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  • Faire grève, est ce bloquer, paralyser tout un pays?

    Faire grève, est ce bloquer, paralyser tout un pays?

    C’est la question que tous les observateurs, même les plus détachés et les plus objectifs, se posent avec une certaine perplexité : que veut, que cherche la CGT dont la position, jadis dominante, dans la vie syndicale, s’effrite de manière préoccupante ? La réponse ne fait plus de doute, même dans les rangs socialistes pro-gouvernementaux : la CGT plonge le pays tout entier dans un état pré insurrectionnel où ses membres et les forces de l’ordre s’affrontent sans discontinuer sous le regard désabusé des automobilistes englués dans d’interminables files d’attente devant les stations-services ; et le plus souvent pour repartir bredouilles, craignant la panne sèche.

    Faire grève, comme le prévoyait la loi au milieu du XIXe siècle, c’est protester contre les patrons, ce n’est pas s’en prendre à l’Etat en tant que tel pour le faire plier. Bloquer les raffineries, suspendre les livrassions de carburant, entraver la libre circulation des personnes et des biens, tout ceci n’a rien à voir avec l’exercice du droit de grève.
    Selon la CGT il faudrait retirer purement et simplement la loi travail, faut de quoi le mouvement s’amplifiera et se radicalisera toujours plus.

    Est-ce une revendication légitime ? Qui gouverne en France ? Le parlement, le gouvernement ou la rue ? Si c’est la rue, à quoi voter des lois ? Or, là la loi travail qui a été vidée de son contenu, ne devrait pas être retirée puisqu’elle modernise les rapports entre les partenaires sociaux. Et permet, surtout, d’inverser la courbe du chômage dans les configurations les plus optimistes.…

    Derrière cela, dit la CGT, se profile la volonté de François Hollande de se présenter aux élections présidentielles. Il fait donc tout faire pour être en situation. Mais en pesant de la sorte sur la société française, la centrale syndicale est en train de rendre cette candidature quasi-impossible : l’accumulation de l’état d’urgence, de la menace d’attentats, les grèves, les blocages, les occupations des raffineries, le mouvement de nuit debout sur la place de la République, etc… tous ces éléments ne contribuent pas à donner une image séduisante du pays.

    La question qui vient à l’esprit est la suivante : la France est elle inamendable, irréformable, rétive, dans son ADN, à toute idée de réforme ? C’est ce que se demande la presse allemande qui fait un jeu de mots entre Frankreich et Streikland (pys où la grève est reine) .

    Quel gouvernement, digne de ce nom, irait jusqu’à retirer une loi, même si elle a été votée par le 49-3. Le pays traverse une passe difficile. Il serait très dangereux de miser sur le pourrissement de la situation. Il ne faut pas penser que l’Euro ou les vacances vont y changer quelque chose. Il faut trouver une solution. Peut-être suspendre l’application de la loi. Je vois mal le gouvernement se coucher ni la CGT se calmer.

    C’est triste. Quelle image le pays donne t il de lui-même ?

  • Ce qui se passe en Autriche

    Ce qui se passe en Autriche

    On a l’impression que si le candidat Norbert Hoffer était élu, ce serait la fin du monde. Les institutions européennes, la presse mondiale, tous les médias, bref, une quasi-unanimité nous menace des pires effets si jamais le peuple autrichien élisait démocratiquement son président, un président qui, soit rappelé en passant, a un rôle purement honorifique, même si, dans ce domaine, les symboles comptent.

    Paradoxalement tout le monde s’agite, tout le monde condamne, même par avance, mais personne ne veut explorer objectivement le passé de ce pays qu’est l’Autriche, passé en moins d’un siècle, de grande puissance européenne, regroupant des dizaines de millions d’hommes au sein de la fameuse double monarchie austro-hongroise, à moins de dix millions d’âmes.

    Je connais bien Vienne où j’ai souvent séjourné, donné des conférences et aussi étudié les manuscrits hébreux de la Staatsbibliothek. Et de cette expérience vécue sur place, j’ai retiré quelques enseignements.

    Mais avant d’y venir, jetons un rapide coup d’œil sur les faits historiques dont deux, en l’état actuel, me semblent avoir une importance majeure : a) il y a quelques siècles, l’empire ottoman, donc un islam militant et conquérant, était aux portes de Vienne et c’est d’ailleurs à cette présence invasive que certains attribuent la naissance du croissant que l’on dévore à belles dents chaque matin que Dieu fait. b) Vienne et l’Autriche en général furent la citadelle de la contre réforme, stoppant net l’expansion de la foi évangélique.

    Ces deux faits expliquent un certain conservatisme, mais aussi, hélas, des relents d’antisémitisme qui remontent à très loin, notamment à l’époque de Karl Lueger, le maire antisémite de Vienne, un maire dont la main droite ignorait ce que faisait sa main gauche : en effet, pour ses campagnes électorales, il n’était pas très regardant car, comme chacun sait, l’argent n’a pas d’odeur. Et les grandes fortunes juives y contribuaient largement…

    On peut donc dire que le repli sur soi et la crispation identitaire sont des éléments qui ne sont pas nouveaux dans le beau ciel viennois. A cela vient s’ajouter une ambiance presque palpable de déclin, de grandeur passée, si savamment entretenue par des monuments et des quartiers entiers de Vienne, le Burgtheater, la Ringstrasse le Prater, la majestueuse cathédrale, etc… Lorsque vous vous promenez dans le cœur même de la capitale, dans ce prestigieux premier arrondissement, que remarquez vous sur les panneaux indicateurs ? On ne signale pas la direction de Graz ni de Linz mais de Budapest et de Prague ! Le pays a rétréci, ce qui constituait jadis son hinterland est devenu une entité étrangère. L’Autriche ne regroupe plus que 8 millions d’habitants

    Je vous fais grâce d’un humour viennois mortifère, grinçant (Galgenhumor) du genre : la situation est désespérée mais ce n’est pas grave…

    L’Autriche n’a rejoint l’Union Européenne que très tardivement, il lui reste encore quelques vieux réflexes protectionnistes et régionalistes, pour ne pas dire provincialistes. En une phrase, ce pays a voulu s’accrocher à des mythes du genre le beau Danube bleu alors que le fleuve avait besoin d’un sérieux assainissement pour redevenir présentable. Et le tout à l’avenant, songez au bal et au concert du 1er janvier retransmis à la télévision, aux valses viennoises entraînantes : toutes ces choses ne peuvent pas déserter l’âme autrichienne d’un seul coup. Je me souviens même d’un dîner chez le plénipotentiaire autrichien à Paris au cours duquel un éminent violoniste m’a posé cette étonnante : Selon vous, Monsieur le professeur, qu’est ce qu’un Autrichien… Comme dirait Levinas, quand on commence à s’interroger sur son identité, c’est qu’on l’a déjà perdue !

    Arriva enfin ce déferlement migratoire qui a tout changé. J’ai entendu hier soir une dame vivant dans une zone rurale, décrie le sentiment de panique qui s’était emparé de tous ses concitoyens : au début ce furent quelques centaines de migrants arabes qui traversaient le pays, chaque jour, et soudain ce furent des milliers qui leur emboîtèrent le pas. Les gens se sont sentis envahis, minoritaires dans leur propre pays, entourés d’une population qui ne parlait pas leur langue ni ne partageaient les mêmes croyances… Pas même la même culture !

    En fait, ce que l’Allemagne voisine pouvait se permettre, vu sa taille et ses moyens, la petite Autriche le vivait comme un cauchemar… Les partis traditionnels qui se partagent le pouvoir depuis la in de la guerre ne sont plus adaptés à la nouvelle situation.

    Comment voulez vous que les électeurs ne se tournent pas vers une nouvelle force politique pour laquelle, en mon âme et conscience, je n’ai pas de grande sympathie, tout en respectant le droit des peuples à se doter des gouvernements qu’ils souhaitent.

    Toutes ces raisons me poussent à dire que l’élection de Norbert Hoffer à la présidence ne serait pas la fin du monde. Ne dit on pas qu’en France Marine Le Pen est assurée d’être au second tour de l’élection présidentielle alors que l’actuel président en exercice n’est pas vraiment certain d’y figurer ?

    Les Autrichiens exagèrent sûrement le danger que représente l’islam ; mais si vous observez bien la sensibilité dans notre continent, vous verrez qu’ils ne sont pas seuls : les Suisses ont rejeté les minarets, les Tchèques, les Hongrois, les Bulgares, les Polonais, les Slovaques se sentent eux aussi concernés.

    La crise provoquée par les migrants aurait pu être évitée si l’égoïsme de notre continent n’avait pas prévalu au détriment de la solidarité : au lieu d’intervenir puissamment sur place, on a laissé l’Etat Islamique se renforcer et s’étendre. Et on commet la même erreur fatale en Libye ou le terrorisme risque de s’étendre à la petite Tunisie voisine, laquelle n’est qu’à quelques encablures de l’Italie…

    Alors pourquoi faire la leçon à l’Autriche ?

    Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève du 23 mai 2016

  • La France, ingouvernable, à l’abandon…

    La France, ingouvernable, à l’abandon…

    Depuis la présentation de la loi travail et le recours à l’article 49 alinéa 3 de la constitution, la France ne vit pas normalement. La CGT qui est en recul, a envenimé la situation afin de reprendre des forces et de stopper la désaffection dont souffre ce syndicat. Le problème est que ce bras de fer perturbe la vie des gens.

    On ne compte plus les manifestations, les grèves, les rassemblements, les troubles à l’ordre public, les attaques de plus en plus violentes contre les policiers, et à présent c’est la volonté de paralyser le pays puisque la CGT bloque les lieux de ravitaillement, les centrales d’alimentation et aussi, depuis peu, les sources d’énergie.

    La pénurie des carburants se profile à l’horizon car les syndicalistes bloquent les dépôts de carburant et même les usines de raffinage. Ce qui est un véritable acte de sédition civile, une tentative de mettre le gouvernement et le pays à genoux. Les préfets ont dû émettre des arrêtés de rationnement, de restrictions d’offre des carburants. Ces raffineries qui sont à l’arrêt requerront plusieurs jour pour re-fonctionner normalement.

    Est ce que ces moyens de pression sont constitutionnels ? Quel droit permet aux syndicalistes de peser de cette manière sur la vie des citoyens ? Et tout cela parce qu’ils veulent continuer à imposer à l’Etat toute une série de privilèges indus. Les Français continuent de vivre largement au-dessus de leurs moyens et refusent d’affronter la réalité : à savoir ne dépenser que ce que l’on gagne, veiller à l’adéquation parfaite entre les recettes et les dépenses. Une bonne gestion comptable.

    Que cherche la loi dit el Khomri ? Elle cherche à faire confiance aux employeurs afin qu’ils embauchent du personnel et stimulent ainsi la croissance tout en faisant baisser le chômage. Ainsi on a voulu inverser la hiérarchie des normes : c’est-à-dire que chaque entreprise négocie ses relations avec son personnel et on n’a plus à se soumettre à des accords de branche. La persistance de ce dernier système explique que l’on soit dans cette situation déplorable qui caractérise la France depuis de nombreuses années. On achète la paix sociale au prix d’un endettement et de déficits colossaux. Peu importe, à partir du moment où les gens ne manifestent pas dans les rues, ne bloquent pas les trains et les avions…

    Le problème est que la loi travail, ayant été adoptée par le 39-3, va revenir du sénat à l’assemblée nationale où il faudra de nouveau le 49,3. Mais cette fois-ci, les frondeurs auront trouvé les signatures manquantes… Que passera t il ? Un psychodrame de plus.