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Religion - Page 5

  • Le pouvoir intempestif de l'Islma de la Charia par Tilman NAGEL

     

        Dans un excellent article, d'une longue exceptionnelle, parue dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung du 5 février , page 35, M. Nagel expose ses idées sur l'islam de la charia, comprenez l'islam ultra-orthodoxe, qui se croit seul en possession de la vérité religieuse, à l'exclusion des autres écoles de jurisconsultes et d'exgètes.

        Comme l'article est rédigé dans un allemand universitaire et quelque peu difficile à saisir de prime abord, on va en résumler les thèses principales:

       a) selon l'auteur, ce islam de la charia s'oppose à un autre islam, plus ouvert et plus rationnel, celui de la secte des Mu'tazilites du Moyen Age qui se voulaient des théologiens modérés, respectueux de la loi divine mais très attentifs à l'exercice éthique de sa souveraineté sur terre. Ils firent de l'attachement à l'unicité et à la justice divines leur Leitmotive. Ce qui leur attira l'appelation suivante dans la théologie islmaique médiévale, ahl al-'adl wa-l-tawhid (les adeptes de la justice et de l'unité).

       b) Procédant comme doivent le faire les critiques des traditions religieuses, l'auteur s'appuie sur la philologie pour faire ressortir le sens véridique de certains versets, notamment ceux dits du trône de Dieu, et selon lesquels, d'après une lecture littéraliste, Dieu n'accorde la bonne intelligence des choses qu'à ceux qu'il a bien voulu choisir. En somme, foi en Dieu et intelligence des choses d'ici-bas seraient une pure grâce divine.

        c) Considéré comme une simple créature, soumise aux lois de Dieu, l'homme n'aurait d'autre alternative que d'obéir sans rechigner à la loi d'Allah telle que stipulée dans le Coran. Les littéralistes, avec à leur tête le fameux Ibn Hanbal (IXe siècle),dictent alors leur propre vision de la loi en arguant que leur lecture de celle-ci est bien l'intention du texte sacré. Ce qui exclut, eo ipso, toute autre approche du texte.

       L'auteur développe bien sa thèse d'une ultra-orthodoxie islamique auto-proclamée qui dicterait sa loi aux autres, notamment à ceux des musulmans qui souhaitent s'intégrer à la socio-culture judéo-chrétienne des pays d'Europe où ils vivent.

       C'est un bon débat, bien mené, avec de bonnes aptitudes et un grand respect.
     

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  • L'affaire Finaly, soixante ans après…

     

     

        Vu hier soir, samedi 9 février sur France 3 une large et belle rétrospective de ce que l'on a appelé l'affaire Finaly, un peu comme on avait parlé, quelques décennies auparavant, de l'affaire Dreyfus… De quoi s'agit-il? Un couple de jeunes juifs autrichiens, fuyant le nazisme, se réfugient en France avec leurs enfants. Persécutés et poursuivis par la Gestapo dans l'Hexagone occupé, ils confient leurs deux enfants Robert et Gérald à une connaissance qui les remet à son tour à une autre dame laquelle les place dans une institution catholique où ils sont baptisés en secret 

       A la fin de la guerre, une tante des enfants tente de les récupérer et on lui oppose un refus catégorique en lui apprenant que les enfants ne sont plus juifs et qu'elle doit donc les oublier… Cette dame, Madame ROSNER, se battra pendant près de huit ans et demi et finira, au terme d'un épuisant combat juridique, par récupérer  (en 1953) ses neveux qui vivent désormais en Israël où l'un est médecin comme son père et l'autre, industriel. L'un et l'autre sont mariés et ont chacun deux enfants…

       Retracer l'histoire par le menu serait impossible, mais quand on réalise le chemin parcouru entre juifs et chrétiens, on remercie la divine providence d'avoir suscité dans l'Eglise catholique des hommes et des femmes enfin conscients que le message du Christ dont ils se disent les dépositaires, est amour, douceur et non pillage des âmes et conversions forcées!! Surtout quand il s'agit d'enfants qui n'ont pas encore dix ans…

        Vers la fin de sa vie, j'ai bien connu le Grand Rabbin Jacob Kaplan qui avait puissamment contribué au dénouement du conflit et qui m'avait demandé de préfacer son dernier livre sur cette affaire; je commençai par refuser arguant que je n'avais pas encore trois ans lors du dénouement de la controverse, il insista et le livre est finalement paru. aux éditions du Cerf.

      Quelles conclusions tirer de cette pénible affaire? Oublier le passé, ne pas ressasser les fourberies de certains éléments ecclésiastiques qui compromirent, par leur débile inconscience, les relations judéo-chrétiennes qui se portent désormais bien et avancent en toute confiance sur le chemin d'une sérénité retrouvée.
     

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  • Le dictionnaire du Coran, Robert Laffont, coll. Bouquins, 2007

     

          Dictionnaire du Coran sous la direction de Mohammad Ali AMIR-MOEZZI. Bouquins,  Robert Laffont, 2007.

    Peut-on dire qu’il y va du Coran pour les musulmans comme de la Bible pour les juifs ? Tout en part et tout y revient ? C’est le sentiment qui s’empare du lecteur lorsque celui-ci se donne la peine de lire attentivement les entrées qui sont traitées dans ce Dictionnaire du Coran.
    Il faut féliciter les éditions Robert Laffont et la collection Bouquins de ne pas avoir reculé devant l’immensité et le caractère ardu de la tâche. La diversité des auteurs, le respect de l’unique critère, la science objective et l’approche historico-critique, font de cet ouvrage une œuvre de référence et un très bon instrument de travail. Pas la moindre trace d’apologétique, un grande ouverture d’esprit dans le traitement des sources les plus diverses, le choix des islamologues les plus compétents, tous ces éléments assureront à ce Dictionnaire une longévité exceptionnelle.
     Cette impression est confirmée par l’excellente introduction intitulée Un texte et une histoire énigmatiques. Je voudrais souligner la subtile distinction faite par un savant cité, entre l’acte d’écrire, qui n’implique pas toujours une publication écrite, et l’acte de publier qui se fit longtemps  de manière orale. Trois personnalités ont, lit-on, joué un rôle important dans l’établissement du texte coranique : 
    a) Ubayallah ben Yiyyad , le cruel gouverneur d’Irak.
    b)    Al-hajjaj ben Yousef
    c)    Le calife Abd al-Malik qui parle d’avoir collecté le Coran (jama’tu al-Kor’an)

    La version coranique uthmanienne mit plusieurs siècles avant d’être acceptée.. Les exemplaires «non orthodoxes» furent détruit dans des bains d’huile bouillante L’auteur de ‘introduction cite longuement les meilleurs représentants de l’islamologie européenne du siècle dernier (presque tous des juifs) le savant hongrois germanophone Ignaz GOLDZIHER. Il existe dans cette introduction un léger oubli, mais celui-ci est immédiatement réparé (presque providentiellement) par l’article portant sur Caïn et Abel du professeur israélien Méir Bar-Asher lequel cite le texte d’Abraham Geiger, Was hat Mohammed aus dem Judentums aufgenommen ? (Rééd. Leipzig, Kaufmann  1902)

    Un dictionnaire ne se lit pas de manière linéaire et doit obéir à l’ordre alphabétique, même lorsque celui-ci se révèle parfois cocasse : après l’article sur Aaron, on tombe sur les abeille et l’abattage rituel… Curieuse transition, mais pouvait-on l’éviter ? Il eût fallu changer toute l’économie du Dictionnaire en regroupant par exemple les sujets théologiques, philosophiques, les personnages importants, etc… Au début, j’avais pensé ne rédiger cette notice qu’après lu la totalité  des 981 pages, ce qui eut remis aux calendes grecques sa parution. Un rapide sondage des entrées les plus emblématiques montre que l’on peut se concentrer sur les points essentiels et revenir, le cas échéant, sur d’autres notions.
    Abraham est, par exemple, un personnage clé et l’article qui le traite est remarquable. Il ne laisse rien de côté et examine la présentation coranique du père du monothéisme sous tous ses aspects. Une réserve, cependant : il ne faut pas parler de sacrifice mais de ligature d’Isaac. Le Coran ne dit pas si c’est Isaac ou Ismaël. Tabari, le grand exégète de l’islam, pense que c’était Isaac mais les commentateurs ultérieurs ont parlé d’Ismaël.
    L’article sur l’abrogation, naskh, revêt une importance particulière du seul fait que l’islam, dernière des trois religions monothéistes, se présente comme la doctrine qui parachève celles qui lui préexistaient. Il se trouva donc confronté à la question suivante : que pouvait-il conserver des croyances antérieures ou que devait-il en abroger ? Comme tous les jurisconsultes, les tenants du Coran ont dû élaborer une théorie cohérente : Une loi, réputée d’origine divine, peut-elle être abrogée ? Oui, si la loi en question a été altérée par les hommes. Enfin, pouvait-on abroger le verset  et le statut qu’il véhicule… La question a revêtu quelque acuité, notamment face aux juifs de la péninsule arabique qui n’entendaient pas changer leurs habitudes religieuses ni enfreindre leurs nombreux interdits alimentaires… Une certaine polémique coranique est allée jusqu’à dire que Dieu avait multiplié les interdits pour les juifs afin de les punir de leur indiscipline et de leur entêtement…
    Abu Bakr, le premier converti à l’islam, en quelque sorte, est considéré comme le compagnon  le plus fidèle du Prophète (sahib an nabi)
    Le premier homme ADAM, se voit accorder le rang de premier prophète. Les hommes  sont nommés banu Adam, comme dans la Bible bené Adam. Cette anthropogonie est somme toute banale : le Coran dit bien à son image Ala suratihi : la Bible disait déjà : be-tsalmo bidemuto Le Coran a accueilli des données juives mais post-bibliques, c’est-à-dire qui se trouvent dans les commentaires midrashiques et talmudiques. Par exemple, la chute de l’ange (ibliss) qui refuse de se prosterner devant l’homme au motif que ce dernier est fait d’argile alors que lui est à base de feu…
    Toujours les hasards de l’ordre alphabétique. : l’article consacré à l’adoption. Derrière un acte assez anodin, on trouve des détails sur la vie du Prophète, des questions de lignage, le sang impur ou inférieur qui pourrait bien affecter toute la descendance.
    Ali ben Abi Talib, éminent compagnon du Prophète et destiné à lui succéder, dut attendre son tour une bonne vingtaine d’années. Nous lisons que ce personnage, devenu la figure tutélaire du chi’isme, jouira cependant d’un prestige exceptionnel même auprès des sunnites. Ses partisans déplorent la censure de nombreux passages où le prophète en personne parlair de lui comme de son successeur désigné.
    Est-ce étonnant si à Ali succède l’entrée «alimentation» ? C’est Dieu qui, par sa grâce, dispense ses bienfaits à ses serviteurs qu’il lui a plu de distinguer. D’ailleurs, l’un des noms de Dieu est al-razzaq, celui qui offre et donne le rizq. L’islam n’a pas conservé tous les interdis alimentaires des juifs, si ce n’est la viande de porc et la consommation de boissons alcoolisées. Mais les catégories du permis et du défendu (licite et illicite) demeurent : halal et haram. Les bienfaits étant dispensés par Dieu, ceux qui s’enrichissent au détriment des autres, sont responsables de l’existence de la pauvreté et contrarient le dessein divin. Ils heurtent l’idée même de maslaha, le développement harmonieux de la création.
    Après Ali et l’alimentation, c’est le nom coranique de Dieu qui est étudié, Allah. Ce terme proviendrait de la contraction de al-Ilah, devenu à la longue Allah. Il semble que, comme la Bible hébraïque, ce soit le nom d’essence alors que la multitude d’autres noms ne désigne en réalité que des attributs d’action : le miséricordieux, le terrible, le majestueux, le redoutable etc…
    L’Ancien Testament revêt une importance particulière tant son apport, surtout indirect, fut décisif. En effet, on relève que le Coran ne cite pratiquement jamais un verset biblique verbatim, il en donne généralement des versions soit commentées, soit remaniées. Les récits sur Abraham iconoclaste, chassé par son père et échappant miraculeusement à la fournaise ; les récits afférents à Joseph qui refuse les avances de la femme de son maître Potipar… Le texte coranique parle soit des ahl al-kitab (gens du Livre, donc de la Bible) soit de la Taurah (Torah). On emploie aussi un terme pour désigner les feuilles ou les pages al-suhuf (e.g. suhuf Ibrahim wa-Mussa) : les écrits d’Abraham et de Moïse.
    Existait-il une traduction arabe du Pentateuque, avant celle de Saadya Gaon (882-942) ? Non, bien qu’on en attribue une, lacunaire, au grand théologien nestorien Hunayn ibn Ishaq et au savant karaïte Yefet ben Eli (que le regretté Georges Vajda a beaucoup étudié). Mais en dépit de ses nombreux emprunts, reconnus ou inavoués, le Coran articule contre les juifs des reproches très graves : ils auraient falsifié leur livre (tahrif qui vient de harf, pluriel huruf) et auraient transformé (tabdil) certains passages annonçant la venue du Prophète de l’islam.
    Un nouvel article consacré à al-salaf (ceux qui sont d’avant) a le mérite de remettre les choses à leur place ; l’auteur l’oppose à l’expression inverse, al-khalaf, ceux qui viennent après. Les salafistes sont donc les partisans d’un univers imaginaire, idéalisé qui n’a existé nulle part, hormis dans leur conscience.
    >Au résumé extrêmement succinct des notions survolées, on se rend compte de la richesse de cette œuvre. Ce ne sont là que quelques sondages effectués dans cette mine si abondante. Nous aurons l’occasion d’y revenir. Mais avant de conclure, félicitons une nouvelle fois les éditeurs (publisher et editor) ainsi que tous les auteurs qui ont mis leur science à notre portée.

                           






     

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