Par amour de la liberté et pour rejoindre l’Europe, Kiev s’embrase… La révolution ukrainienne a déjà ses martyrs, au nombre de cinq, dont quatre tués par balles. L’opposition au président actuel soupçonne des tireurs embusqués sur les toits entourant la place de l’indépendance. Comme tous les anciens apparatchiks communistes, M. Janoukovich a toujours deux fers au feu : d’un côté il aggrave la répression policière, de l’autre, il reçoit les révoltés durant près de trois heures. Mais sur les places de Kiev, la police déploie un char ( !) et a déjà fait fait plus de trois cents blessés parmi les manifestants. L’Occident n’a pas tenu ses promesses ni n’a honoré les valeurs en lesquels il croit. Souvenons nous : depuis la révolution léniniste, l’Occident a laissé une partie de l’Europe, orientale et centrale, enchainée derrière un rideau de fer. Les gouvernements démocratiques ont concédé à la défunte URSS le droit –reconnu- de retenir captifs et d’asservir des millions d’hommes. Souvenus nous de la répression de Budapest en 1956, du coup de Prague en 1968. Jamais personne n’a volé au secours de ces hommes qui ne réclamaient qu’une chose : la liberté, la possibilité de vivre debout et non plus à genoux. Et aujourd’hui, hormis les USA qui ont retiré leurs visas à des hommes du pouvoir à Kiev, l’UE ne fait rien. Alors qu’il faudrait contraindre Janoukovich à la démission et arrimer l’Ukraine à l’Europe livre. Car que réclament les manifestant ? Pour quelle cause sont ils prêts à donner leur vie ? La cause d’une Europe libre qu’ils aspirent à rejoindre . Evidemment, M. Poutine ne peut ni veut le permettre car l’Ukraine est trop près la Russie et si elle rejoignait l’Europe, elle accomplirait automatiquement un second pas, fort dangereux pour tout le glacis russe, rejoindre l’OTAN. M. Poutine avait déjà agi de la sorte avec la Géorgie qui souhaitait faire le même choix… Mais l’Ukraine, c’est autre chose. Il faut aider ce pays à se dégager de la tutelle de la Russie qui exerce un chantage économique. L’économie de ce pays est encore sous développée, il lui faut du gaz pour se chauffer et pour produire. L’actuel maître du pays a su faire monter les enchères mais a dû, pour cela, payer le prix fort. Si l’Europe comptait vraiment, elle aurait dû faire une offre plus alléchante à l’Ukraine dont les citoyens rêvent de la rejoindre. Bien plus que la Hongrie et que la Roumanie dont les citoyens posent, dans certains cas, des problèmes à l’UE, l’Ukraine a vocation à se rapprocher de l’UE.
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Le Premier Ministre turc à Bruxelles
Le premier ministre turc à Bruxelles
M. Erdogan n’a pas laissé un souvenir impérissable de son passage à Bruxelles. Celui que ses nombreux adversaires politiques nomment en Turquie le sultan, pour bien montrer qu’il gouverne le pays comme jadis on gouvernait l’empire ottoman, aura montré au président de la Commission Européenne de quel bois il se chauffe. Alors que la police judiciaire de son propre pays enquête durablement sur des scandales politico-financiers qui l’ont contraint à remanier profondément son gouvernement, tant ils impliquaient ses proches, le sultan a réagi conformément à sa nature : il a mis à pied des dizaines de policiers et de magistrats, les accusant d’instrumentaliser contre lui un complot ourdi depuis l’étranger. Et comme l’Etat d’Israël est devenu sa bête noire, il y voit la main du sionisme et de milieux qui lui sont proches. Ce ne sont pas encore les protocoles des sages de Sion.. mais soyons patients. C’est vraiment désolant. Je me souviens qu’il y a quelques années un premier ministre de la Malaisie avait assisté impuissant à la chute catastrophique de la monnaie de son pays ; eh bien, au lieu de s’en prendre à une économie mal dirigée, il s’en prit à la juiverie internationale qui, dit il, domine les milieux bancaires internationaux.
Nous n’en sommes pas là avec M. Erdogan, mais comme le soulignait le journal Le Monde dans un récent éditorial, le premier ministre turc qui fut jadis joueur de football fait le match de trop (verbatim)… Le cours en zigzag de la politique étrangère turque montre que l’homme est trop impulsif. Alors que son armée (dont il se méfie) coopérait fructueusement avec l’Etat hébreu où s’entraînaient ses aviateurs et ses parachutistes, il met fin bruyamment à ces échanges dont son pays a pourtant grand besoin et s’allie avec les ennemis d’hier, la Syrie, qu’il finit par vouer aux gémonies, traitant son leader actuel de boucher. Alors que les USA protègent son pays, membre de l’OTAN, depuis des lustres, il les accuse de pactiser avec un célèbre opposant particulièrement puissant en Turquie, M. Güllen. Pour M. Erdogan, un pays qui abrite son adversaire politique et qui ne fait que respecter le droit des gens, est nécessairement contre lui et devient son ennemi.
Comment voulez vous admettre son pays au sein de l’Europe ?
Que l’on nous comprenne bien : la Turquie est un grand pays et les Turcs une grande nation. Mais l’Europe, c’est autre chose, c’est plus une culture qu’un continent. Ce pays peut jouer un rôle en Asie centrale où d’anciennes républiques soviétiques musulmanes seraient ravies de coopérer avec elle. Pour adhérer à l’Europe, il faut partager un minimum de valeurs communes. Alors, encore un effort, Monsieur le Premier Ministre !
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La conférence dite de Genève II ne sert à rien
La conférence de Genève II à Montreux sur la Syrie ne sert à rien
Quel cafouillage ! Nous dénoncions dès hier la bévue incroyable du secrétaire général de l’ONU qui songeait à inviter l’Iran, un pays dirigé par des fanatiques religieux et qui commet des actes inqualifiables en Syrie, à cette conférence. Le secrétaire général de l’ONU pensait ligoter ainsi les Iraniens en faisant croire qu’ils admettaient le possible départ de Bachar du pouvoir ? Ce n’est évidemment pas le cas : les Iraniens tiennent à Bachar car c’est à travers son pays que leurs armes parviennent au Hezbollah, mouvement terroriste libanais chiite. Renoncer à la Syrie, c’est, pour les Iraniens, perdre toute leur zone d’influence au Proche Orient. C’est aussi perdre la guerre que l’Arabie Saoudite mène contre eux à travers la résistance syrienne.
Certes, un jour ou l’autre, le peuple syrien l’emportera et les Iraniens seront boutés hors du pays. Cela prendra du temps mais cela arrivera car on ne connaît pas de cas dans l’Histoire où un tyran a réussi à se maintenir au pouvoir contre son peuple. Le dossier syrien aurait déjà été réglé dans le bon sens si l’actuel locataire de la Maison Blanche n’avait pas flanché à la dernière minute et s’il n’avait pas été circonvenu par les Russes : les frappes d’objectifs militaires syriens étaient désignées, la France était prête ainsi que d’autres initiatives qui auraient considérablement affaibli le régime. En faisant faux bond, M. Obama a involontairement renforcé le régime en place.
Cette reculade ne s’explique pas uniquement par l’inexpérience et l’impéritie de M. Obama dont le second mandat peine à trouver un nouveau souffle. Ce qui a calmé les ardeurs guerrières de la Maison Blanche, ce sont les victoires inquiétantes sur le terrain des djihadistes dont le but ultime est d’installer un califat islamiste en Syrie. Du coup, Bachar apparaissait comme un moindre mal.
Mais ce qui se joue à Montreux dépasse, et de loin, la Syrie. Les USA veulent négocier avec l’Iran, même si le sénat rassemble une majorité des deux tiers pour imposer à ce pays de nouvelles sanctions. M. Obama a en vue un désengagement général, tant du Proche Orient que d’Afghanistan, afin de se concentrer sur l’Asie et sur la Chine qui cherche à se hisser au même niveau de développement stratégique. Or, pour se retirer d’Afghanistan, il faut s’assurer d’un modus vivendi avec l’Iran qui a une frontière commune avec ce pays.
Sur le long terme Washington mise sur un assagissement des Mollahs dont la population aspire désormais à vivre confortablement après toutes ces années de disette économique imposée par les sanctions. Ce n’est pas un calcul déraisonnable mais il reste risqué. Les valeurs ne sont pas les mêmes des deux côtés de la table des négociations. Les Américains seront toujours de grands enfants, il suffit de voir leurs films pour comprendre leur structure mentale profonde. Ils sont cyniques comme toute autre grande puissance à travers l’Histoire. Ils savent que l’Histoire est tragique, que les peuples peuvent disparaître mais il font confiance à des gens qui ne le méritent pas.
Ils l’ont appris à leurs dépens dans le monde arabe, ils ne vont pas tarder à le comprendre chez les Iraniens. La conférence dite de Genève II accouchera d’une souris. C’est bien triste et la coalition syrienne a raison de ne compter que sur ses propres forces.