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Boko haram ou la guerre des religions

Boko haram ou la guerre des cultures et des religions

 

Par-delà ces enlèvements, voire tous ces affreux massacres de chrétiens en oraison dans leurs églises nigérianes, on discerne de plus en plus nettement un rejet violent, voire sanglant de l’Occident et de tout ce qu’il représente, à savoir le christianisme avec sa doctrine trinitaire et sa culture, sa civilisation, toutes choses considérées  comme hautement condamnables, voire impures.

 

A ma connaissance, c’est la première fois depuis bien des siècles qu’un groupe terroriste rejette ainsi en bloc toute civilisation non islamique, ses valeurs et sa religion, le judéo-christianisme. Il me revient à l’esprit une étude du grand islamologue et turcologue américano-britannique Bernard Lewis où l’on pouvait lire que les Ottomans, traumatisés par leur défaite militaire face à l’Occident chrétien se demandèrent où pouvait bien résider la supériorité de leur ennemi d’une part, et les raisons de leur propre défaite, d’autre part. Ils conclurent rapidement que les armées chrétiennes étaient mieux organisées, mieux entraînées et mieux équipées. La question se posa alors de savoir si la loi islamique permettait à de bons musulmans d’imiter les «infidèles»… Rendes vous compte !!

 

Dans un autre ouvrage paru aux éditions Fayard, le même spécialiste s’ interrogeait sur les raisons de ce déclin, de cette véritable décadence : what went wrong ? Que s’est-il passé ? On a presque envie de dire … Mais qu’ est-ce qui s’est mal passé ?

 

Et on se retrouve toujours à la case départ, le rejet de l’Occident et la volonté d’en revenir à un avenir situé dans le passé, à un état antérieur où tout allait bien mieux, une sorte d’adaptation islamique du mythe du paradis perdu, du Paradise lost de Milton… C’est d’ailleurs le sens premier de Salaf, le fondement, la base.  Et les salafistes sont justement les partisans d’un tel retour en arrière.

 

Voici une citation tirée d’un ouvrage du grand Karl Mannheim que ces gens ne liront jamais, mais tout de même :  Parmi les penseurs utopistes, il existe un groupe qui se réfugie dans le passé et tente d’y trouver une époque ou une société au sein de laquelle une certaine manière de transcender le réel dominait le monde. Et à travers cette reconstruction romantique, ils tentent de spiritualiser le présent… (Ideology and utopia, New York, p 259.

 

L’ancien ministre de l’intérieur français, Jean-Pierre Chevènement, disait à ses interlocuteurs musulmans que l’on pouvait revenir aux fondements les plus reculés, les plus anciens, sans devenir  nécessairement des fondamentalistes… C’est-à-dire que la quête légitime du passé n’obère pas la conquête pacifique d’un avenir encore plus radieux.

 

Nous sommes bien loin d’une telle évolution. Mais je le répète, c’est la première fois depuis des siècles qu’une telle évolution, le rejet total et absolu de l’Occident s’exprime aussi nettement.

 

Voyez l’Egypte, pays ruiné et au bord du gouffre, voire de la guerre civile, où un islamiste ose dire à la télévision d’Etat que l’existence des pyramides est incompatible avec une pratique aine et conséquente de sa religion…

 

Or, sans les rentrées d’argent générées par le tourisme, le don du Nil comme disait Hérodote serait encore plus misérable… Dieu seul sait où ces gens s’arrêteront et quand ils retrouveront le chemin de la saine raison…

 

Maurice-Ruben HAYOUN

In Tribune de Genève du 26 février 2013

 

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