Jean-Marie LUSTIGER ou
comment retrouver la lumière de l’origine…
La disparition du Cardinal Jean-Marie (né Aaron) Lustiger, ancien archevêque de Paris, ne laissera personne indifférent. Que l’on ait approuvé ou, au contraire, condamné son itinéraire spirituel, cet homme, animé d’une foi absolument sincère, mérité notre respect. Il avait publié dans les derniers mois de 2005 dans les colonnes du journal Le Monde un texte inspiré, animé d’un souffle quasi prophétique et marqué du sceau d’une invincible sincérité. Voici un homme qui, après une vie active si riche, se souvient (mais l’a-t-il jamais perdu de vue ?) de sa double fidélité : celle qu’il doit au judaïsme de ses parents, ainsi qu’à son propre judaïsme, et celle qui le lie au catholicisme qu’il a embrassé à l’âge de quatorze ans, à une époque troublée, lorsqu’il fut confronté à un néant intérieur d’où une voix lui prescrivit le chemin à suivre…
Nous n’allons pas, au vu d’un texte si poignant et si émouvant, nous attacher exclusivement à un événement de nature éminemment personnelle, si crucial fût-il et si incompréhensible demeure-t-il pour un grand nombre de ses anciens coreligionnaires. Ce qui nous intéresse ici, c’est le judéo-christianisme vécu, incarné par un être qui ne cherche guère à masquer son écartèlement entre deux devoirs, deux fidélités et deux amours : comment cesser d’être juif pour être chrétien ?
Dès l’introduction, le cardinal rappelle le chemin parcouru en un demi siècle, tournant le dos à près de deux millénaires d’incompréhension, de persécutions et de conflits. Il s’arrête un instant sur le drame inimaginable de la Shoah avec le poids de douleur et de honte qu’il fait peser sur les consciences. Une vibrante allusion est faite à la visite historique du pape Benoît XVI à la synagogue de Cologne où le souverain pontife a exhorté juifs et chrétiens à faire preuve d’audace et à resserrer encore plus leurs liens. Cette mention du rapprochement entre juifs et chrétiens lui inspire une réflexion extrêmement pertinente sur la notion du judéo-christianisme et de valeurs judéo-chrétiennes où l’on veut généralement percevoir des contraintes, des restrictions ou des complications : cette mise au point s’imposait car si les mœurs de nos sociétés en perpétuelle mutation évoluent sans discernement véritable, il est incontestable que la vraie constitution de l’Europe –je parle de constitution éthique- est la Bible, la charte du judéo-christianisme.
Le cardinal relève que même des observateurs extérieurs et généralement peu favorables aux juifs et aux chrétiens les unissent et les citent ensemble, ce qui prouve qu’il existe entre eux plus qu’une simple connivence, une véritable communauté de destin, une Schicksalsgemeinschaft. Ce fait induit deux choses : juifs et chrétiens portent ensemble une responsabilité commune (ce terme connaît ici maintes occurrences) vis-à-vis de l’humanité, juifs et chrétiens sont les héritiers de la révélation biblique. Cette action commune constitue le vœu le plus fervent et le plus cher du cardinal qui parle d’abord de rencontre, ensuite de réconciliation et, pour finir, de retrouvailles. Sous la plume ou dans la bouche d’un prince de l’Eglise, cette gradation n’est pas le fruit d’un pur hasard ni la conséquence d’une émotivité mal contrôlée, c’est la manifestation d’un objectif sacré.
Et si l’avènement messianique n’était rien d’autre que la réunification de la grande famille juive, de toutes ses branches et de tous ses rameaux ? Si la césure, la fracture des premiers siècles de l’ère chrétienne, venait enfin à disparaître pour laisser place à un judaïsme dépourvu des traumatismes que l’Histoire lui a si cruellement infligés ?
Dans ces retrouvailles, le cardinal voit aussi une réponse possible à la mondialisation qui se profile avec insistance sur l’ensemble de la population du globe. Deux religions que l’histoire a si longtemps séparées, pourront-elles, un jour, s’unir pour contribuer au rassemblement des cultures et des religions ? On le voit, le cardinal a le mérite d’éviter les poncifs à la mode et n’évoque pas le «dialogue des cultures» mais leur rassemblement… Cette action ne peut être que bénéfique pour l’humanité tout entière. C’est le sens de l’annonce faite à Abraham (Gen. 12 ;3) seront bénies en toi toutes les familles de la terre ! A lui seul, ce verset préfigure la vocation messianique de la lignée d’Abraham, c’est-à-dire d’Israël.
Nous lisons ensuite des réflexions d’une grande sagacité sur l’essence des juifs et du judaïsme : les juifs sont-ils encore un peuple (une communauté nationale) ou simplement une religion (communauté religieuse) ? On peut parler des deux, tout en tenant compte d’une incontournable altérité juive, un peuple pas comme les autres, une nation différente des autres. On sent ici les hésitations de l’auteur qui craint que l’attachement des juifs à cette spécificité voulue de Dieu ne «dégénère» en particularisme auquel l’Eglise a constamment opposé l’universalisme chrétien. On découvre aussi avec une satisfaction profonde que la dispersion des juifs sur la surface de la terre ne conduit pas nécessairement au gommage de l’appartenance au peuple juif.
Il n’est pas inexact de relever quelque chose de contradictoire entre une fidélité aux pratiques juives qui confine à la crispation et une vocation messianique à la fois universelle et universaliste. C’est là la source de toutes les contestations judéo-chrétiennes, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. Comme le disait jadis Jules Isaac, il faut laisser son messianisme à Israël. Ce messianisme, exclusif ou partagé, constitue la vraie ligne de démarcation entre les deux religions. Avec une componction très ecclésiastique et dans sa volonté de ne heurter personne, le cardinal écrit d’ailleurs quelques lignes sur la vocation universelle de «l’Eglise du Messie». Qui pourrait le lui reprocher ? C’était le moins qu’un cardinal, même né juif, pouvait faire…
Juifs et chrétiens, pris dans une démarche unitaire mais qui respecte les différences, doivent expliquer à l’humanité son monogénisme, c’est-à-dire qu’elle est une, issue d’un homme unique et obéissant à un Dieu un. Les prophètes, les envoyés du Seigneur, doivent, selon la belle formule du cardinal, guetter la lumière de l’origine, non l’imposer. C’est saluer la vigilance et la lucidité des prophètes d’Israël qui proclamèrent la vocation universelle de leur peuple : n’est-ce pas ce qui est confié à Jérémie qui ne doit pas limiter sa pratique visionnaire à la tribu de Jacob mais en faire bénéficier tous les peuples ? Telle est bien l’expression de l’espérance juive pour le monde…
Ce monde qui n’était pas constitué des seuls juifs mais aussi de nombreux païens que l’Eglise a attiré vers elle au point de devoir unifier en son sein deux rameaux assez distincts : le judéo-christianisme, d’une part, et le pagano-christianisme, d’autre part. Cet afflux massif n’a pas manqué de heurter le judaïsme des premiers siècles chrétiens. Car, on l’oublie souvent, les Apôtres étaient des juifs et le verset des Evangiles qui parle des racines et des branches fait allusion à ce qui allait se muer en un divorce bi-millénaire.
Qu’allons nous faire, demande le cardinal ? Allons nous nous contenter de gérer ce contentieux et attendre que les choses avancent d’elles-mêmes, ou devons nous, au contraire, agir en faveur de cette amitié voulue de Dieu ? On devine sans peine ce que préconise le cardinal… Il lance un appel à l’unité, une unité à ne pas confondre avec l’unification religieuse, synonyme de prosélytisme.
Ces développements du cardinal Lustiger ne manquent pas de nous interpeller car ils nous confrontent à ce face-à-face, à ce vis-à-vis permanent entre juifs et chrétiens, séparés depuis deux mille ans et pourtant condamnés à vivre ensemble. En nous communiquant ces réflexions qui le touchent au plus intime de son être de juif et de chrétien, le cardinal nous dévoile une âme ou une sensibilité presque mystique. Pour reprendre une boutade de Jacques Derrida qui parlait alors du talmud, le cardinal ne connaît probablement pas la kabbale mais «celle-ci s’y connaît en lui.» J’avoue avoir pensé à la kabbale lourianique, celle de la ville de Safed au XVIe siècle, en me penchant sur ce texte à la fois sincère et dense. S’il n’était irrévérencieux de faire cette comparaison, je rappellerai le cri du Faust de Gœthe : zwei Seelen pochten ach ! in meiner Brust : deux âmes (cœurs) battaient hélas ! dans ma poitrine !
Si l’on transposait en termes de kabbale lourianique toute cette problématique judéo-chrétienne, telle que le Cardinal l’a vécue jusqu’a la fin, on pourrait dire que les étincelles de son âme ont conservé toute la force de leur attachement à la lumière de l’origine. Aurait-elle besoin d’une purification comme le veut la règle pour tous les mortels ? Une vie passée à tenter de découvrir ce qui unit les deux croyances paraît l’en dispenser.
Retenons ce vibrant message d’amour et d’espoir d’un homme qui nous a dévoilé la vérité de son existence.
Maurice-Ruben HAYOUN
Philosophe, écrivain
(article paru ce jour dans Le FIGARO en page, du 7 août 2007 sous le titre: HOMMAGE À UN GUETTEUR DE LA LUMIÈRE DE L'ORIGINE.
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HOMMAGE À UN GUETTEUR DE LA LUMIÈRE DE L'ORIGINE
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Les derniers développements au Vatican
Nombreux sont les catholiques (dont je ne suis pas) qui, attachés aux conclusions de Vatican II, si'nquiètent des récentes initiatives de la Curie romaine qui tendent à renforcer l'idée qu'une reprise en main se profile. certains éditoriaux, notamment du Monde de cette semaine, n'hésitent pas à parler de rigidification…
Le terme est un peu exagéré: le nouveau pape est littéralement obsédé par l'unité des chrétiens, ce qui explique son voyage (contre vents et marées en Turquie) et sa main tendue aux chrétiens d'autres obédiences que celle de Rome.
La messe en latin constitue pour un certain nombre de catholiques un symbole dont on les avait injustement privés il y a près d'un demi siècle. La nouvelle autorisation romaine ne la replace dans son exclusivité mais se contente d'en libéraliser l"usage. Je doute que les paroisses acquises à Vatican II abandonnent leurs pratiques lirugiques actuelles pour se mettre à latiniser… Pas de risque de contagion, peut-être un petit souci de capillarité si certains, alarmés par le vide des églises, croient bon de latiniser pour les repeupler…
Il demeure que ce pape est étonnant: quand on lit avec attention son livre sur Jésus de Nazareth, quand on analyse ses propres analyses sur la méthode historico-critique et l'exégèse canonique (sans oublier ses débats avec le professeur-rabbin Jacob Neusner des USA) on sent qu'on a affaire à un grand érudit, nourri de science et de connaissance puisées aux meilleures sources.
Il est vrai aussi qu'il souligne que la science ne saurait tenir lieu de foi ni de religion. Comment le Saint Père Benoît XVI effectue-t-il la synthèse? Probablement par ce que les philosophes nomment, en désespoir de cause, l'unité organique.
C'est-à-dire: lorsque nous ne parvenons pas à rapprocher deux choses par la voie conceptuelle, nous y suppléons en quittant le solide terrain de la déduction pour aborder celui de l'analogie et de la métaphore…Lien permanent Catégories : Religion -
La Bible et l'histoire
BLOG LA BIBLE ET L’HISTOIRE
LA LECTURE CAPTIVANTE ET ATTENTIVE DE L’ENTRETIEN DU PERE JEAN-MICHEL BOFFET, DIRECTEUR DE L’ECOLE BIBLIQUE DE JERUSALEM, SUR L’INTELLIGENCE DE LA BIBLE, PARU DANS LE MONDEEN DATE DES 8/9 AVRIL, M’INSPIRE QUELQUES REFLEXIONS, EN CES TEMPS DE MONTEE DE L’INTEGRISME ET DE DIVORCE CROISSANT ENTRE LA SCIENCE ET L’HISTOIRE D’UNE PART, ET LA FOI ET LA TRADITION RELIGIEUSE, D’AUTRE PART.
EN CETTE PERIODE DE TREVE PASCALE OU, PAR LES HASARDS DU CALENDRIER LITURGIQUE, JUIFS ET CHRETIENS CELEBRENT, A LEUR FAÇON, LA FETE DE PESSAH ET DE PAQUE, IL EST BON DE DONNER UN PEU D’AMPLEUR A L’ACTUALITE RELIGIEUSE. LE PERE BOFFET EST UN EMINENT BIBLISTE QUI NE SACRIFIE NULLEMENT LA CRITIQUE A L’ADHESION RELIGIEUSE ET DONNE DU PROBLEME POSE UNE PRESENTATION SATISFIASANTE. NOUS AIMERIONS, EN QUELQUES LIGNES ESQUISSER UN TABLEAU PLUS GLOBAL INCLUANT A LA FOIS LA TRADITION JUIVE ET LA TRADITION CHRETIENNE.
LA BIBLE, PRESENTEE COMME UN DOCUMENT REVELE, MERITE UNE APPROCHE PLUS CIRCONSTANCIEE QUE CELLE GENERALEMENT ADOPTEE PAR LES MINISTRES NAIFS DU CULTE CHRETIEN ET JUIF. L’EXEGESE JUIVE ANCIENNE, C’EST-A-DIRE LA LITTERATURE TALMUDIQUE ET MIDRACHQIUE QUI REMONTE JUSQU'A L’AN 1200 DE NOTRE ERE, FUT PARFAITEMENT CONSCIENTE DES PROBLEMES POSES PAR UN TEXTE AUSSI COMPOSITE QUE LES VINGT-QUATRE LIVRES DU CANON BIBLIQUE. CES SOURCES JUIVES ANCIENNES NE SE FAISAIENT GUERE D’ILLUSION SUR LE POLYSEMANTISME DU VERBE DIVIN, SUR SA POLYSEMIE, DONC SON INFINITUDE DE SENS, MAIS CONSCIENTE DES LIMITES DE L’INTELLECT HUMAIN ET DE L’IMPERITIE DE L’ECRASANTE MAJORITE DE L’ESPECE HUMAINE, NE DEVOILE JAMAIS LE FIN MOT DES CHOSES… ELLE SE CONTENTE DE DIRE QUE L’ECRITURE A OBSCURCI, OCCULTE LES CHOSES POUR NOUS (SATAM LEKHA HA-KATUV…) C’EST CE QU’ELLE DECLARE PAR EXEMPLE LORS DE SON EXEGESE DU RECIT DE LA CREATION DE L’UNIVERS, RECONNAISSANT IMPLICITEMENT QUE DE TELS MYSTERES NE SAURAIENT ETRE ACCESSIBLES A L’ESPRIT HUMAIN. AUTRE EXEMPLE : QUAND ELLE COMPARE LES VISIONS D’ISAÏE ET D’EZECHIEL CONCERNANT LE CHAR DIVIN, LA TRADITION JUIVE DONNE UNE EXPLICATION QUI N’EN ET PAS UNE : L’UN DES DEUX PROPHETES ETAIT UN CITADIN HABITUE A VOIR DEFILER LE CORTEGE ROYALE ALORS QUE L’AUTRE ETAIT UN CAMPAGNARD QUI RESTE INTERDIT ET EBLOUI SUR LES BORDS DE LA ROUTE, VOYANT UN TEL SPECTAVLE POUR LA PREMIERE FOIS…
JUSQU’ICI, NOUS AVONS ABORDE LES THEOPHANIES, QUID, A PRESENT, DES PASSAGES NARRATIFS, DES RECITS QUE LA BIBLE DONNE DE PERSONNAGES AYANT REELLEMENT EXISTE ? EN D’AUTRES TERMES, LA BIBLE EST-ELLE UN LIVRE D’HISTOIRE ? LA ENCORE, LES RABBINS, TANT CEUX DE L’ANTIQUITE QUE CEUX DU MOYEN AGE SE SONT BIEN RENDUS COMPTE QUE LA BIBLE N’ETAIT PAS UN LIVRE D’HISTOIRE, A LA CHRONOLOGIE RIGOUREUSEMENT EXACTE… VOYONS LE LIVRE DE LA GENESE QUI COMPTE PAS MOINS DE 50 CHAPITRES… ET QUI APPLIQUE TANT A ABRAHAM QU’A SON FILS ISAAC LES MEMES PERIPETIES, NOTAMMENT LE RAPT DE L’EPOUSE PAR LE ROPI ABIMELECH… LA TRADITION JUIVE, NE POUVANT PAS PARLER COMME NOUS DE L’HYPOTHESE DOCUMENTAIRE, NI DE LA REUNION DE SOURCES DIFFERENTES (YAHWISTES ET ELOHISTES) OPTE POUR UNE EXPLICATION ETHICO-PSYCHOLOGIQUE : CE QUE VIVENT LES PERES DOIT SERVIR DE SIGNAL ET DE MISE EN GARDE A LEURS FILS… LA ENCORE, LA TRADITION, CONSCIENTE DU PROBLEME, NE FAIT QUE L’EFFLEURER. AUTRE EXEMPLE : LE PARCOURS D’ISMAËL DANS CE MEME LIVRE FLUCTUE ENTRE, AU MOINS, TROIS VERSIONS : D’ABORD, AGAR, ENCEINTE, S’ENFUIT ET L’ANGE LUI ORDONNE DE REVENIR CHEZ SA MAITRESSE ; ENSUITE, ELLE EST CHASSEE AVEC SON FILS ET, PLEURANT DANS UN DESERT INHOSPITALIER, ELLE ENTEND L’ANGE LUI DIRE DE SE RESAISIR ET DE BIEN S’OCCUPER DE SON FILS… ENFIN, LORS DES FUNERAILLES DU PATRIARCHE ABRAHAM, ON LIT QU’ISMAËL VIVAIT TOUJOURS, DEPUIS CE TEMPS LA, AUPRES DE SON PERE… LE RECIT EST DONC, MANIFESTEMENT COMPOSITE ET LE SCRIBE ETAIT VICTIME DE DIPLOPIE, C’EST-A-DIRE QU’IL REGARDAIT PLUS D’UNE SOURCE A LA FOIS… D’OU DES ASPERITES NON ARRONDIES DE LA VERSION FINALE… ET JE LAISSE DE COTE LES PASSAGES OU, APRES AVOIR DEROULE PAR LE MENU LA VIE D’ABRAHAM, ON EPROUVE LE BESOIN DE RESUMER EN UN SEUL VERSET TOUS LES GRANDS MOMENTS DE SON EXISTENCE… COMME SI ON NOUS LE PRESENTAIT POUR LA PREMIERE FOIS.
CONSCIENTE DE TOUT CELA, LA TRADITION A ERIGE UN PRINCIPE SELON LEQUEL, IL N’Y A DANS LA BIBLE NI AVANT NI APRES, NI ANTERIORITE NI POSTERIORITE. IL EST EVIDENT QUE CETTE REPONSE N’EST QU’UN PIS ALLER, CHERCHANT A OBVIER AUX CRITIQUES QUI N’ONT PAS DU MANQUER CONTRE L’INCONSISTANCE HISTORIQUE (REELLE OU SUPPOSEE) DE LA BIBLE. CETTE BRILLANTE TROUVAILLE APOLOGETIQUE ETAIT A DOUBLE TRANCHANT, CAR ELLE POUVAIT PORTER GRAVEMENT ATTEINTE A L’HISTORICITE DES PERSONNAGES BIBLIQUES DANS LEUR ENSEMBLE. IL FALLAIT DON EN FAIRE UN USAGE CIRCONSPECT. MAIS L’ENSEIGNEMENT PRINCIPAL EST QUE LA BIBLE RENONCE A TOUTE CHRONOLOGIE EXACTE ET FIABLE…
TOUTEFOIS, POUR LES JUIFS COMME POUR LES CHRETIENS, CELA N’ENLEVAIT RIEN A LA SACRALITE DU TEXTE NI A LA VALEUR DE L’HISTOIRE SAINTE DANS LE SEUL DOMAINE OU ELLE ENTEND FAIRE VALOIR SES PRETENTIONS, CELUI DE LA PIETE : ON BROSSE DES PERSONNAGES, ON RELATE DES EVENEMENTS AFIN QUE LE LECTEUR DEVOT S’INSPIRE DE SI HAUTS EXEMPLES. UN THEOLOGIEN AUSSI HABILE QUE HUGUES DE SAINT-VICTOR N’ECRIVAIT-IL PAS QUE L’ECRITURE GRANDIT AVEC SES LECTEURS… IL INVITAIT DONC A ENRICHIR A BRODER SUR CE TEXTE DE BASE. DE LEUR COTE, LES SAGES DU TALMUD AVAIENT SPECIFIE QUE LA TORA A SOIXANTE-DIX ASPECTS OU SENS… CE NOMBRE, A L’EPOQUE, ETAIT EMBLEMATIQUE.
IL EST EVIDENT, PAR CONSEQUENT, QUE MEME LES THEOLOGIENS, LES PLUS ECLAIRES, EVIDEMMENT, SAVAIENT QUE LA BIBLE N’EST PAS UN DOCUMENT REVELE D’UNE SEULE PIECE MAIS CONSTITUE, EN REALITE, UNE LITTERATURE NEE A DIFFERENTES EPOQUES, REFLETANT AUSSI LES PREOCCUPATIONS DE L’AGE DE SA REDACTION ET DES DIFFERENTES EPOQUES DE SA REVISION… NULLE TRACE DE L’IDEE MESSIANIQUE DANS L’EXODE NI LE LEVITIQUE ALORS QUE DANS LA LITTERATURE PROPHETIQUE DU MILIEU DU VIIIE SIECLE, SE PROFILE NETTEMENT LA MAJESTUEUSE FIGURE DU REDEMPTEUR DE L’HUMANITE, LE FILS DE DAVID.
ERNEST RENAN SE GAUSSE, DES SON JEUNE AGE, DE BOSSUET QUI S’EXTASIE DANS SON DISCOURS DE L’HISTOIRE UNIVERSELLE SUR LES TALENTS DIVINATOIRES DU LIVRE D’ISAÏE (CH. 44) QUI CITE CYRUS DEUX CENTS ANS AVANT SA NAISSANCE ! BOSSUET, DANS SA PIETE, NE POUVAIT IMAGINER (COMME CHATEAUBRIAND, D’AILLEURS) QU’A PARTIR DU CHAPITRE 40, ON A AFFAIRE A UN AUTRE PMROPHETE QUE L’ON NOMME, PAR COMMIODITE LE DEUTERO-ISAÏE…
PENSONS AUSSI A L’ŒUVRE DE CE COURAGEUX ORATORIEN RICHARD SIMON, HISTOIRE CRITIQUE DE L’ANCIEN TESTAMENT… ON LE VOIT AISEMENT, IL Y A DIFFERENTS TYPES ET MODES DE LECTURE DE LA BIBLE, QU’ELLE SOIT JUIVE OU CHRETIENNE. LES TEXTES CANONIQUES HEBRAÏQUES FURENT VRAIMENT FIXES VERS LE VIIE SIECLE ET PROBLAMENT ENCORE AMENDES A LA FIN DU VIE, A L’OCCASION DU RETOUR DES EXILES DE BABYLONE… ON LE VOIT LA PAROLE DU SEIGNEUR EST LOIN D’ETRE UNIVOQUE ; LA BIBLE N’EST PAS COULEE, UNE FOIS POUR TOUTES, DANS UN INTOUCHABLE MOULE DE BRONZE, COMME LE PENSAIT NAIVEMENT BOSSUET.
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