a burka, une crise de la culture ?
Au cours du conseil des ministres d’hier mercredi 21 avril le président Sarkozy a tranché : il y aura bien une loi interdisant de se déplacer voilé ou masqué dans tous les espaces publics, c’est-à-dire que le champ d’application de cette interdiction a été considérablement élargie, au motif que la dignité de la femme ne se négocie ni ne se partage en fonction de l’espace où elle se trouve. Cette fermeté succède à une période d’incertitude au cours de laquelle les huristes se sont interrogé sur la constitutionnalité de la future loi.
D’un point de vue purement extérieur, on est frappé par la concomitance des initiatives législatives tant en Belgique qu’en France, deux pays que l’histoire récente a mis en relation avec des populations non européennes qu’ils administrèrent durant des décennies, voire plus.
Au cours de cette longue coexistence entre des systèmes culturels et religieux assez éloignés l’un de l’autre, les anciennes puissances coloniales n’ont pas vraiment réussi à faire partager leurs valeurs culturelles ou spirituelles par les peuples avec lesquels ils constituaient jadis une communauté. Alors que toutes les valeurs de la spiritualité et de l’éthique ne comptent qu’en raison de leur universalité et de leur capacité à s’imposer à tous, la culture européenne n’a pas réussi à dé diaboliser, à démythifier le corps de la femme aux yeux de certaines populations.
Car de quoi s’agit-il vraiment ? Il s’agit du corps de la femme dont non seulement le visage mais l’aspect physique dans son ensemble semble faire problème. Lorsque des femmes circulent en burka à Kaboul ou ailleurs dans l’aire géographique arabo-musulmane, cela passe inaperçue car un tel spectacle fait en quelque sorte partie du paysage. Il en est tout autrement dans les villes et villages de la vieille Europe où les traditions sont chrétiennes ou judéo-chrétiennes.
Pourtant, dans un chapitre de la Bible (Genèse, 24 ;65) on peut lire que Rébecca, la fiancée du patriarche Isaac, le fils d’Abraham, se voila aussitôt qu’elle aperçut au loin son futur époux… Certes, depuis cette époque (environ 1800 ans avant l’ère usuelle), l’humanité a fait quelques progrès et a appris à considérer la femme comme un être humain dont le corps ne représentait plus l’essence même de la tentation.
De toute évidence, la culture européenne a connu des avancées qui ne font pas l’unanimité puisqu’une large fraction de la population immigrée dans notre continent ne partage toujours pas les mêmes valeurs. Est-il concevable que les démocraties européennes cèdent sur un point aussi crucial que le statut de la femme alors que l’on se dirige vers un strict respect de la parité et que la participation des femmes dans les secteurs se développe ? Un exemple éloquent : Aujourd’hui, les citations et les promotions dans les deux ordres nationaux (légion d’honneur et mordre national du mérite) comportent autant d’hommes que de femmes… Comment accepter que certaines puissent déambuler sans que l’on puisse les identifier ?
Ce problème n’a rien à voir avec une prescription religieuse. C’est une affaire qui relève de la société et de la culture. Mais il y a un aspect qui est généralement négligé parce que les observateurs ne tiennent pas vraiment compte des conditions de vie des femmes qui portent ce voile intégral. S’habiller comme le font l’écrasante majorité des femmes de France et de Belgique exposerait celles qui vivent dans des cités et des quartiers à des sollicitations, voire à des molestations contre lesquelles elles auraient le plus grand mal à se défendre… Et le voile, quelle que soit sa longueur, serait une sorte de protection, un message envoyé à un entourage masculin agressif aux yeux duquel maquillage, jean moulant et décolleté seraient une sorte d’appel, voire d’invitation à la débauche…
Le recours à cette dissimulation du corps féminin doit être considéré comme le signe criant d’un déphasage culturel. On aurait souhaité avoir des interlocuteurs religieux au fait de l’essence véridique des religions, de toutes les religions présentes sur le territoire national, qui éclaireraient ensuite leurs coreligionnaires sur de telles pratiques. Mais ces référents religieux n’existent pas et s’ils existent, ils gardent obstinément le silence. Pourquoi ?