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Vu de la place Victor-Hugo - Page 345

  • Augeschoben ist nicht aufgehoven: Quelques réflecions sur les réalutats des élections en Aurichze

     

    Aufgeschoben ist nicht aufgehoben... Quelques réflexions sur les élections présidentielles en Autriche

    En bon français, ce n’est que partie remise ! C’est du moins ce que Marine le Pen vient de dire en commentant les résultats qui ont donné la victoire au candidat écologiste, qui, en dépit de son âge et de son peu de charisme, a remporté haut la main les élections. Mais est ce à dire que la question a été réglée une fois pour toutes, c’est peu probable Faisons une brève rétrospective.

    Qu’est ce qu’un Autrichien et qu’est ce que l’Autriche ? Ce sont deux questions qui se posent depuis la fin de la seconde Guerre mondiale. J’aime bien ce petit pays qui a eu une grande histoire et qui a réussi à maintenir son indépendance par sa neutralité active jusqu’à la disparition de l’URSS, laquelle aurait vu d’un très bon œil la possibilité de satelliser ce pays comme elle le fit sur les autres pays d’Europe et orientale. J’ai souvent séjourné à Vienne pour mes recherches sur les manuscrits hébraïques, conservés dans la très belle bibliothèque d’Etat.

    Les pays du monde entier sont déterminés par une loi d’airain, à savoir leur emplacement géographique et donc leur arrière-pays, en allemand, leur Hinterland. Or, l’Autriche, depuis la disparition de la double monarchie, se cherche et a fini par adhérer à l’Union Européenne. Mais cette adhésion, certes, hautement bénéfique, n’était pas sans problème. Car les Autrichiens ont vu leur étendue territoriale et leur poids en Europe, diminuer fortement depuis l’après-guerre. Et voici que depuis la crise des migrants, ils se sont sentis envahis par des gens issus d’une autre culture et d’une autre religion, avec lesquelles la monarchie austro-hongroise eut maille à partir pendant des décennies par le passé.

    A ce pays se pose le problème du maintien ou de la disparition de sa culture et de sa civilisation. Situé sur une voie de passage des migrants, l’Autriche n’a pas pu faire face comme son géant voisin, l’Allemagne de Madame Merkel qui a ouvert toute grande la frontière de son pays, voulant ainsi enrayer la crise démographique et fournir à l’industrie allemande les millions de bras et de mains qui vont lui manquer dans quelques années. On a l’impression que ce pays est l’otage, le prisonnier de sa situation géographique. Du temps où il favorisait le dialogue entre l’ouest et l’est, ses chanceliers étaient connus du monde entier. Je pense notamment au célèbre Bruno Kreisky, l’inamovible chancelier, qui sut naviguer avec adresse entre les différents écueils.

    Mais aujourd’hui, la situation est entièrement différente et une proportion sans cesse croissance de la population penche vers un parti qui lui semble mieux porter ses espoirs et défendre son avenir. Peut-on le leur reprocher ? Certes, le candidat écologiste, partisan du maintien en Europe, l’a emporté en raison de la peur de ce saut dans l’inconnu. Toutefois le score remporté par Norbert Hofer est loin d’être déshonorant. Et si les élections législatives avaient lieu demain ou même après demain, rien ne laisse présager que le parti d’extrême droite subirait une défaite.

    L’Europe est l’avenir mais un avenir qui, comme tout espoir, tarde à se concrétiser. Il faut régler les problèmes à la racine et non s’occuper des conséquences. Certes, on peut s’étonner de la mansuétude que je témoigne aux thèmes de ce parti qui a tout de même réunis près de 48% des électeurs.

    Quand je compare cette situation à ce qui se passe en France, je réalise que la culture européenne, faite à la fois des idéaux des Lumières mais aussi de la Shoah, ne sait pas se défendre. Et un beau jour, les citoyens ont fini par dire non et se révolter contre le laxisme et le laisser-aller. J’ai la nette impression que les Autrichiens ont senti que leur base territoriale, culture, religieuse et spirituelle, allait en se rétrécissant. Que l’on me comprenne bien : il ne s’agit pas de défendre la xénophobie ni l’antisémitisme, mais qu’allons nous répondre à des gens qui se sentent laissés pour compte, face à des étrangers auxquels on porte secours ?

    Il y a aussi, de façon plus lointaine, l’effet Trump. Cet homme que personne ne prenait au sérieux, étranger au microcosme politique, qui a subi les pires avanies lors de la campagne électorale, a fini par l’emporter dans la plus grande puissance mondiale. Rien n’y fit, pas même les pires accusations personnelles… Et pourtant, il a gagné et constitue son équipe en renforçant ses idées jugées extrémistes.

    Pourquoi ? Parce que des millions d’électeurs en ont eu assez qu’on leur impose leur façon de penser et leur mode de vie. Après tout, du moment que vous respectez les lois internationales, vous êtes libres de faire chez vous ce que vous voulez. Or, qu’a fait cette Europe autiste de Bruxelles ? Elle a osé imposer aux pays un quota de migrants à recevoir ! Est ce le retour de la théorie brejnévienne de la souveraineté limitée ?

    Il faut cesser de diaboliser certains partis de droite ou d’extrême droite. Je me pose la question : en France, tous les sondages placent Marine Le Pen en tête du premier tour et présente au second. Elle oscille entre 25 et 28%. Allons nous dire qu’un gros tiers des électeurs de France se sont radicalisés ? Non point, ils constatent simplement que les partis dits traditionnels ne respectent pas leurs promesses.

    Et si la situation ne change pas en Europe, celle-ci connaîtra une période d’effilochage (Zerfaserungsprozess) et il faudra du temps pour remonter la pente. L’Europe doit se renforcer. Comme le dit l’adage : Quand on a des convictions, on se mobilise pour les défendre.

    Jusqu’ici ce n’est pas le cas. Alors, pourquoi s’étonner !

    Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève

     

     

     

     

     

  • Hegel et le cas Hollande

    Hegel et le cas Hollande...

    Quelques mots d’introduction pour situer la prise de connaissance de la nouvelle qui a surclassé toutes les autres : à l’exception de quelques très rares fidèles, le président de la République n’avait mis personne dans la confidence… Mais dès que nous sommes descendus d’avion hier soir tard et que le chauffeur nous avait accueillis dans le véhicule, la nouvelle nous fut annoncée. Arrivés à la maison, la première chose à faire fut d’allumer la télévision… Et là, ce n’était plus le même homme, un être vêtu de noir, créant un contraste avec la blancheur immaculée de sa chemise, les traits tirés, la voix blanche, le regard d’un homme qui se libère, ne veut plus souffrir, se débarrasse d’un poids qui l’oppresse… Moins de dix minutes pour sceller une carrière de près de quatre décennies !

    En écoutant les commentateurs qui disent tout et son contraire, je pense aussitôt à Hegel, mort en 1832 à Berlin et auquel je me suis de nouveau intéressé en travaillant sur Fr Rosenzweig, lequel avait justement soutenu sa thèse sur Hegel et l’Etat, c’est-à-dire sur sa philosophie politique. Beaucoup de gens pensent que Hegel n’a écrit que la phénoménologie de l’esprit, Les principes de la philosophie du droit, ou une biographie succincte de Jésus… Il a aussi écrit La philosophie de l’Histoire où il s’intéresse de très près à la politique et aux Etats.

    Hegel, pour esprit génial qu’il fût, n’était pas un pacifiste bêlant ni un naïf ; il dit partout que l’Histoire est tragique, que les nations partent en guerre pour peu de choses et que face à des forces colossales s’agitant au sein de l’Histoire, les hommes, même les hommes d’Etat, sont emportés par le vent de l’Histoire comme de simples fétus de paille. C’est l’impression que j’ai ressentie en regardant cet homme, notre président, articuler difficilement le discours probablement le plus imprononçable de toute sa carrière.

    Mais Hegel va encore plus loin ; il a écrit certaines phrases qui ont gravement choqué les jeunes étudiants que nous étions à vingt ans. Seule la pierre est innocente, ou encore toute conscience poursuit le meurtre d’une autre conscience (et surtout en politique où l’on fait flèche de tout bois)…

    Dans cet effacement volontaire, d’autres diront contraint et forcé, je distingue, sans donner de noms, trois phases : a) le suicide politique (le fameux livre) b) l’assassinat politique (impossible de les nommer tous, tant ils sont nombreux c) le guet-apens politique (orchestré par deux hauts personnages de l’Etat… Mais que l’on se rassure, nul n’est vraiment coupable car la presse a donné ici un sérieux coup de main !

    Que l’on nous comprenne bien ; nul n’est aveugle, tout le monde est au fait des erreurs, des atermoiements, des calculs, des revirements, des tergiversations etc… de François Hollande, mais cela ne justifie nullement cette pression qui a fini par l’empêcher de se représenter. Après tout, la défait annoncée n’eut pas été plus humiliante que celle de son ancien rival Nicolas Sarkozy.

    Mais dans le cas précis de François Hollande, ceux qui se sont juré sa perte et qui ont réussi à le dissuader de se représenter, venaient tous de son camp, portent une part de  responsabilité dansr une politique rejetée par une impressionnante majorité de Français. Ah, j’oubliais les sondages : comment cet homme a-t-il fait pour ne pas avoir des aigreurs d’estomac ou même un ulcère en lisant chaque matin que Dieu fait, les résultats des sondages dont aucun, absolument aucun ne lui accordait la moindre chance.

    Que l’on ne prenne pas ces réflexions pour un plaidoyer en faveur d’un président dont le mandat ne durera pas plus de six mois ! Je voudrais que l’on n’instille pas seulement un dose de proportionnelle mais d’éthique, de morale, dans le comportement des élites qui gouvernent. Les couronnes (mortuaires) que certains s’empressent de tresser à cet homme en l’assurant de leurs meilleurs sentiments ont quelque chose de choquant.

    A-t-on simplement idée des nuits blanches, des moments douloureux traversés par cet homme qui n’en reste pas moins un être humain comme nous tous ? Je l’imagine rédigeant tout seul ou sous les conseils de quelques rares fidèles ces quelques lignes, véritable testament politique…

    Hegel a raison, l’Histoire est tragique. Ce philosophe avait de la politique une conception bien à lui. Vivant à l’époque où il n’ y avait pas une mais des Allemagnes, il a littéralement divinisé l’Etat car il fallait lutter contre l’émiettement en petites baronnies et autres principautés (die Kleinstaaterei). Bismarck a retenu la leçon, lui qui placarder dans toutes les salles de classes du Reich l’inscription suivante : l’homme n’est pas sur terre pour être heureux mais pour accomplir son devoir. Absolument exaltant pour des enfants ou des adolescents !

    Encore un petit fleuron de Hegel : les années de bonheur de l’humanité sont les pages blanches de l’Histoire..

    François Hollande que l’on disait émule de François Mitterrand n’a pas lu ni relu Hegel. Mais s’il avait été le monstre froid et insensible, tel que certains le décrivent, il n’aurait pas cédé et se serait représenté contre vents et marées. Depuis quelques semaines, cet homme ne souriait plus, certains disent même qu’il avait perdu l’appétit…

    Que faire, comment d’y prendre pour moraliser la politique, gouverner les hommes sans sacrifier tant de vertus humaines dans le seul but d’accéder au pouvoir ? Peut-être aurais-je dû m’en référer non pas à Hegel mais au livre de l’Ecclésiaste qui ouvre son immortel discours par une triple mention du même vocable : vanité.

    Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève

     

     

     

     

  • Un très beau livre de Jean des Cars, Le siècle des sacres...

    Jean des Cars, Le siècle des sacres (Perrin)

    Quand vous posez ce beau livre, ce superbe livre, vous pensez une chose : il tombe bien, il tombe très bien et ferait l’objet d’un cadeau de fin d’année. C’est un chef-d’œuvre dont l’auteur, excellent écrivain, nous fait l’aubaine. Les photographies sont de véritables œuvres d’art. Les commentaires, brefs, sobres et élégants, retiendront l’attention des lecteurs cultivés ou qui cherchent à le devenir.

    Les sacres, la royauté, les familles royales, les dynasties, tout ceci semble si loin de nous et pourtant, tous ces rites, toutes ces cérémonies filmées et diffusées dans le monde entier, nous marquent. J’ai été agréablement surpris de voir que même les origines de la monarchie de droit divin sont rappelées de manière claire et instructive.

    Les lecteurs de la Bible se souviendront des deux livres du prophète Samuel dans la Bible hébraïque : Dieu demande à son envoyé d’aller oindre le jeune Saül, fils de Kish. On se rend compte qu’il existe une sorte de dyarchie au sommet : le prophète qui consacre et valide, au no de Dieu, l’institution royale, même si celle-ci peine à être acceptée par tous, Dieu étant le seul vrai monarque.. Et face au prophète d’où il tire sa force et sa légitimité, il y a le roi dont le comportement doit être conforme à la loi.

    On l’oublie parfois, mais même l’empereur germanique Othon avait fait graver sur sa couronne sertie de pierres précieuses deus scènes montrant le roi David et son fils Salomon, bâtisseur du Temple de Jérusalem.

    C’est donc dans la Bible que s’origine la monarchie de droit divin qui nous a gouvernés durant des siècles faisant de nous des sujets avant de nous accepter comme  citoyens.

    Jean des Cars balaye un très large spectre qui aboutit à nos jours avec, entre autres, la très médiatique famille royale britannique.

    Très beau livre, très agréable à regarder, a feuilleter et à lire.

    Maurice-Ruben HAYOUN in Tribune de Genève du 2 décembre 2016