Un meurtre politique dans la Russie de Vladimir Poutine?
L’assassinat d’un grand opposant politique à Poutine, Boris Nemtsov, est probablement la goutte d’eau (de sang ?) qui va faire déborder le vase des horreurs jalonnant le règne sans partage du maître du Kremlin. IL est vraiment trop tôt pour accuser qui que ce soit ou fulminer des anathèmes. Comme le disait un commentateur russe installé en France depuis bien longtemps, c’est la Russie de Poutine qui signe ainsi sa radicalisation, son état désespéré face aux sanctions occidentales qui affectent la vie quotidienne des gens, et qui est en guerre, notamment dans l’est de l’Ukraine. V. Poutine a déclenché un processus qui a commencé par le servir lui et les intérêts qu’il défend mais qui commence à se retourner contre lui et contre ce qu’il représente. Apparemment il ne le maîtrise plus.
Aujourd’hui, un pas nouveau a été franchi. Les dirigeants des grandes puissances occidentales, en réagissant comme ils l’ont fait, montrent qu’il ne s’agit pas d’un simple fait divers : quand donc le président US exige-t- il un procès transparent dès qu’un homme ou une femme est assassiné sur la voie publique ? Il est clair que tous ces dirigeants, généralement bien informés, subodorent quelque chose qui n’est pas si simple… Poutine a réagi en parlant d’un acte de provocation visant à le placer lui-même dans une position hautement délicate. C’est possible, rien n’est à exclure. Mais lorsque vous écoutez les journalistes égrener la liste d’assassinats politiques ces dix dernières années tant à Moscou qu’ailleurs dans le monde, vous vous interrogez avec insistance : à qui donc profite le crime ? Et quel est le dénominateur commun de toutes ces victimes : elles étaient toutes des opposants politiques au régime russe actuel.
De là à se servir de cette analogie pour accuser le régime actuel il n y a qu’un pas qu’on ne doit franchir que s’il y a des preuves. Et pour le moment il n y en a pas.
Un mot sur la conduite des affaires par V. Poutine : depuis un certain nombre d’années, la Russie, ancienne grande puissance mondiale, est gouvernée par deux personnes qui effectuent une sorte de rotation au sommet du pouvoir : un président, ancien premier ministre et un ancien premier ministre qui va redevenir président. On a l’impression qu’il s’agit d’un condominium bien établi qui se pare des oripeaux de la démocratie, ce que l’opposition sur place conteste avec force.
Ce régime, autoritaire à l’intérieur, est très belliciste à l’extérieur : on l’a vu avec la Géorgie, on le voit aujourd’hui avec l’Ukraine. On se souvient des récentes demandes des républiques baltes, mais aussi de la Pologne, qui se sentent menacées par leur puissant voisine et ancien maître… En fait, ce régime ruse constitue une menace pour la paix mondiale. Et la mort violente d’un opposant notoire au régime tombe très mal pour lui.
Une éruption sociale n’est plus à exclure sur place. V. Poutine finira bien par comprendre qu’il doit se modérer et atténuer le caractère dictatorial de son action. On l’a vu récemment en Ukraine où ses supplétifs séparatistes n’ont pas respecté l’accord de Minsk.
Le problème le plus urgent qui nous fait face : que faire de la Russie ? Comment la gérer ? Surtout que doit faire l’UE face à la Russie, une ancienne grande puissance qui ne se résigne pas à son lent mais inexorable déclin ?