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  • Le cavalier seul d’Emmanuel Macron

     

     

    Le cavalier seul d’Emmanuel Macron

    On dit souvent : il n’est de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, ajoutons : il n’est de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Emmanuel Macron fait cavalier seul et joue avec l’idée suivante qui lui semble non extravagante : et si François Hollande n’y allait pas ? Ministre de l‘économie, Macron sait pertinemment bien que l’inversion de la courbe du chômage n’aura pas lieu d’ici la fin décembre 2016. C’est une hypothèse qu’il prend très au sérieux, d’où son agitation médiatique, d’où la fondation de son mouvement qui correspond à ses propres initiales, signe indubitable qu’il roule pour lui-même et pour nul autre. La question qui se pose est la suivante : pourquoi François Hollande hésite-t-il à faire acte d’autorité et à montrer qu’il y a un seul maître à bord, que c’est lui et personne d’autre. Il y avait eu cette phrase qui résumait tout : il sait ce qu’il me doit, sous entendu d’un trait de plume dans le JO de la République Française, je puis mettre fin à ses fonctions.

    Emmanuel Macron le sait et exécute donc une sorte de danse médiévale, appelée le drapier des lanciers : deux pas en avant et trois pas en arrière. Mais arrivera fatalement le jour où ce petit jeu n’obéira plus à aucune retenue et ce sera le clash, l’affrontement.

    Car François Hollande, malgré tous ces défauts, est un fin politique qui a su s’accommoder de tant de choses car un fin politique est quelqu’un qui sait tirer avantage de toutes les circonstances, même les plus défavorables. Il a pris conscience qu’il était menacé depuis le début par Manuel Valls et il a suscité une autre créature, Macron, pour neutraliser un ambitieux qui frappait avec insistance à l’huis de Matignon. Mais voilà, aujourd’hui, les deux challengers jouent chacun sa partition. Il y eut cette déclaration faussement ingénue de Valls à LCP concernant le projet nécessaire pour une réélection et la visite de Macron à Orléans pour exalter la figure de Jeanne d’Arc, privilège régalien, généralement réservé au chef de l’Etat, lequel a rendu visite tôt ce matin au marché d’intérêt national de Rungis… Etait-ce le bon contre-feu ? Je parie que la presse va se concentrer sur Orléans et délaisser Rungis…

    Dans cette triste partie de poker menteur, que va faire la France, que vont faire les Français ? Cette situation ne peut pas durer indéfiniment, le président doit faire acte d’autorité. Il doit rétablir sa suprématie et remettre un peu d’ordre.

    Pourquoi s’étonner qu’il sombre dans les sondages ? La population n’a pas l’impression qu’il est à la barre. Après tout, le président peut dire qu’il ne rempilera pas si la situation le commande, et continuer à gouverner et à réformer pendant cette année qui lui reste. Et qui pour lui, s’il décidait de ne pas se représenter, ne serait pas une année électorale perdue…

    La France est en vacances, insouciante en apparence, les Français se livrent à leur jeu favori, le farniente, et risquent bien de se retrouver un jour dans la situation des Grecs : incapables de rembourser leurs dettes.

    Il faut réagir, ce pays ne travaille pas assez car il est en vacances et quand il œuvre, c’est toujours entre deux élections. Comment briser cette loi d’airain, cette anneau dans une chaîne d’acier ? _

    Jeanne, au secours !!

  • Turquie: le sultan Erdogan se débarrasse sans ménagement de son vizir…

    Turquie: le sultan Erdogan se débarrasse sans ménagement de son vizir…

    Certains avaient jugé mes précédents éditoriaux un peu secs, voire cassants. Je n’ai nullement exagéré et la suite des événements m’a donné raison : Monsieur Erdogan ne supporte pas la contradiction, il veut régner tout seul et entend finir par présidentialiser son régime, quoiqu’on puisse lui objecter. Par ailleurs, les inquiétudes qu’il suscite sont relayées à un très haut puisque Madame Merkel, qui dirige notamment l’Europe, espère que le départ du Premier Ministre n’entraînera pas l’annulation de l’action de l’UE avec la Turquie concernant les migrants.

    Cette déconvenue de Madame Merkel qui a tout misé sur un allié fantasque va montrer encore plus l’inanité de cet accord avec la Turquie. Cela revient à mettre son cou dans un nœud coulant que Erdogan peut serrer ou relâcher à sa guise : c’est une arme thermonucléaire placée entre les mains d’un homme imprévisible. Le monde entier a vu qu’il jouait double jeu avec l’Etat Islamique. Et les journalistes qui l’ont dénoncé ont été condamnés à de le prison. Hier il y a même eu un attentat qui a heureusement été déjoué. La Turquie a mieux à faire qu’à instaurer un régime autoritaire. Elle devrait s’intéresser à son environnement régional naturel et ne pas se bercer d’illusions concernant une hypothétique adhésion à l’UE…

    L’UE doit changer de politique à l’égard des migrants, la commission de Bruxelles va faire éclater l’Union en cherchant à imposer l’accueil de migrants. Ce qu’il faut, c’est rétablir la loi et l’ordre en Irak et en Syrie, sauver les migrants de la noyade, les soigner et les nourrir, et les renvoyer enfin d’où ils viennent, lorsque leurs pays d’origine seront stabilisés. On ne peut ouvrir les vannes ainsi. Rien qu’en une semaine, la marine italienne affirme avoir sauvé près de 1800 migrants de la mort. C’est très bien.. Et quand on réalise que depuis de début de ces migrations, près de 5000 personnes, hommes, femmes et enfants, ont disparu en Méditerranée, devenue un véritable cimetière pour des morts sans sépulture, on est envahi par un puissant sentiment de honte. Et pourtant, l’Europe n’est plus en mesure d’accueillir et encore moins d’intégrer toutes ces populations si différentes.

    Le pape est dans son rôle quand il dit qu’il faut faire preuve d’altruisme et de générosité mais ce n’est pas lui ni son administration qui doivent séparer le grain de l’ivraie, les vrais réfugiés politiques, d’une part, et les terroristes infiltrés, d’autre part.

    Mais il semble que l’Europe s’éloigne de ses racines, de son humus culturel. L’élection d’un maire anglo-pakistanais à Londres, où la population d’origine étrangère dépasse les 40%, montre que l’on prend une tout autre direction que celle d’une fierté, d’un destin national ou d’une histoire commune enfin totalement assumée.

    Mais, au fond, ce n’est pas si mal, car quatre années passeront vite et on pourra constater si les promesses faites auront été tenues. Je ne parviens pas à comprendre comment a pu être battu un excellent produit du corps traditionnel britannique.

    Londres est elle encore Londres ?

  • François Hollande, quatre ans déjà

    François Hollande, quatre ans déjà

    C’est presque l’heure du bilan, certains diraient plutôt l’heure de sonner l’hallali. J’ai même entendu ce matin sur une chaîne de télévision un éditorialiste fait un jeu de mots assez désagréable entre bilan et dépôt de bilan. Le même commentateur, généralement mieux inspiré, a même ajouté que l’unique façon pour François Hollande de rentrer dans l’Histoire serait tout bonnement de raccrocher les crampons, de dire publiquement : je n’y vais pas, j’ai échoué sur tous les fronts, je ne me représenterai plus. Et le même d’ajouter que cela lui garantirait une reconversion dorée en conférencier international, invité partout dans le monde, etc… De profundis

    Heureusement qu’il n’est pas allé plus loin, en recommandant par exemple à «l’actuel locataire de l’Elysée» de rendre son tablier sur le champ et de provoquer une crise institutionnelle, avec élections présidentielles anticipées, élections législatives, bref le bouleversement.

    Non, il faut savoir raison garder. La situation est délicate et même les thuriféraires du président de la République ne peuvent pas le nier, sous peine de n’être pas suivi ni pris au sérieux par personne.

    Il faut reconnaître que quelque chose n’a pas fonctionné dans ce quinquennat, c’est la communication, trouver l’oreille des Français ; on a l’impression que les communiquants de l’Elysée n’ont pratiquement jamais appuyé sur le bon bouton. Aucun prédécesseur de François Hollande, pas même Nicolas Sarkozy accusé maintes fois d’être clivant n’a été aussi bas dans les sondages. N’étant pas superstitieux mais philosophe rationaliste, je ne crois pas à une malédiction quelconque. Mais force est de constater que mis à part la réponse, digne et courageuse du président aux attentats, on n’a pas trouvé le ton juste. Et en ces moments tragiques, le pays tout entier était uni derrière son président. Et il y eut cet intermédère désolant autour de la déchéance de nationalité. Pourquoi ?

    Et ceux qui ont encouragé le président à cette prestation télévisée qui, de l’avis de tous, même des caciques du PS, fut une exécution capitale, l’ont envoyé au casse-pipe, sans casque lourd. Et je ne parle même pas de la petite phrase : ça va mieux ! Même le complément, tardif alors qu’il se voulait simplement correctif, n’a rien arrangé ! Oui, cela va mieux mais pas pour tout le monde.

    Mais alors pourquoi l’avoir dit selon la première version, la seule qui s’est incrustée dans l’esprit des concitoyens ? Autant de détails cruciaux qui relèvent de la compétence des spin doctors, les communiquants… Mais qui conseille le président ?

    Et comment en sommes nous arrivés là ? Pourquoi donc toutes les réformes, dont certaines sont bonnes et utiles au pays, sont-elles torpillées avant même que d’être portées sur les fonts baptismaux ? Regardez les projets de lois Macron et présentement el-Khomri ? La ministre du travail est sympathique et touchante mais était-elle de taille à porter une telle loi qui a fini par porter son nom ? Il eût fallu confier cette tâche à un authentique poids lourd du gouvernement, et cela dit, sans misogynie ni réserve d’aucune sorte sur la personne !

    Alors comment s’explique cette situation que nous vivons où sondage après sondage, le président ne remonte pas ? Pourtant, il travaille, il voyage, il laboure le pays, il est intelligent, ce n’est pas un homme politique de seconde catégorie, tout au contraire il a passé une décennie à la tête du PS, inventant sans discontinuer des synthèses, même les plus improbables et les plus inattendues, éventant tous les complots dont cette formation a toujours été friande…

    Aujourd’hui encore, alors que le président jouit d’un alignement extrêmement favorable de toutes les planètes (l’Euro favorable aux échanges,, le pétrole moins cher, la baisse du chômage, la baisse de la dette, etc…), rien n’y fait : il ne remonte toujours pas dans les sondages.

    Certains expliquent même qu’il n’est plus audible quoiqu’il fasse car les Français qui l’ont élu ne lui pardonnent pas d’avoir changé de politique, tournant le dos à ses promesses d’il y a quatre ans. Mais cet argument est irrecevable au motif que tous les hommes politiques l’ont fait avant lui ! N’oubliez pas qu’on vit dans le pays d’un certain Jacques Chirac, immortalisé par cette phrase d’un cynisme politique insurpassable : les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent.

    On a pardonné cela à Chirac et à tous ses prédécesseurs. Pour François Hollande, cela ne passe pas. Pourquoi ?

    Il faut aussi signaler la carence d’un grand absent, le PS devenu une véritable coque vide. Je trouve que l’actuel Premier Secrétaire représente un indéniable progrès par rapport à son prédécesseur, mais cela ne se concrétise pas dans des propositions, des projets de loi, etc… Au plan humain, Jean-Christophe Cambadélis est un homme bien, pondéré, mesuré, mais on le sent mal à l’aise, un peu gêné aux entournures. Quand on fait de la politique, il ne faut pas avoir un cœur pantelant : il faut être froid et déterminé.

    Comment sortir de la nasse ? Un acte d’autorité, comme remercier certains ministres, ne serait-il pas la solution. Mais François Hollande que tous trouvent subtil n’est pas assez méchant. En politique cela peut devenir fatal.

    Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève du 6 mai 2016