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  • Les massacres en Syrie et le fiasco de la mission Anan

    Les massacres en Syrie et le fiasco de la mission Anan

     

    Depuis avant-hier, c’est l’émotion grandissante qui prévaut dans les programmes des télévisions arabes, à la suite des massacres de populations civiles en Syrie. Hier soir, j’ai même pu voir, en direct ou presque, un bombardement des banlieues de Hama par des hélicoptères de combat de l’armée. Des enfants pleuraient dans les bras de leurs mères, hurlaient de peur dans le bruit assourdissant des explosions. Il faut beaucoup d’aplomb au régime de Bachar el Assad pour prétendre que ce sont les insurgés qui seraient les responsables des massacres.

     

    On ne voit pas comment les insurgés iraient bombarder leurs amis, leurs frères et leurs compagnons d’armes. En fait, c’est le régime qui dévoile, sans fard, sa vraie nature, un régime prêt à tout pour se maintenir au pouvoir et rétablir l’ordre en sa faveur. Mais il n’y arrivera pas car tous les observateurs (sauf peut-être Kofi Anan) savent que le régime tombera.

     

    Kofi Anan n’aurait jamais dû lancer sa fameuse mission qui est un véritable fiasco, nous l’écrivions ici même dès le début. Je porte un jugement sévère sur cet homme que j’avais croisé il y a peu d’années à Genève errant dans les rues de la vieille ville, suivi d’un garde du corps… Depuis qu’il a conduit cette pseudo mission, il y a eu plus de mille morts et les massacres ont pris une ampleur inacceptable. Je ne dis pas qu’il en est responsable, mais ce fut une perte de temps. Il a enfin compris qu’il lui fallait reconnaître son échec, ce qu’il a fait en toute honnêteté à la tribune de l’ONU hier après-midi. Cet homme qui passait pour un diplomate hors pair a cru qu’on pouvait raisonner un tel régime, que sa signature avait une quelconque valeur. Je pense qu’il a compris son erreur. On ne dialogue pas avec un tel régime.

     

    Une interview de Bernard-Henri Lévy donne à penser que le président Hollande ne rejette pas d’emblée l’idée d’une intervention militaire. Mais si celle-ci se faisait, la France ne pourra pas intervenir seule, il lui faudrait l’appui des USA, des monarchies du Golfe et l’aide, même indirecte, d’Israël, qui surveille ce qui se passe en Syrie comme une cuisinière surveille le lait sur le feu…

     

    Reste un problème de grande importance dont les télévisions arabes parlaient hier : la désunion des partis qui constituent l’opposition syrienne. Tant qu’elle ne se fera pas, ce sont le chaos et la guerre civile qui menacent.

  • Comment peut-on vendre une église ?

    Comment peut-on vendre une église ?

     

    Et pourtant, cette triste solution est souvent celle à laquelle doivent se résoudre maintes associations diocésaines lorsque les communautés villageoises, notamment rurales, se révèlent incapables d’entretenir les biens sacrés de la communauté chrétienne. Certes, aucun lieu sacré, une église en l’occurrence, ne peut être vendu sans l’autorisation de l’évêque local. Mais ce phénomène prend de l’ampleur ces derniers temps. Bien que n’entrant dans une église que pour écouter un concert de musique ou pour en admirer l’art architectural (comme je le fis à Bologne, par exemple, il y a quelques semaines), je trouve triste que l’Eglise soit amenée à se défaire de certains de ses édifices sacrés.

     

    Et puisque je parle de sacralité, je dois dire un mot de la façon dont un édifice devient un lieu de culte, en d‘autres termes, comment un lieu devient saint ou sacré. Comment s’effectue la dévolution de la sainteté, de la sacralité à un lieu ?

     

    J’avoue ne pas connaître dans les détails l’état de la question au sein de l’église catholique, n’était pas au fait du droit canon. Je sais, en revanche, que lorsqu’une église est cédée à une destination laïque ou profane, les acquéreurs s’engagent à en respecter au moins l’architecture et à ne pas pratiquer dans ce même lieu des activités déshonorantes ou dégradantes.

     

    Dans le judaïsme talmudique, c’est encore plus précis. Tout d’abord, eu égard au style dépouillé des synagogues (en effet, aucune règle n’est prescrite quant à la construction de l’édifice ni à la disposition du mobilier, seule l’arche sainte doit être positionnée dans la direction de Jérusalem, vers l’est, mizrah), on peut prier n’importe où : l’essentiel étant d’atteindre le quorum religieux de dix hommes âgés de 13 ans révolus.

     

    Quand les circonstances exigent de se défaire d’une synagogue, on peut le faire mais l’acquéreur doit s’engager à en respecter l’ancien caractère religieux, notamment en n’en faisant pas une tannerie, en raison de la mauvaise odeur qui embaumerait l’air et dégagerait des remugles, des relents de puanteur. La deuxième interdiction stipule qu’on ne peut pas en faire un lieu de plaisir, par exemple une maison close ou autre.

     

    Pour le judaïsme, un lieu est sacré ou saint par destination, il le devient, il ne l’est pas nécessairement, dès l’origine. Tout lieu, s’il respecte certaines conditions, peut devenir sacré par vocation. C’est un peu différent dans le cas des églises.

     

    Il n’en demeure pas moins triste de voir des églises devenir des Fast food ou autres… Je pense que cela correspond aussi à un phénomène de déchristianisation et de désacralisation, héritées d’une lointaine société de consommation qui a enseigné aux plus faibles et aux plus démunis intellectuellement d’acheter toujours plus, d’être fasciné par l’argent facile (des footballeurs incultes ou de vulgaires chanteurs de music hall, etc) et de ne croire qu’en l’avoir et non plus en l’être.

     

    Je reconnais bien volontiers que ce type d e raisonnement est l’œuvre de ceux qui sont repus, bien au chaud dans des quartiers cossus et bien protégés, mais tout de même !

     

    L’église chrétienne, que j’aime mais qui n’est pas mon église, a rendu d’incommensurables services à l’humanité, lui apprenant à mourir en lui expliquant qu’en quittant ce monde on ne sombre pas dans le néant, elle lui a aussi enseigné, dans le sillage de la synagogue, à aimer son prochain et à protéger les faibles. Autant de conditions qui sont indispensables pour le vivre ensemble.

    Même un juriste aussi peu casher que Carl Schmitt a reconnu dans un ouvrage oublié (mais traduit en français : Politische Theologie) que les idéaux républicains actuels étaient en réalité des théologoumènes sécularisés.

     

    Chaque village, chaque bourg de France a sa Place de l’église. Elle doivent continuer d’exister.

  • La Syrie et les phobies paranoïaques de Poutine

    La Syrie et les phobies paranoïaques de Poutine

     

    On a déjà eu l’occasion de dire ici même que la visite de V. Poutine à Paris s’était soldée par un échec. Le maître du Kremlin n’a rien cédé concernant la Syrie. On vient d’apprendre qu’un vice ministre russe a laissé entendre que son pays ne tenait pas mordicus à Bachar el Assad et pourrait, éventuellement, s’accommoder de son départ. Les Russes commencent visiblement à se sentir isolés, avec pour seuls compagnons d’infortune, les Chinois qui n’ont jamais été un parangon de régime démocratique. Il faut donc compter, dans les semaines qui viennent, avec un changement de perspective de la part des Russes, ce qui soulagerait considérablement les insurgés qui subissent depuis peu des pertes effroyables.

     

    Mais ce qui me frappe le plus dans l’attitude de V. Poutine, c’est son complexe de l’encerclement, sa hantise de voir des bases militaires de l’OTAN pousser comme des champignons autour de son pays et sa peur panique des complots et des trahisons. L’homme réagit avec ses anciens réflexes de lieutenant-colonel du KGB. Alors, on comprend mieux que M. Poutine se sente bien en compagnie des Chinois qui ne s’embarrassent guère du respect du droit des peuples. Ce fut plus malaisé pour lui lorsqu’il se trouva face au président François Hollande.

     

    Il y a aussi la situation intérieure en Russie qui préoccupe M. Poutine : souvenons nous des imposantes manifestations contre lui et sa réélection entachée d’irrégularités, le printemps arabe qui semble faire tâche d’huile dans le Caucase russe : et tout ceci fait craindre à M. Poutine que l’islamisme qui relève la tête chez lui pourrait fort bien s’emparer de la Syrie, le seul pays arabe du Proche Orient où l’armée russe a conservé une base lui donnant accès aux mers chaudes…

     

    Tout ceci, tous ces éléments convergent dans l’esprit de M. Poutine pour éveiller une sorte de complexe d’encerclement, digne du début du XXe siècle ou des pires moments de la guerre froide. Il faut bien comprendre qu’avec de tels réflexes, datant d’un autre âge, la nation russe ne rentrera pas de plain pied dans le monde européen qui l’entoure. Sur le plan international, l’image de la Russie a subi de graves dommages : un pays qui par son blocage à l’ONU a contribué, indirectement, à la mort violente de milliers d’insurgés syriens. Et cela, le peuple de Syrie ne l’oubliera pas.