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  • Le Pr Obama et la Syrie de Bachar

    Le Pr Obama et la Syrie de Bachar

    Je ne sais pas lire sur les lèvres ni déchiffrer ce que cachent les sourires ou de molles poignées de main, mais j’ai bien l’impression que Obama semblait se dire à lui-même, en saluant son hôte à Saint Petersburg, V. Poutine : tu ne sais pas ce qui t’attend

    Tout montre que le président US a compris la gravité de la situation et les erreurs qu’il a accumulées. Il a compris qu’il avait mal manœuvré mais que ce crime contre l’humanité, commis par Bachar, est inexcusable : tout défaut américain dans ce domaine ruinerait la crédibilité du parapluie nucléaire US et discréditerait ce grana pays à tout jamais.

    Certains commentateurs se sont étonnés, à juste titre, de l’incroyable amateurisme tant de David Cameron que de Barack Obama. Ces affirmations sans discernement sur la ligne rouge, et les conséquences qu’on en tirerait ont considérablement porté préjudice à la crédibilité du camp occidental. Et puis, il y a plus, au plan moral : les Syriens qui souffrent se demandent par quoi s’explique cette impassibilité de l’Occident chrétien qui se voile la face dès que des graves crimes sont commis dans une zone qui ne relève ni de leur culture ni même de leur civilisation… Un jour, on serait amené à rendre des comptes.

    Je ne m’explique pas que des hommes d’Etat qui ont exercé le pouvoir mettent solennellement en garde contre toute intervention, alors que les conventions internationales commandent justement de réagir (sous chapitre VII de l’ONU)..

    Qu’attendons nous ? A part le vote du Congrès des USA ? Il y a déjà plus de 100 000 morts en Syrie, et près d’un million, voire plus, de déplacés ou de réfugiés en Turquie, en Jordanie et ailleurs…. Une intervention ciblée sur des sites exclusivement militaires est de nature à affaiblir la machine de guerre de Bachar, au moins l’armée de l’air qui maintient une supériorité du camp du pouvoir…

    Quoi qu’il arrive, les historiens diront que cette crise syrienne aura révélé qu’il faut de grandes qualités pour se conduire comme des hommes d’Etat

  • Vladimir Poutine et la Syrie: les dessous d'un soutien indéfectible

    Vladimir Poutine et la Syrie : les dessous d’un soutien indéfectible

    Il est déjà arrivé à V. Poutine de dire le peu d’estime qu’il portait à la personne et au régime de Bachar el Assad, et dans le même souffle, de clamer qu’il le soutiendrait jusqu’au bout. Pas forcément lui mais son régime, ce qui crée un mur infranchissable entre la Russie actuelle et l’Occident qui ne veut plus d’Assad ni de son régime alors que Moscou s’accommoderait de son départ mais pas de la chute de son régime.

    Pourquoi ? Au fond, la position de la Russie en Méditerranée orientale importe peu à ses dirigeants, ce qu’ils ont en tête et qui est une véritable obsession, c’est le danger islamiste. Ancien des services secrets russes, Poutine sait que l’islamisme a aussi pris part à l’effondrement du système soviétique. Et chaque jour que D- fait, il pense à la Tchétchénie dont la capitale a été réduite en cendres avant d’être rebâtie.

    Poutine se dit que si le régime syrien tombe, ce sont les islamistes, il parle toujours de wahabites, qui prendront le pouvoir, ce qui pourrait donner des idées aux musulmans de Russie et d’ailleurs. La tentation wahabite est grande dans les ex républiques soviétiques à majorité musulmane. Et Poutine le sait bien. C’est bien pour cette raison qu’il soutient mordicus le régime de Bachar. Songez qu’en deux ans et demi, la Russie a opposé son veto au moins trois fois pour éviter une condamnation de Bachar.

    On se souvient des livres de Hélène Carrère d’Encausse concernant les avancées de l’islam dans l’ex URSS. Elle parlait alors de l’homo islamicus dont l’idéologie ne pouvait s’accorder avec le communisme.

    Aujourd’hui, on ne peut pas comprendre la politique russe en Syrie sans cet arrière-plan de politique intérieure. Toutes les autres raisons sont secondaires.

  • Oradour sur glane: entre le pardon et l'oubli

                    Oradour sur Glane, presque soixante-dix ans après :

                                              Entre le pardon et l’oubli

    En France, mais aussi dans certains milieux allemands, mais pas partout, Oradour est devenu un symbole, celui de l’incroyable barbarie nazie commise par une division SS Das Reich, le 10 juin 1944, quelques jours après le débarquement allié en Normandie. Ivres d’une folie meurtrière, les SS avaient massacré l’ensemble de la population du village, plus de six cents personnes, hommes, femmes et enfants, sans la moindre pitié. Les survivants du massacre ne se comptent même pas sur les doigts d’une seule main.

    La raison de cette évocation nous vient de la visite conjointe des présidents français et allemand, François Hollande et Joachim Gauck, qui vont se rendre à Oradour cet après-midi même pour y prononcer des allocutions à la mémoire des victimes. Chacun se souvient de la visite conjointe de Fran çois Mitterrand et de Helmut Kohl à Verdun. Plus poignant encore et hautement symbolique, l’agenouillement du chancelier Willy Brandt devant le mémorial de Varsovie. Il y eut d’autres témoignages de demande de pardon, de reconnaissance de la faute et d’appel à la paix et à la sérénité.

    Cette affaire pose, aux plans théologique et philosophique, la question du pardon des crimes et des offenses, et celle de l’oubli. Pouvons nous pardonner sans oublier ? Et dans ce cas, quelle serait la portée et la valeur de ce pardon ? Peut on accorder la rémission des péchés ( en allemand Sündenvergebung) ? Et qui pourrait le faire, sinon les victimes elles mêmes, qui ne sont plus et dont les lèvres ne bougent plus, figées pour l’éternité ?

    Deux détails m’incitent à traiter de cette question en m’appuyant sur des références bibliques, attendu que le président allemand, contrairement à son homologue français, est un pasteur, donc un homme de religion dont l’autorité morale lui a valu le poste éminent qu’il occupe.

    La première question qui se pose est celle de la faute collective : peut-on parler de Kollektivschuld ? Absolument pas, cela irait à l’encontre de la théologie biblique telle qu’exposée dans le chapitre XVIII du livre d’Ezéchiel : le père ne paiera pas pour les fautes du fils ni le fils pour les crimes par son père. Ceci est absolument clair. D’ailleurs, pour bien illustrer son propos, le prophète Ezéchiel frappe une formule que l’on retrouve aussi chez Jérémie : Les pères ont mangé du verjus mais ce sont les dents des enfants qui en furent agacés.

    Mais bien avant Ezéchiel, contemporain de la destruction du premier temple de Jérusalem, au Vie siècle finissant, on lit dans les chapitres de la Genèse consacrés au patriarche Abraham cette confrontation entre ce dernier et Dieu qui se voit interdire d’anéantir le juste avec l’impie, l’innocent avec le coupable… Dieu se voit rappeler sa propre théodicée..

    Bref, il doit lui aussi respecter un principe fondamental de la conscience humaine, l’individualisme religieux. On ne paie pas pour les autres, pas de justice clanique, pas de loi du talion..

    Et puis, il existe le pardon qui intervient après la repentance. Les Allemands appellent cette repentance, le retour en soi, sur soi (Einkehr), un peu comme le dit le Deutéronome : reviens à ton cœur (en toi-même) et l’Eternel ton Dieu te reviendra. Très belle image.

    On ne peut pas oublier ce qui s’est passé mais on ne doit pas le reprocher ni l’imputer aux descendants de ceux qui l’ont commis. La République Fédérale est une Allemagne nouvelle, solidement ancrée dans le camp de la démocratie et de la liberté. Certes, il y eut, à certaines époques, des hésitations à poursuivre une dénazification rigoureuse, mais aujourd’hui l’Histoire a fait place nette.

    En prenant conjointement la parole à Oradour, les deux présidents ouvrent une page nouvelle dans l’histoire des relations entre les deux pays. Ce n’est pas rien, ce n’est pas une simple commémoration qui viendrait s’ajouter à tant d’autres. Non, c’est quelque chose d’absolument nouveau puisque ce fut, à ma connaissance, le seul exemple d’un vrai holocauste en miniature sur le sol français où de simples civils furent suppliciés pour assouvir la haine meurtrière de soldats en perdition.

    Par cette visite, le président allemand, le pasteur Gauck, remet à l’honneur les vraies valeurs morales de l’Allemagne spirituelle (das geistige Deutschland), celle qui a marqué  la constitution éthique de notre continent.