vie de son modèle avec une profonde empathie et développe une sensibilité juive, attentive à la fois aux idéaux de la République et aux mêmes valeurs juives de justice, d’équité et de fraternité. Le choix du cas Léon  Blum pour analyser les relations entre un juif et la culture européenne est très bien vu, même si l’on se frotte les yeux en prenant connaissance des flambées d’antisémitisme qui isolaient  les enfants d’Israël du reste de la société française.. Les écrits de Barrès et de Maurras, sans oublier La France juive de Drumont, sont à peine croyables  tant ils dégoulinent de haine anti)juive. Pourtant, un homme comme Blum allait montrer de quoi il était capable, en mettant ses talents au service de sa patrie, la France. Mais cette attitude n’était pas uniquement celle d’un pays comme la France, le même rejet sévissait de l’autre côté du Rhin. Je ne résiste pas à la tentation de citer la phrase d’un grand historien allemand du XIXe siècle, Théodore Mommsen,  éminent spécialiste de la Rome antique, qui disait ceci  :

 

lorsque Israël fit son apparition sur la scène de l’histoire unetelle, il n’était pas seul mais se trouvait accompagné d’un frère jumeau... Et qui était ce frère jumeau ? l’antisémitisme 

 

! Cette déclaration se passe de commentaire, elle montre que même sans juif à portée de main, l’antisémitisme prospère dans son délire. Portant, même chez un grand intellectuel comme Mommsen, on peut décéder des traces de prosélytisme ; en effet, lors de la querelle des historiens  Heinrich Grätz,  le pré-fondateur de l’historiographie juive moderne et l’historien nationaliste allemand Heinrich von Treitschke, le seul représentant de l’université  allemande  à, prendre parti pour l’historien juif ne fut autre que Mommsen , lequel affirmera  aussi que si les juifs voulaient bien se convertir, cela simplifierait les choses... En termes clairs, la meilleure antidote à l’antisémitisme serait la conversion pure et simple des juifs au christianisme..  On trouvait de telles déclarations, même chez les amis (sic) des juifs !

 

Mais  Blum ne s’est jamais concerti, il a conservé une forme très personnelle de son patrimoine juif et ses trois n’épouses successives étaient de religion juive...

 

La France a toujours bénéficié d’un préjugé favorable de la part des juifs, notamment d’Europe centrale et orientale ; les exilés de toutes les contrée européennes voyaient dans la patrie de Voltaire le pays où se réalisaient les prédictions des prophètes hébreux, annonçant une ère nouvelle  pour l’humanité. Mais l’affaire Dreyfus allait démontrer que l l’espérance juive n’était pas encore au rendez)vous. FSB lui consacré d’ailleurs un chapitre bien charpenté.

 

L’affaire Dreyfus sera pour Blum la croisée des chemins On ne pouvait plus s’en tenir à une attitude d’esthète Il fallait s’engager, agir pour relever le défi.. Comme la question est connue dans tous ses détails, je passe rapidement à autre chose ; FSB nous donne un chapitre très fouillé, montrant que ces terribles moments en disent long sur l’histoire  intime de la France, sur son inconscient et sur ses valeurs. L’affaire a constitué un énorme révélateur du non-dit français. Une telle affaire aurait elle pu se produire ailleurs qu’en France ? N’étant pas spécialiste, je me garderai de me prononcer mais force est de constater qu’elle a provoqué dans l’Hexagone des secousses  telluriques   au point que le pays était divisé en deux, ceux qui étaient pour l’officier juif et ceux qui étaient contre... Et il existe encore des gens qui se disent convaincus de la culpabilité de l’officier...

 

FSB trace le portrait de l’individu que serait  devenu Blum sans cette affaire : un petit)-bourgeois sans relief ni grande cause à défendre..., Car l’affaire allait bien au-)delà d’un procès pour trahison d’un officier félon, ce fut dans l’histoire de France une ligne de partage, même au sein de familles entières. Il arrivait même que l’o décidât de ne pas évoquer l’affaire pendant des réunions familiales. C’est l’affaire Dreyfus qui  a fait Léon Blum socialiste, tout comme elle a fait  de Théodore Herzl un sioniste, auteur de L(état des juifs (Der Judenstaat).

 

La recentre avec Jaurès fait partie de ces interventions quasi miraculeuses de la Providence. Désormais, celui qui avait commencé sa carrière comme critique littéraire va devenir un homme politique de premier plan. Il se fera aussi le porte-parole du socialisme. Quel destin ! Mais ce n’est pas fini, la disparition tragique de son maître à penser qui qui n’était  son aîné que de peu d’années, va sceller son destin. En apprenant la nouvelle, Blum va se précipiter au domicile du défunt pour le veiller toute  la nuait. Il y  croise Barrès qui lui dira cette phrase admirable : votre deuil est aussi le mien...

 

Quand on analyse vie de certains grands hommes on relève presque toujours la présence de rencontres déterminantes dans leur carrière. On ne croit pas se tromper en disant que Blum sans Jaurès n’aurait pas été Blum. On peut imaginer qu’une intelligence cosmique, un intellect suprême prépare ce genre de choses , le plus souvent à notre insu. C’est ce qu’on peut appeler le destinée. Et c’est bien ce qui est arrivé à Blum et à Jaurès. Surtout lorsqu’on revoit ce qu’ils ont réalisé ensemble, et aussi, l’un après l’autre..

 

Oui, le destin détermine souvent le devenir de  certains hommes. Et FSB a raison de parler d’un mystère Blum. Comment Léon Blum est devenu  Blum ?

 

FSB nous aide beaucoup  à le comprendre.

 

Une note plus personnelle = mon père m’a dit un jour qu’un lieutenant de l’armée française l’avait apostrophé en ces termes : Alors, Isaac, tu dois être très content ,c’est  un juif (Blum) qui nous gouverne.... Et mon père n’a pas répliqué.

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