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  • Que va devenir la loi travail ?

    Que va devenir la loi travail ?

    Cette affaire a été improvisée et risque de très mal se finir pour le gouvernement et notamment pour son chef. On note d’ailleurs un prudent retrait du chef de l’Etat qui ne s’implique pas trop afin de ne pas cristalliser sur sa personne le mécontentement croissant de la population. Certains observateurs gouvernementaux se bercent d’illusions en pensant minorer l’importance des manifestations d’hier. Ils se trompent. Il suffit de voir que deux autres manifestations sont déjà programmées, l’une pour la semaine prochaine, l’autre pour la fin de ce même mois de mars. Cela commence à faire beaucoup. Me El Khomry dont je répète qu’elle n’a pas la carrure pour être un barreur par gros temps est intervenue ce matin sur France Info pour dire, entre autres, que le gouvernement, toujours aussi mal inspiré, allait taxer les CDD pour forcer le patronat à embaucher. On ne peut pas imaginer pire maladresse : cela fait penser au célèbre adage paysan, on ne fait pas boire un âne qui n’a pas soif… Parfois on se demande qui conseille vraiment ce gouvernement… En fait, il faut réécrire cette loi, discuter avec les gens et ensuite, seulement ensuite, proposer un projet de loi. Or, là, on a fait l’inverse : au début, Manuel Valls, cédant à sa nature impétueuse, a commencé par parler ou laisser d’autres parler de l’article 49-3 ; et comme si cela ne suffisait pas, il a fallu qu’il surenchérisse en disant qu’il irait jusqu’au bout… La réaction de ses propres amis, du moins les frondeurs, ne se fit pas attendre ; ils répliquèrent par une mise en garde encore inédite. S’il y a un forcing de la part du gouvernement, et si la droite présentait une motion de censure, eh bien, ils la voteraient ! On n’était encore jamais allé aussi loin dans l’escalade… Que faire ? Surtaxer les CDD est une petite rustine, le gouvernement est à court d’idées et je le répète, le trio de tête dont j’ai précédemment parlé, Hollande, Valls, Macron, ne semble pas être sur la même ligne. Et je ne parle même pas de cette brave Me El Khomry dont la meilleure de toutes les attitudes serait d’observer un silence prudent car si, d’aventure, les deux têtes de l’exécutif décidaient d’abandonner le projet, elle en serait la dernière informée. C’est dur la politique, c’est même parfois cruel. Le gouvernement ne devrait pas laisser pourrir la situation, il devrait se sortir de cette mauvaise passe en écoutant notamment les jeunes qui ne veulent pas de la société qu’on leur prépare et dans laquelle il seraient contraints de vivre après notre départ. Certes, la France a toujours été rétive aux réformes, c’est une mentalité qu’il faut changer, mais pas suivant la méthode choisie. La vie, c’est être heureux, se lever chaque matin plein d’allant. Ce n’est pas avoir la rage au ventre en se rendant à son travail (quand on en a un).

  • Semaine délicate pour l’exécutif français : la jeunesse est dans la rue

    Semaine délicate pour l’exécutif français : la jeunesse est dans la rue

    La situation se détériore de plus en plus dans l’Hexagone. Et c’est la loi dite El Khomry qui a versé de l’huile sur le feu. Franchement, on ne voit pas comment la loi pourrait passer sans être dénaturée, entièrement vidée de son contenu. Les syndicats et les jeunes n’accepteront pas de corrections à la marge, ils veulent une réécriture, tandis que les autres organisations de travailleurs, CGT en tête, réclament le retrait pur et simple de cette loi. On a donc affaire à des réformistes s’opposant à des fondamentalistes. Mais même les premiers mettent en garde le gouvernement : ils n’accepteront pas des modifications cosmétiques.

    Le gouvernement fait face à un vrai dilemme : il ne peut pas se déjuger gravement en capitulant en rase campagne, il ne peut pas, non plus, ne rien faire puisque tout l’intérêt de la loi est de faire baisser le chômage et de rendre plus aisée une éventuelle candidature de Fr Hollande en 2017, enfin il ne peut pas, sans graves conséquences pour son chef, retirer le projet purement et simplement. La situation de Manuel Valls serait alors intenable avec les développements que l’on sait.

    Je ne souscris pas à des raisonnements machiavéliques faisant état d’un terrifiant stratagème fourbi par un membre de l’exécutif contre l’autre. On aurait tendu un piège au Premier Ministre le laissant s’empêtrer dans un chaos sans nom qui conduirait à son départ, ce que des socialistes de plus en plus nombreux semblent souhaiter, notamment depuis la tribune au vitriol parue dans Le Monde et cosignée par Martine Aubry et d’autres frondeurs.

    Les mêmes qui développent ce raisonnement à la fois tortueux et invraisemblable ajoutent que le président n’aurait pas apprécié qu’on lui force la main, ni même les arrière-pensées de quelques uns, spéculant sur son éventuel départ au terme de son mandat…

    De telles spéculations portant sur un divorce entre les deux têtes de l’exécutif ne tiennent pas la route. Certes, les tempéraments sont différents, les approches aussi, mais si on avait voulu remplacer le Premier Ministre, c’était au moment du remaniement du gouvernement qu’il fallait le faire… Qui s’aventurerait à changer d’attelage à moins de 14 mois de l’élection présidentielle ? Et le remplacer par qui ? Sapin, Royal, Macron ? Impossible

    Pour le moment les manifestations vont avoir lieu et le gouvernement scrutera leur importance. Et surtout si les jeunes sont dans la rue et bloquent les lycées, ce sera une autre paire de manches.

  • L’Union Européenne, la Turquie et les réfugiés : les contours d’un chantage

    L’Union Européenne, la Turquie et les réfugiés : les contours d’un chantage

    Les concepteurs, les fondateurs et les dirigeants (actuels ou passés) de l’Union Européenne ont été et sont en dessous de tout. Ils ont mis au monde un enfant sans jamais penser à le protéger des aléas de l’existence ni des appétits insatiables de puissances étrangères désireuses de s’inviter, à tout prix, à la table de la nouvelle entité politique. Beaucoup de choses ont été faites à la va vite et, pour ne parler que des problèmes actuels, cette invasion migratoire qui ne dit pas son nom n’a jamais été envisagée, pas même par les experts les plus affutés…

    La Turquie avec ses 85 millions d’habitants a su exploiter à son avantage la crise en accueillant sur son sol des millions de réfugiés, réels ou supposés, pour en faire ensuite une monnaie d’échange et adopter sans la moindre gêne, une position de force à la table des négociations. Ce pays dicte ses conditions : nous reprenons tous les réfugiés quels qu’ils soient, mais vous nous donnez au total 6 milliards, vous supprimez les visas d’entrée en Europe pour les Turcs et vous accélérez notre entrée dans l’Union.

    Or, si la clause financière peut paraître acceptable, les deux dernières ne le sont pas du tout. Ce serait une invasion qui ne dit pas son nom. Si vous laissez entrer les gens sans visa, il est sûr et certain qu’ils ne repartiront pas, plus jamais ils ne rentreront chez eux. Les pompes aspirantes sont trop tentantes en Europe… Et l’on peut comprendre que des gens qui ne veulent plus vivre dans un régime qui ne respecte pas la liberté de la presse, souhaitent migrer vers des horizons plus cléments. Mais voilà, même les pays nordiques, jadis réputés pour leur tradition d’hospitalité, adoptent une attitude qui se rapproche de celle du FN ! Du jamais vu…

    Le gouvernement turc actuel fait preuve de beaucoup de cynisme ; il sait que les opinions publiques occidentales sont traversées par un profond sentiment de culpabilité et surtout de compassion : comment rester insensibles, en effet, devant tant de tragédies humaines, tant de noyades, tant d’enfants livrés à eux mêmes sur un sol étranger, ne disposant d’aucune ressource, ne parlant pas la langue du pays ? Les Etats sont des monstres froids mais dans ce cas d’espèce c’est bien pire…

    La Turquie veut installer un dispositif dont elle serait la maitresse exclusive et qui s’avérera un véritable nœud coulant pour l’Europe civilisée : elle propose d’organiser, de réguler le flux des réfugiés vers l’Europe, mais elle pourra, selon son désir, en accroître ou en réduire le débit. C’est un doigt puissant pressé contre la veine jugulaire de l’Europe. Et quand donc ce processus prendra-t-il fin ? Jamais, ou selon la volonté de l’Etat régulateur qui pourra ainsi dicter sa loi à l’Europe qui risque d’être submergée.

    Mais dans ce contexte, la responsabilité de Madame Merkel est immense : c’est elle qui a dicté ce compromis car il sert ses intérêts, mais ce n’est pas une bonne affaire sur le long terme. Elle croit que les gens qu’elle accueille ont la même culture, les mêmes mœurs ; or, rien n’est moins vrai. Et une certaine soirée à la gare centrale de la ville de Cologne aurait dû lui mettre la puce à l’oreille… Il lui faudra éviter les fautes commises par des pays voisins qui n’ont pas su ou pas voulu assimiler correctement ces populations au lieu de se contenter d’une intégration sommaire…

    Mais il ne faut pas oublier l’éthique, même si certains s’en servent pour faire pression et faire sauter des digues. Il y a l’universalité de la loi morale : quand quelqu’un a faim ou froid, quand il est souffrant, quand il risque de se noyer, de mourir, on doit se porter à son secours, l’aider à se rétablir. Quelles que soient sa religion, la couleur de sa peaux, ses origines ethniques ou autres… Mais une fois qu’il est rétabli, il doit pouvoir rentrer chez soi. Et c’est là tout le problème : ils n’ont plus de chez soi !

    Maurice-Ruben HAYOUN in TDG du 8 mars 2016