L’échec de la rencontre Poutine-Hollande
On ne peut que parler d’un échec tant la rencontre entre ces deux chefs d’Etat fut tendu et rude, même devant les journalistes, M. Poutine n’hésitant pas dire crûment que la relation avec l’Allemagne était, à ses yeux, autrement plus importante qu’avec la France, en raison du volume d’échanges. Le président russe a même été agressif et sur ses gardes lorsque des journalistes russes lui posèrent des questions embarrassantes. Mais le plus forte pomme de discorde touche les relations avec la Syrie de Bachar el Assad qui vit ses derniers instants.
Et là nous avons pu constater l’inflexible cynisme de M. Poutine qui s’est permis de dénoncer la partialité des journalistes qui ne parlent que des exactions de l’armée du régime, oubliant les agissements de l’opposition. Il a même osé faire la comparaison avec ce qui se passe en Irak, en Libye et en Egypte. Je dois dire qu’il n’a pas tout à fait tort dans son cynisme qui consiste à laisser faire puisque le monde arabe est incapable de se réformer lui-même dans la paix et la bonne entente. En fait, il attend que l’un des deux partis ait totalement battu l’autre pour clamer sa volonté de coopération avec le vainqueur… Cela s’appelle du cynisme intégral : mais est ce étonnant chez ce monsieur ?
Personne ne lui a posé la question de la détention de ce pauvre Khodorkowski qui croupit depuis bientôt huit ans dans les geôles russes et que M. Poutine renvoie régulièrement en prison sous la foi de nouveaux chefs d’accusation, aussi inconsistants les uns que les autres.
Question : La France devait elle vraiment recevoir un tel homme dont l’élection a été contestée par des centaines de milliers de manifestants et dont le régime continue d’armer le brase d’un président syrien sanguinaire qui massacre son peuple ?
L’histoire livrera bien un jour son verdict. Même la raison d’Etat a des limites.
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Les premiers pas du président François Hollande
Les premiers pas du président François Hollande
Si l’on examine les premiers actes de cette nouvelle présidence, on est frappé par le silence, par l’absence de ce tintamarre médiatique et de cette frénésie télévisuelle que des journalistes à la plume acérée ont dénoncé comme étant du bling bling. N’y voyons pas de jugement de valeur mais la comparaison laisse l’observateur presque sans voix. Là où son prédécesseur était constamment présent dans les médias, et surtout à la télévision, François Hollande prouve, chaque jour que Dieu fait, qu’il a été épargné par cette maladie que feu Raymond Barre désignait avec humour comme de l’incontinence médiatique. En somme, l’hyper présidence a vécu.
Ce mutisme du nouveau président est le fruit d’une stratégie mûrement réfléchie tout au long de la campagne : là où l’ancien président n’écoutait que lui-même, cédait régulièrement à une impétuosité naturelle, voulait toujours avoir le dernier mot et se trouvait constamment sur le pont pour répondre à tout, tout diriger, donner son opinion sur tout et rien à la fois, François Hollande, quant à lui, est économe d’épithètes et d’adjectifs susceptibles de surprendre ou de choquer. La comparaison entre les deux présidents relève presque de l’étude d’un contraste. C’est probablement ce que François Hollande exprimait par la volonté d’être un président normal. Une expression qui avait largement intrigué les commentateurs aux yeux desquels la norme est toujours difficile à définir…
Quelques exemples de cette nouvelle gouvernance, de ce nouveau style : l’excellent Premier Ministre que la France s’est donné, Jean-Marc Ayrault, existe, respire sans peine, son domaine est clairement défini et il gouverne dans la plénitude de ses fonctions. Les ministres ne sont pas cannibalisés par une équipe présidentielle pléthorique qui les supplante sur les plateaux de télévision, ils agissent et donnent à la France l’impression que personne n’écrase personne et qu’une certaine sérénité règne.
J’écoutais il y a un instant M. Jean-Marc Ayrault sur BFM TV évoquer l’apaisement qui caractérise ce début de présidence. Et je m’interrogeais pour savoir si l’on ne commettait pas quelque injustice à l’égard d’un homme, chassé du pouvoir, mais qui n’a pas ménagé sa peine ni son énergie pour défendre notre pays. Il apparaît nettement, cependant, que le pays avait besoin d’un autre style, d’une autre approche, d’une autre façon de faire. Et cette impression est partagée même par des observateurs extérieurs. La France républicaine a toujours conservé une idée positive de la monarchie et le président de la Ve république a toujours été une sorte de monarque républicain…
Est-ce ce nouveau style est appelé à gagner les faveurs de l’opinion et à apaiser le pays ? Tout le monde le souhaite. Mais il convient de se méfier d’une certaine propension socialiste qui consiste à prendre des mesures symboliques. Le symbole est important, il est même indispensable, car l’homme ne vit pas que de pain. A quoi Voltaire répondait avec son sens aigu de l’anti-exégèse railleuse : oui, certes, mais il en vit aussi. Il ne faut pas l’oublier.
C’est bien de dire publiquement que les grands patrons doivent respecter une certaine éthique et se montrer exemplaires. Mais il ne faut pas oublier que les meilleurs ont un prix. S’ils n’y trouvent pas leur compte, ils partent ailleurs. Et la France, aujourd’hui, dans sa vaste entreprise de redressement, a besoin des meilleurs.
On lui souhaite du fond du cœur de les trouver…